EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE
UNE ESPÉRANCE NOUVELLE POUR LE LIBAN
DE SA SAINTETÉ
JEAN-PAUL II
AUX PATRIARCHES, AUX ÉVÊQUES, AU CLERGÉ,
AUX RELIGIEUX, AUX RELIGIEUSES
ET À TOUS LES FIDÈLES DU LIBAN
INTRODUCTION
I. Un Synode pour l’espérance
1. UNE ESPÉRANCE NOUVELLE pour le Liban est née au cours de l’Assemblée spéciale du Synode des Évêques. Les catholiques de cette terre sainte sont invités par le Seigneur à vivre dans « l’espérance [qui] ne déçoit point, parce que l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint- Esprit qui nous fut donné » (Rm 5, 5). Ainsi renouvelés par Dieu, les fidèles du Christ qui sont au Liban deviendront pour tous leurs frères les témoins de son amour. L’Église catholique a tenu à associer à sa démarche des représentants des différentes communautés libanaises ; elle manifeste ainsi que, dans le dialogue respectueux et le partage fraternel, l’édification de la société est une œuvre commune à tous les Libanais.
Le Liban est un pays vers lequel les regards se tournent souvent. Nous ne pouvons oublier qu’il est le berceau d’une culture antique et un des phares de la Méditerranée. Personne ne peut ignorer le nom de Biblos, qui rappelle les origines de l’écriture. C’est dans cette région du Proche-Orient où Dieu a envoyé son Fils afin d’accomplir le salut de tous les hommes que, pour la première fois, les disciples du Christ reçurent le nom de chrétiens (cf. Ac 11, 19- 26). Aussi, le christianisme devint-il rapidement un élément essentiel de la culture de la région et, en particulier, de la terre libanaise, riche aujourd’hui de plusieurs traditions religieuses. Des catholiques membres d’Églises patriarcales différentes, ainsi que du Vicariat apostolique latin, y habitent. De ce fait, dès l’éveil de sa conscience, le jeune catholique libanais baptisé se sait maronite, ou grec-melkite, ou arménien catholique, ou syriaque catholique, ou chaldéen, ou latin. C’est ainsi qu’il s’ouvre à la vie chrétienne et qu’il est appelé à découvrir l’universalité de l’Église. Des chrétiens d’autres Églises et communautés ecclésiales résident aussi au Liban. L’autre partie importante de la population est constituée de musulmans et de druzes. Pour le pays, ces communautés différentes sont à la fois une richesse, une originalité et une difficulté. Mais pour tous les habitants de cette terre, faire vivre le Liban est une tâche commune.
Lors de la célébration eucharistique de clôture de l’Assemblée synodale, j’ai dit : « Tous ont besoin de [la] dimension sociale de la charité, qui permet aux hommes de construire ensemble. Nous savons combien le Liban a besoin de construire et de reconstruire, spécialement suite aux douloureuses expériences de plusieurs années de guerre, dans la recherche d’une paix juste et de la sécurité dans les rapports avec les pays limitrophes ». J’ai souligné aussi que l’engagement des chrétiens est important pour le Liban, « dont les racines historiques sont de nature religieuse. Et c’est précisément en raison de ces racines religieuses de l’identité nationale et politique libanaise que, après les dures années de la guerre, on a voulu et pu mettre en route une Assemblée synodale, afin de rechercher ensemble la voie du renouvellement de la foi, d’une meilleure collaboration et d’un témoignage commun plus efficace, sans oublier la reconstruction de la société » (1). En collaborant avec tous leurs compatriotes, les catholiques sont particulièrement appelés à servir le bien commun de la cité terrestre en tirant de la foi leur inspiration et les principes fondamentaux pour la vie en société.
2. Lorsque, le 12 juin 1991, j’ai convoqué une Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, la situation du pays était dramatique. Le Liban avait été profondément ébranlé dans toutes ses composantes. J’ai invité les catholiques présents sur cette terre à entreprendre un cheminement de prière, de pénitence et de conversion, qui leur permettrait de s’interroger, devant le Seigneur, sur leur fidélité à l’Évangile et sur leur engagement effectif à la suite du Christ. Par un retour sur soi lucide, accompli dans la foi, les pasteurs et les fidèles devaient pouvoir mieux discerner et préciser les priorités spirituelles, pastorales et apostoliques qu’ils avaient à promouvoir dans le contexte actuel du pays.
Dès le début, j’ai demandé aux autres Églises et Communautés ecclésiales de bien vouloir s’associer à cet effort, manifestant aussi l’intention œcuménique de l’Assemblée synodale, car pour l’avenir du Liban l’espérance est aussi liée à celle de l’unité des chrétiens. J’ai également invité les communautés musulmanes et druze à prendre leur part dans le projet; bien qu’il fût question avant tout d’un renouveau propre à l’Église catholique, il s’agissait en même temps de la reconstruction matérielle et spirituelle du pays, qui était un souci essentiel de tous ; et cela n’était possible qu’avec la participation active de l’ensemble de ses habitants.
Ces appels ont été entendus et j’en rends grâce au Seigneur, qui agit dans le cœur des hommes de bonne volonté. Une large consultation des catholiques a été entreprise. Plus de la moitié des réponses à cette consultation provenaient de chrétiens laïcs, qui voulaient ainsi manifester leur intérêt, souvent critique d’ailleurs, pour l’effort de renouveau ecclésial qu’il était opportun de réaliser dans ce cadre.
Le Conseil préparatoire du Synode étudia les réponses reçues et proposa comme thème du Synode : « Le Christ est notre espérance. Renouvelés par son Esprit, solidaires, nous témoignons de son amour ». Très volontiers, j’ai fait mien ce thème et je l’ai annoncé et commenté dans un message adressé à tous les Libanais en juin 1992.
À partir des réponses reçues, le Conseil préparatoire a rédigé un premier document important, les Lineamenta, qui a bénéficié de nombreuses collaborations. Ce document avait pour but de stimuler la prière et la réflexion de toutes les personnes concernées, notamment en posant sur chaque sujet une série de questions. La réflexion critique qui a été ainsi lancée était déjà porteuse de promesses. La conversion commence lorsque chacun accepte de s’interroger sur ses façons d’être et d’agir, en les confrontant sincèrement au message évangélique. Ce long travail de maturation a abouti à de nombreuses réponses de qualité. Des symposiums ont été organisés sur différents sujets et leurs travaux rendus publics. Beaucoup de paroisses ont réuni des groupes de réflexion, où l’on a travaillé les Lineamenta, chapitre par chapitre. Des groupes de personnes, spécialisées dans l’un ou l’autre domaine, ont envoyé des contributions élaborées.
Le Conseil de préparation s’est remis au travail pour rédiger un texte qui tienne compte de l’ensemble des réponses reçues. Ce document, l’Instrumentum laboris, allait fournir le programme de travail de l’Assemblée synodale.
3. À la suite de ce travail préparatoire, l’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques s’est réunie à Rome le dimanche 26 novembre 1995. Elle a commencé par une concélébration eucharistique dans la Basilique patriarcale Saint-Pierre. Cette liturgie a bien montré ce qu’est un Synode : une célébration en Église. L’unité dans la diversité, thème si souvent repris durant les débats, a d’abord été exprimée par l’Eucharistie solennelle dans la Basilique Saint-Pierre, à laquelle étaient présents tous les participants à l’Assemblée synodale. Durant les travaux du Synode, nous avons continué à prier en commun selon les traditions diverses de l’Orient et de l’Occident, demandant au Seigneur d’être présent au milieu de nous et de nous envoyer son Esprit pour que nous soyons ensemble son Église et que nous fassions sa volonté.
L’unité dans la diversité s’est manifestée par la qualité même des participants. Les Pères synodaux comprenaient tous les patriarches catholiques d’Orient, les archevêques et les évêques des différents diocèses catholiques du Liban, les cardinaux des dicastères du Saint-Siège concernés par les questions de l’Église au Liban, des évêques libanais de la diaspora, des supérieurs généraux prêtres des Ordres fondés et présents au Liban, des représentants des supérieurs majeurs et des évêques représentants des autres patriarcats catholiques du Proche-Orient, de même que quelques personnalités ecclésiastiques particulièrement intéressées par les objectifs du Synode.
Étaient également présents des délégués fraternels des autres Églises et communautés chrétiennes au Liban. J’ai aussi été heureux d’accueillir les représentants des communautés sunnite, chi’ite et druze. Il y avait enfin des auditeurs, prêtres, religieux, religieuses et laïcs. Tous ont participé aux travaux et se sont exprimés avec liberté, pertinence et enthousiasme, dans les réunions plénières comme dans les réunions restreintes des carrefours. Par ailleurs, des experts que j’avais nommés ont très utilement contribué au bon déroulement des travaux du Synode.
4. Malgré le nombre nécessairement limité d’invités à une telle assemblée, des membres de toutes les catégories de chrétiens et de toutes les composantes de la société libanaise étaient là, accompagnés par des représentants de l’Église catholique venus d’autres régions du monde. Ainsi les Églises locales et tous les habitants du Liban étaient portés par la sollicitude du monde catholique envers ce pays.
5. La conclusion des travaux de l’Assemblée ouvre une nouvelle étape de la démarche synodale. Un ensemble de propositions a été formulé et voté par les Pères synodaux. Sur la base de ces propositions et des autres documents du Synode, les Pères m’ont demandé de rédiger une Exhortation apostolique post-synodale, d’abord à l’intention des catholiques libanais, mais s’adressant aussi à l’ensemble des Libanais et à tous ceux qui prennent à cœur la situation de ce pays (2). Un Conseil post-synodal nommé par mes soins, assisté par le Secrétariat général du Synode, a contribué à la préparation du présent document.
6. Voici les grandes lignes de cette Exhortation. Après avoir porté dans le premier chapitre un regard sur la situation actuelle de l’Église catholique au Liban, le deuxième chapitre esquisse la réflexion théologique qui sous-tend l’ensemble des orientations qui seront tracées ensuite de manière concrète. Le troisième chapitre regroupe tout ce qui concerne le renouveau interne de l’Église catholique au Liban. Le quatrième chapitre concerne la communion entre les différentes Églises patriarcales au Liban et même autour du Liban. Un cinquième chapitre traite de la place de l’Église au Liban aujourd’hui. Le sixième chapitre évoque la dimension sociale et nationale. En effet, le Synode n’a pas porté son attention exclusivement sur les questions internes à l’Église catholique au Liban, mais il a eu tout le pays présent à l’esprit, car le destin des catholiques est profondément lié au destin du Liban et à sa vocation si particulière.
7. Chers frères et sœurs du Liban, le présent document donne des principes de réflexion, des orientations pour le renouveau et des suggestions concrètes. Il pourra vous servir dans les années qui viennent pour vous guider dans un renouveau constant. Vous chercherez les moyens de mettre en œuvre ce qui dans ce document est souvent exprimé sous la forme de souhaits. Vous compléterez les réflexions proposées, car, dans bien des cas, l’Assemblée synodale n’a fait qu’ouvrir des perspectives d’ensemble.
Il faudra que soit poursuivi et sans cesse affermi l’élan suscité par la préparation et par la tenue de cette Assemblée spéciale. Le Synode a inauguré une méthode de travail fondée sur l’écoute attentive de toutes les composantes de la population libanaise en général et des diverses catégories et institutions catholiques en particulier. Poursuivez ce travail et ne considérez surtout pas que le Synode est clos avec la publication de cette Exhortation apostolique. Je vous recommande vivement de chercher par tous les moyens à rendre fraternelle et effective la réception de ce document et à mettre en application ce que je vous propose ici, dans un souci constant de l’unité entre les catholiques et du bien de tout le peuple. Continuez votre discernement critique, soyez disponibles à l’action de l’Esprit Saint et laissez-vous inspirer par l’Évangile de notre Seigneur. Ainsi le Christ sera vraiment votre espérance et son Esprit vous renouvellera. Alors, solidaires, vous continuerez à témoigner de son amour.
CHAPITRE I
Situation actuelle de l’Église catholique au Liban
Unité et Diversité
8. L’une des caractéristiques les plus obvies de l’Église catholique au Liban est d’être à la fois une et multiple. Elle consiste moins en une juxtaposition territoriale de diocèses, qu’en une imbrication d’Églises patriarcales sui iuris et d’un vicariat apostolique latin, tous unis par la même foi, les mêmes sacrements et une totale communion de foi et de charité avec l’Évêque de Rome, Successeur de l’Apôtre Pierre.
Vous savez les liens d’affection qui m’unissent à cette « terre bien-aimée », comme j’ai eu l’occasion de le rappeler en plusieurs circonstances et en particulier dès le début de mon pontificat (3). Tous les fidèles catholiques éprouvent aussi un profond attachement envers leurs frères de ce pays cher à leur cœur de disciples du Seigneur et envers toute la terre que Notre Seigneur a foulée et a rendue sainte.
La diversité de l’Église catholique au Liban est loin d’être purement juridique. Elle est le résultat de la longue histoire propre à chacune de ses traditions spirituelles. Aussi, les Églises patriarcales, dont plusieurs se réclament de l’Église d’Antioche, conservent chacune un patrimoine culturel propre et des traditions ecclésiales, liturgiques, théologiques, spirituelles et disciplinaires spécifiques (4).
Il est vrai que les Églises orientales catholiques continuent à se développer selon des perspectives diverses, liées à la situation socio-politique actuelle des pays où elles sont présentes, ainsi qu’à l’importance numérique et à la vitalité des fidèles dans les pays d’émigration. Mais en même temps, au Liban, les différentes Églises sui iuris et le vicariat apostolique latin sont une seule Église et font partie de la seule et même Église catholique autour du Successeur de Pierre, dans une communauté de vie et de destin, partagée depuis très longtemps pour certaines d’entre elles, en cette région de l’Orient et dans ce pays, le Liban. Elles se trouvent face aux mêmes exigences nationales et aux mêmes dangers ; elles ont les mêmes espoirs et surtout la même mission confiée par le Christ.
9. La façon de vivre la diversité du patrimoine ecclésial n’est pas toujours perçue comme un élément positif. Cela a même pu susciter entre les Églises locales des sentiments de méfiance, jusqu’à devenir un véritable obstacle sur le chemin de l’entente et de la collaboration. Ainsi, l’interpénétration des juridictions a parfois provoqué de réels conflits de pouvoir (5) qui ont paralysé l’action pastorale commune et porté par là un contre-témoignage. De telles difficultés ne peuvent être surmontées que dans la foi et grâce à un respect mutuel sincère.
Aujourd’hui, les Églises patriarcales souhaitent dépasser toute étroitesse de vues et s’ouvrir à une collaboration de plus en plus intense entre elles, par fidélité à la parole du Seigneur : « À ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jn 13, 35).
Il n’est donc pas étonnant que l’Assemblée spéciale ait considéré comme prioritaire pour le renouveau de l’Église catholique au Liban cet appel : « Convertissons-nous et vivons l’unité de l’Église » (6). Le Message du Synode insistait en soulignant que plus qu’une nouvelle organisation, ce qu’il faut promouvoir c’est une nouvelle mentalité qui doit résolument marquer chaque Église patriarcale et « non plus le constant souci d’affirmer les différences, mais le constant souci de souligner l’unité tout en respectant la diversité » (7).
Un tel engagement implique à la fois un aveu, des sentiments de repentir et un cri d’espérance ; l’aveu d’avoir manqué d’esprit de communion dans l’Église ; le repentir sincère pour avoir contristé l’Esprit Saint (cf. Ep 4, 30), ferment divin d’unité ; un cri d’espérance dans le Christ mort et ressuscité, vivant avec nous, parmi nous et pour nous. C’est en s’engageant franchement dans ce sens que les membres des différentes Églises locales sont appelés à se renouveler intérieurement afin d’ouvrir leur âme aux dimensions de la charité du Christ, dans une sainte émulation avec leurs frères des autres traditions spirituelles.
L’Église catholique au Liban à la suite des événements récents
10. L’Église catholique au Liban a beaucoup pâti de la division de ses fils, particulièrement durant les récentes années de guerre. Elle en a été déchirée même de l’intérieur. En 1993, ceux qui ont préparé l’Assemblée spéciale écrivaient dans les Lineamenta : « L’Église au Liban [...] fut, comme les autres composantes du pays, blessée dans sa chair. Mais c’est surtout dans sa conscience qu’elle fut profondément éprouvée. Elle a vu ses fils tués, tuant et s’entretuant. Elle continue à souffrir de leurs querelles toujours vivaces ; la meurtrit vivement le fossé profond que ces années troublées ont creusé entre nombre de ses fidèles et entre ceux-ci et l’autorité ecclésiastique » (8).
Depuis, des signes de rapprochement entre les membres des Églises sui iuris se dessinent, aussi bien dans les esprits que dans les structures. De fait, le synode des évêques de chaque Église patriarcale (9) est appelé à traiter des problèmes de l’heure et à veiller à l’unité du patriarcat, avec le souci d’une union toujours plus forte avec les autres patriarcats (10).
Par ailleurs, les Églises orientales catholiques au Liban se sentent plus que jamais attachées à leur structure patriarcale, en vertu de laquelle le patriarche préside le synode des évêques de son patriarcat. Leurs concertations contribuent à rendre visible le mystère de l’Église communion (11), aussi bien à l’intérieur de chaque patriarcat que dans la relation de celui-ci avec les autres Églises patriarcales dans le pays et au sein de l’Église universelle.
La collaboration se fait plus intense entre les membres d’une même Église patriarcale, le patriarche, les évêques, les prêtres, les diacres, les religieux, les religieuses et les laïcs. Les fidèles laïcs en particulier font preuve d’une généreuse disponibilité et sont prêts à répondre aux appels de la hiérarchie, à ses demandes de coopération à l’intérieur des différents conseils diocésains ou paroissiaux, dans l’administration des waqfs ou en d’autres services de l’Église. En ce qui concerne le clergé, la volonté de coordination et de collaboration doit se manifester dans le cadre des nombreuses structures, telles que les réunions de prêtres, de prêtres avec des laïcs, par secteurs géographiques ou par centres d’intérêt, à des fins pastorales ou spirituelles. Une telle volonté est soutenue par la grâce de l’Esprit Saint qui assiste et soutient l’Église. Elle mérite d’être vivement encouragée ; elle est un appel au dialogue et à des modes sains et efficaces de travail commun; elle demande aussi que tous aient une bonne connaissance de la nature authentique de l’Église et du sens véritable du service chrétien. Ainsi que je l’écrivais dans l’exhortation sur la vie consacrée, la doctrine de l’Église comme communion permet « de mieux comprendre que ses diverses composantes peuvent et doivent unir leurs forces, dans un esprit de collaboration et d’échange des dons, pour participer à la mission ecclésiale. Cela contribue à donner une image plus juste et plus complète de l’Église » (12)
11. D’ailleurs, les Églises orientales catholiques du Liban ont déjà créé entre elles des structures de concertation, de coordination et de coopération. Le modèle en est l’« Assemblée des Patriarches et des Évêques catholiques au Liban » (APECL) (13). Cette Assemblée siège régulièrement pour animer la réflexion et guider l’action commune en fonction des nécessités pastorales. Selon les désirs de l’Assemblée synodale, elle s’est réorganisée, pour une plus grande efficacité pastorale, en prenant soin de faire participer de manière plus effective les prêtres et les laïcs au travail commun et aux décisions ecclésiales. L’expérience vécue par les participants à l’Assemblée spéciale pour le Liban a montré combien les pasteurs et les fidèles catholiques se savent et se veulent une Église, et à quel point ils s’admettent et s’estiment mutuellement dans leur diversité. Ce temps de grâce demeurera une source intarissable d’énergie, aussi bien pour l’élan vers le renforcement de leur unité que pour l’épanouissement toujours plus authentique de leurs spécificités.
Avec les autres Églises et Communautés chrétiennes au Liban
12. Au terme de l’Assemblée spéciale, après avoir déclaré que l’unité au sein de l’Église catholique ne suffisait pas, les Pères ont manifesté leur détermination en faveur du « dialogue avec les autres Églises chrétiennes, pour répondre à la volonté du Seigneur exprimée dans sa prière au Père : « Père Saint, garde en ton nom ceux que tu m’as donnés pour qu’ils soient un comme nous sommes un. [...] Qu’ils soient parfaitement un afin que le monde croie que tu m’as envoyé ! » (Jn 17, 11.21) (14).
Cet engagement des Pères du Synode reflète une prise de conscience de la gravité de la division des chrétiens. Il exprime aussi la douleur concrètement ressentie face à une telle infidélité à la volonté du Seigneur. En effet, la division des chrétiens sépare souvent des personnes qui se côtoient tous les jours et qui s’aiment, qui partagent la même foi au Christ et au Baptême. Pour ce qui est des orthodoxes et des catholiques, ils ont des conceptions convergentes sur des points essentiels concernant l’Église et les sacrements. Bien des chrétiens unis par les liens du mariage souffrent cependant, eux-mêmes et leurs enfants, d’être tiraillés entre des doctrines différentes sur l’Église et sur leurs devoirs à son égard. La division entre les chrétiens n’est pas sans conséquences parfois pénibles dans la vie sociale et elle constitue un contre-témoignage aux yeux de beaucoup de compatriotes.
Mais, si elle est en elle-même un scandale du point de vue de la nature même de l’Église indivise et du point de vue de sa mission à l’égard du monde, cette situation semble pouvoir, en nos temps, devenir une occasion de grâce : elle fait office de stimulant et elle incite les chrétiens à mettre toute leur conviction et toute leur énergie pour oeuvrer en faveur de la communion de l’Église et pour accomplir des gestes de pardon mutuel. De fait, les orthodoxes et les catholiques reprennent conscience des antiques traditions ecclésiales et sociales qui les rassemblent et de leur fraternité dans le Christ, même si parfois, dans les temps passés, leur cohabitation a revêtu un caractère orageux. Il est cependant « clairement apparu que la méthode à suivre vers la pleine communion est le dialogue de la vérité, nourri et soutenu par le dialogue de la charité » (15). Ce processus devra être mené avec une grande prudence et une attitude de foi, sous la conduite de l’Esprit Saint (16). Les Communautés ecclésiales issues de la Réforme, bien que beaucoup plus récentes au Liban, se retrouvent, elles aussi, incluses de leur plein gré dans ce mouvement de rapprochement. Tous les chrétiens du pays souhaitent ardemment que se réalise leur pleine unité. Avec eux et en communion avec tous nos frères dans la foi, partout dans le monde, nous nous sentons conviés à redoubler de ferveur dans la prière, afin que s’accomplisse ce voeu, si cher au coeur de notre Seigneur. D’ailleurs, dès le premier instant de la démarche synodale, les Pères ont déployé leurs efforts pour que, dans leur pays, tous les croyants au Christ, Verbe de Dieu incarné, participent, au moins par la prière, au renouveau dans l’Église (17).
Relations avec les fidèles des religions monothéistes, et en particulier avec les musulmans
13. L’Église a le souci de promouvoir l’unité et la charité entre les hommes et entre les peuples. En effet, « nous ne pouvons invoquer Dieu, Père de tous les hommes, si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains des hommes créés à l’image de Dieu » (18). Nous formons une seule et même communauté humaine, que Dieu a fait habiter « sur toute la surface de la terre » (Ac 17, 26 ; cf. Gn 1, 26-30) ; le Seigneur veut conduire les hommes « à la connaissance de la vérité » (1 Tm 2, 4) et réaliser leur soif de bonheur éternel (cf. Ps 63[62], 2).
L’Église catholique considère avec attention la quête spirituelle des hommes et reconnaît volontiers la part de vérité qui entre dans la démarche religieuse des personnes et des peuples, tout en affirmant que la vérité parfaite se trouve dans le Christ, qu’il est le commencement et le terme de l’histoire qui, par Lui, parvient à sa plénitude. D’autre part, par sa raison, l’homme connaît ce qui est bien et, poussé par la voix de sa conscience, il est tenu de l’accomplir et d’éviter le mal. « L’exercice de la vie morale atteste la dignité de la personne » (19). L’Église manifeste un grand respect à l’égard de ceux qui, chaque jour, s’efforcent de vivre dans la rectitude, selon les valeurs spirituelles, morales et socio-culturelles fondamentales, en accordant du prix à leur propre vie morale. L’Islam et le Christianisme ont en commun un certain nombre de valeurs humaines et spirituelles incontestables. Le Concile Vatican II en a résumé l’essentiel : « L’Église regarde avec estime les musulmans qui adorent le Dieu unique, Vivant et Subsistant, Miséricordieux et Tout-Puissant, Créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes, et aux décrets duquel, même s’ils sont cachés, ils s’efforcent de se soumettre de toute leur âme, comme s’est soumis à Dieu Abraham, à qui la foi islamique se réfère volontiers. Bien qu’ils ne reconnaissent pas Jésus comme Dieu, ils le vénèrent cependant comme prophète, et ils honorent sa mère virginale, Marie, et parfois même l’invoquent avec piété. En outre, ils attendent le jour du jugement, lors duquel Dieu rétribuera tous les hommes après les avoir ressuscités. C’est pourquoi ils accordent du prix à la vie morale et ils rendent un culte à Dieu, surtout par la prière, l’aumône et le jeûne » (20).
14. Au Liban, les relations entre catholiques et avec les musulmans ont été difficiles en différentes occasions ; et, pour certains citoyens libanais, elles pourraient être encore aujourd’hui teintées de méfiance à cause de diverses incompréhensions alimentées par de douloureux souvenirs. Des préjugés fortement ancrés dans les mentalités contribuent à entretenir un manque de confiance réciproque. Le réveil de formes variées d’extrémisme est aussi profondément inquiétant et ne pourrait que desservir l’unité du pays, freiner le nouvel élan qu’il convient de lui donner et gêner la convivialité entre toutes les composantes de sa société.
Pour le dialogue constructif et pour la reconnaissance réciproque, au-delà des divergences importantes entre les religions, il importe de s’attacher à discerner d’abord et avant tout ce qui unit les Libanais en un seul peuple, dans une même fraternité qui, au Liban, se manifeste chaque jour, spécialement dans la convivialité. En outre, chrétiens et musulmans du Liban se considèrent les uns et les autres comme les partenaires de la construction du pays; et le désir de renforcer l’entente et la collaboration entre eux est de plus en plus vif dans les esprits. Effectivement, des instances de rencontre se mettent en place pour se connaître réciproquement de manière toujours plus approfondie et pour servir ensemble le pays.
Sécularisation et monde moderne
15. Le Liban, traditionnellement ouvert à toutes les cultures qui le traversent, est, par le fait même, ouvert aux idées qui se développent dans le monde moderne. L’Église est naturellement appelée à être attentive aux cultures d’aujourd’hui afin de distinguer le bon grain de l’ivraie. Cependant, il est important que le pays et la région ne se laissent pas gagner par le phénomène de la sécularisation. Certains pensent cependant que pour l’instant il y a même plutôt un « retour du religieux », face auquel il reste à être vigilant et à exercer un discernement attentif des attitudes religieuses. S’il s’agit de puiser aux sources premières de la foi et de l’espérance, cela peut être l’occasion d’une « nouvelle évangélisation » auprès du peuple et à travers lui (21), sinon, le mouvement risque de demeurer superficiel et ambigu. Il demeure pourtant qu’un style de vie permissif semble progressivement contaminer les moeurs, en particulier par le biais des moyens de communication sociale et par l’intermédiaire de personnes qui, longtemps éloignées de leurs références culturelles, ont pu altérer leur sens moral et spirituel. Beaucoup de personnalités, tant chrétiennes que musulmanes, s’inquiètent d’une telle évolution.
16. Ces aspects de la situation où se trouve actuellement l’Église au Liban n’ont été rappelés ici que pour inviter les fidèles à reprendre une conscience plus claire des fondements de leur foi et à comprendre devant Dieu la mission qu’ils ont reçue du Seigneur. En fonction des conditions concrètes qu’ils connaissent actuellement, les catholiques libanais ont à distinguer en eux-mêmes et dans leurs Églises locales ce qui devrait être gardé et ce qui devrait être émondé (cf. Jn 15, 2). Tel est le sens de l’appel que j’ai lancé dès la convocation de l’Assemblée spéciale : « L’Église au Liban écoutera attentivement « ce que l’Esprit dit aux Églises » (Ap 3, 22) et scrutera soigneusement les signes des temps pour y discerner les desseins actuels de Dieu sur le monde » (22) et sur elle-même.
Les chrétiens dans la société civile
17. Il est évident que les chrétiens du Liban, comme tous leurs concitoyens, espèrent jouir des conditions nécessaires à l’épanouissement de leur personne, de leur famille, dans le respect de leurs traditions culturelles et spirituelles. En particulier, ils aspirent à la tranquillité, à la prospérité, à une réelle reconnaissance des libertés essentielles, celles qui sauvegardent toute dignité humaine et qui permettent la pratique de la foi ; ils aspirent à un respect sincère de leurs droits et de ceux des autres ; enfin à une justice qui consacre l’égalité de tous devant la loi et qui permet à chacun de prendre sa part de responsabilité dans la vie sociale. Ils savent bien qu’un tel projet est pour une bonne part conditionné par les années de guerre passées et par la situation grave qui prévaut dans cette région du Moyen-Orient. Je suis conscient des difficultés actuelles les plus importantes : l’occupation menaçante au Sud Liban, la conjoncture économique du pays, la présence de forces armées non libanaises sur le territoire, le fait que demeurent encore non totalement résolus le problème des déplacés, ainsi que le danger de l’extrémisme et l’impression pour certains d’être frustrés dans leurs droits. Tout cela alimente les passions, ainsi que la crainte que les valeurs de démocratie et de civilisation que représente ce pays puissent être compromises. Et de ce fait, la tentation de le quitter guette toujours les Libanais, en particulier les jeunes (23). Pour qu’un avenir plus serein se concrétise, je sais que cela suppose beaucoup de sacrifices, une ascèse personnelle constante qui fait qu’on exige de soi, avant de l’exiger des autres, une présence active, courageuse et persévérante aux affaires de la société ; mais il faut aussi compter avec la grâce du Très-Haut qui transforme les coeurs et les volontés, et les oriente vers le bien. L’expérience passée et présente que les fidèles du Christ ont d’eux-mêmes et des autres, autour d’eux et partout ailleurs, est suffisante pour les convaincre de la puissance des forces du mal, toujours actuelle et toujours capable d’obscurcir les intelligences, de durcir les sentiments et de constituer une menace pour l’avenir. Mais l’espérance demeure, malgré tout, vivante en eux. Ils n’ont pas perdu la confiance en eux-mêmes ni l’attachement au pays et à sa tradition démocratique. Le goût de vivre qui les caractérise, et cette fraternité entre tous qui se manifeste surtout dans les moments difficiles qu’ils doivent si souvent traverser, ravivent sans cesse leur volonté de collaborer activement à l’édification de leur pays sur la base des valeurs humaines qui font la richesse de leur patrimoine national.
CHAPITRE II
Dans l’Église, fonder son espérance sur le Christ
Appel à l’espérance
18. Les Pères du Synode, partant d’un examen attentif de la situation actuelle de l’Église dans leur pays, sont sans cesse revenus à deux aspects principaux du Mystère chrétien qu’il leur paraissait nécessaire d’approfondir. Il s’agit pour tous les fidèles de vivre intensément le Mystère de l’Église, communion des hommes avec Dieu et entre eux, et de fonder leur espérance sur le Christ. A la suite des réflexions de l’Assemblée spéciale, j’appelle les membres de l’Église à méditer sur ces sujets afin de répondre toujours mieux dans leur vie ecclésiale à la volonté du Seigneur. Ils saisiront plus complètement ainsi la portée du thème qui a guidé toute la démarche synodale : « Le Christ est notre espérance: renouvelés par son Esprit, solidaires, nous témoignons de son Amour ».
I. L’Église, mystère de communion
Dimensions de ce mystère
19. L’Église ne se réduit pas à sa dimension visible, qui peut la faire apparaître uniquement comme une communauté confessionnelle organisée ; car, dans son mystère, elle est en communion avec la communauté céleste invisible : « L’Église de la terre et l’Église si richement pourvue de biens célestes ne doivent pas être considérées comme deux entités, mais elles forment une seule réalité complexe, constituée d’un élément humain et d’un élément divin étroitement liés » (24). Le Concile Vatican II déclare encore que l’Église est une institution « dotée des moyens appropriés pour son union visible et sociale » (25), une expression de la communion des hommes avec Dieu et entre eux. Elle « est dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c’est-à-dire le signe et l’instrument de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (26). Le destin de tous se joue dans l’Église, car elle est « le mystère de l’union personnelle de chaque homme avec la Trinité divine et avec les autres hommes, commencée par la foi, et orientée vers la plénitude eschatologique dans l’Église céleste, tout en étant déjà une réalité en germe dans l’Église sur terre » (27).
Le concept de communion est important pour prendre une juste conscience de la nature de l’Église. Il implique toujours une double dimension : verticale (communion avec Dieu) et horizontale (communion entre les hommes), et un double aspect : visible (condition corporelle et sociale de l’homme) et invisible (union de grâce avec Dieu et, en Lui, avec tous les hommes) (28).
20. L’Église, à l’image de son Seigneur, est une réalité « divine et humaine qui se vit dans le temps et le lieu avec tout ce que cela entraîne comme conditionnement historique, géographique, social et culturel. Elle s’enracine dans cette réalité tangible à laquelle elle doit les traits de son visage propre et de son caractère particulier » (29). La figure du « corps » signifie à la fois que l’Église est « rassemblée autour [du Christ], unifiée en Lui, dans son Corps » (30), et que cette « unité du corps n’abolit pas la diversité des membres : “dans l’édification du Corps du Christ règne une diversité de membres et de fonctions. Unique est l’Esprit qui distribue des dons variés pour le bien de l’Église à la mesure de ses richesses et des exigences des services” » (cf. 1 Co 12, 1- 11) (31). L’Église se présente tout entière, comme à l’échelle de chaque communauté paroissiale, « avec une grande diversité qui provient, à la fois, de la grande variété des dons de Dieu et de la multiplicité des personnes qui les reçoivent. Dans l’unité du peuple de Dieu, se rassemblent les diversités des peuples et des cultures. Entre les membres de l’Église existe une diversité de dons, de charges, de conditions et de modes de vie » (32).
Le mystère de l’Église se manifeste dans les Églises particulières car, « au sein de la communion ecclésiale, il existe légitimement des Églises particulières, jouissant de traditions propres » (33). L’« Église particulière », appelée aussi « diocèse » ou « éparchie », désigne de façon précise la « portion du peuple de Dieu confiée à un évêque pour qu’avec l’aide de son presbytérium il en soit le pasteur » (34). Et l’évêque, parce que successeur des Apôtres, est principe et fondement visible de l’unité de son Église (35) dont il assure la solidité et la croissance en enseignant fidèlement la parole de Dieu, en présidant, personnellement ou par une personne déléguée, le culte sacré, en particulier l’Eucharistie, et en gouvernant sagement et en toute charité les fidèles du troupeau qui lui est confié (36).
21. Au Liban comme dans tout l’Orient, à l’exception du vicariat apostolique latin, les Églises particulières sont traditionnellement regroupées en patriarcats. « L’institution patriarcale est en vigueur dans l’Église depuis les temps les plus anciens et elle était déjà reconnue par les premiers conciles œcuméniques » (37). « Comme père et chef » (38), c’est au patriarche, que « revient la juridiction sur tous les évêques, y compris les métropolites, sur le clergé et le peuple de son propre territoire ou rite, selon les normes du droit et restant sauve la primauté du Pontife romain » (39). Il est donc le symbole de l’unité de son Église patriarcale ; il garantit la fidélité à la tradition liturgique, théologique, spirituelle et disciplinaire de l’ensemble de son patriarcat, ainsi que la communion avec le Successeur de Pierre. « Les patriarches avec leurs synodes constituent l’instance supérieure pour toutes les affaires du patriarcat » (40).
Ces antiques Églises patriarcales ont un patrimoine vénérable, dont il convient non seulement de respecter et de sauvegarder, mais encore d’affermir et d’encourager « la vitalité, la croissance et la vigueur [...] dans l’accomplissement de la mission qui leur est confiée (cf. Orientalium Ecclesiarum, n. 1) » (41). Le Concile Vatican II a clairement reconnu leur légitimité : « La divine Providence a fait que les diverses Églises, établies en divers endroits par les Apôtres et leurs successeurs, se sont unies, au cours des temps, en plusieurs groupes liés organiquement qui, étant sauve l’unité de la foi et l’unique constitution divine de l’Église universelle, jouissent d’une discipline propre, d’un usage liturgique propre, d’un patrimoine théologique et spirituel. Certaines d’entre elles, notamment les antiques Églises patriarcales, telles des matrices de la foi, en ont engendré d’autres en quelque sorte comme leurs filles, avec lesquelles elles sont jusqu’à nos jours liées d’un lien plus étroit de charité dans la vie sacramentelle et dans le respect mutuel des droits et des devoirs. Cette variété des Églises locales montre avec plus d’éclat, par leur convergence dans l’unité, la catholicité de l’Église indivise » (42).
Dans ce cadre, les Églises patriarcales catholiques au Liban peuvent revêtir un caractère prophétique (43) si chacune d’elles réussit à développer, en harmonie avec les autres et dans une fidélité absolue à l’unité de l’Église universelle — et même grâce à cette unité —, sa propre identité et les richesses qui la distinguent. L’unité n’est pas à chercher dans l’uniformité mais dans l’amour mutuel, dans le don de soi et de ses richesses, dans la charité qui unit toutes les Églises. C’est ce que les Églises sui iuris et le vicariat apostolique latin s’efforcent de vivre au Liban, notamment grâce à l’activité de l’Assemblée des Patriarches et des Évêques catholiques au Liban (APECL), créée « pour que la vie de l’Église au Liban devienne source d’harmonie et de richesse pour ses fils, mais aussi témoignage permanent d’entente et de coopération fructueuse entre tous les Libanais » (44).
Communion dans l’Esprit Saint, souffle divin d’unité dans la diversité
22. Pour saisir la réalité profonde de la vie dans l’Église, il convient de méditer sur la présence en elle de l’Esprit Saint qui la vivifie : « Les saints Pères ont pu comparer son rôle à la fonction que remplit dans le corps humain le principe de la vie, c’est-à-dire l’âme » (45).
L’Esprit est le grand don du Père (cf. Ac 2, 1-4) et de son Fils, Jésus Christ (cf. Jn 20, 22) à l’Église. Ce don gratuit est le fruit de la glorification du Seigneur, dans sa mort sur la Croix et dans sa Résurrection (cf. Jn 12, 16; 13, 31-32). Le Christ l’avait promis la veille de sa mort à ses disciples : « C’est votre intérêt que je parte ; en effet, si je ne pars pas, le Paraclet ne viendra pas vers vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai » (Jn 16, 7).
L’effusion de l’Esprit à la Pentecôte suggère une re-création. Au soir de la Résurrection, Jésus souffla sur les disciples et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint » (Jn 20, 22). Il leur donne un seul cœur et met en eux un esprit nouveau (cf. Ez 11, 19). Ce geste rappelait la première création de l’homme : « Dieu modela l’homme avec la glaise du sol, il “insuffla” dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint être vivant » (Gn 2, 7) ; à la Pentecôte, ce geste manifeste la création nouvelle.
Le don de l’Esprit transforma les disciples en envoyés, à l’image de leur Maître : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jn 20, 21). Ils se voient confier une mission de pardon et de réconciliation (cf. Jn 20, 23), mission restauratrice de l’unité perdue depuis les temps anciens. À la Pentecôte, le Seigneur rassembla les hommes autour des Apôtres qui publiaient ses louanges, et « chacun les entendait parler en son propre idiome, [...] Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, [...] Crétois et Arabes » (Ac 2, 6.9.11).
23. La communion des hommes entre eux et avec Dieu est essentiellement l’œuvre de l’Esprit Saint, qui nous donne d’être l’image de Dieu. C’est Lui qui donne de croire au Christ Seigneur (cf. 1 Co 12, 3). Par le baptême, l’Esprit est conféré aux croyants, en qui il habite comme dans un temple (cf. Ac 2, 38 ; Rm 8, 9 ; 1 Co 3, 16 ; 6, 19) et leur donne de devenir « fils adoptifs » de Dieu « et donc héritiers ; héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ » (Rm 8, 17; cf. Ga 4, 1-7). Cette adoption n’est pas simple accession légale à l’héritage, mais don de la vie divine dans lequel les Trois Personnes sont associées : « La preuve que vous êtes des fils, c’est que Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie : “Abba, Père” » (Ga 4, 6) et nous configure au Christ. « Nous pouvons adorer le Père parce qu’il nous a fait renaître à sa Vie en nous adoptant comme ses enfants dans son Fils unique : par le Baptême, il nous incorpore au Christ et à son Corps, et, par l’Onction de son Esprit qui s’épanche de la Tête dans les membres, il fait de nous des “christs” » (46).
24. Le jour de son Ascension, le Christ donna à ses disciples leur mission : « Allez : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28, 19-20). En d’autres termes, l’Église est envoyée sur les routes du monde, afin d’« annoncer le Royaume du Christ et de Dieu et de l’instaurer parmi toutes les nations, et elle constitue sur terre le germe et le commencement de ce Royaume » (47). « L’Église, dans son ensemble apparaît comme “le peuple uni de l’unité du Père, du Fils et de l’Esprit Saint” » (48) sous un seul chef, le Christ, par qui et pour qui Dieu s’est tout réconcilié, « [ayant établi] la paix par le sang de sa croix » (Col 1, 20 ; cf. Ep 1, 10). En relation avec le don de l’Esprit Saint, l’Église ne cesse de proclamer dans le Credo sa foi en la rémission des péchés, pouvoir que le Seigneur a confié à ses ministres (49). Par « la communion avec Lui, l’Esprit Saint rend spirituel, [...] ramène au Royaume des Cieux et à l’adoption filiale, donne confiance pour appeler Dieu Père et pour participer à la grâce du Christ, être appelé enfant de lumière et avoir part à la gloire éternelle » (50).
L’Assemblée spéciale du Synode des Évêques a été l’occasion d’un examen de conscience d’abord destiné à préparer l’Église au Liban à recevoir une plus grande effusion de l’Esprit. Car seul l’Esprit peut conduire à la métanoia, à la conversion qui amènera cette Église à mieux percevoir sa vocation et à reprendre sa route avec une vitalité nouvelle, dans un esprit de réconciliation entre les chrétiens eux-mêmes et entre les chrétiens et leurs compatriotes (51).
25. Sur des points importants, touchant la foi dans le mystère de l’Église, nous tenons avec les Églises orthodoxes des positions communes. Les théologies et les spiritualités des Églises d’Orient se sont développées au cours des siècles, essentiellement autour du thème de la divinisation de l’homme, divinisation déjà commencée ici-bas. Ce souffle est celui-là même qui anima l’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques : « Nous nous engageons à répondre fidèlement à l’œuvre de déification que Dieu opère en nous, et à l’expansion du règne de Dieu sur la terre » (52). Les Églises patriarcales catholiques au Liban sont donc bien enracinées dans la Tradition (53).
26. La méditation sur l’Église, mystère de communion, est inséparable de celle du mystère de la Trinité qui est son origine et vers laquelle elle s’achemine. Par la communion de l’Esprit Saint (cf. 2 Co 13, 13), l’Église participe à la vie intime de Dieu dont l’essence est communication ineffable d’amour entre les Trois Personnes. Elle est aussi appelée à communiquer cette vie divine au monde et à y prolonger la mission du Fils et de l’Esprit. En elle s’accomplit l’œuvre de la Trinité. Aussi est-elle, dans l’Esprit Saint, inséparablement communion, communication et mission : ce sont des caractères qui se développent en une chaîne continue. C’est cela qui fonde les aspects pastoraux de la mission de l’Église, et plus précisément de la présente Exhortation post-synodale, car c’est l’unité trinitaire qui ouvre à l’action ecclésiale dans le monde.
Le Dieu de Jésus Christ n’est pas enfermé dans une solitude éternelle mais il est relation dans l’unité de l’essence entre les Trois Personnes divines et, par grâce, don de soi au monde. Notre connaissance du mystère de Jésus Christ nous apprend que la vie interne de Dieu est don total de la nature divine entre le Père, le Fils et l’Esprit, le Père comme source éternelle de la divinité s’épanchant sans réserve dans le Fils qu’il engendre, le Fils s’offrant éternellement au Père en hymne d’action de grâce, dans l’Esprit Saint, forme subsistante de cet échange d’amour, parfait et éternel.
À la lumière du mystère de la vie intime de Dieu Trinité, nous comprenons mieux le mystère de l’Église, mystère accompli par l’envoi du Fils aux hommes, et parfait par le don de l’Esprit à l’Église cheminant sur cette terre en vue de la glorification du Père dans l’achèvement du Règne dans les cieux.
II. Le Christ est l’espérance des chrétiens
Le Christ, Bon Pasteur de son Peuple
27. C’est primordialement dans le Christ, Verbe de Dieu incarné, mort et ressuscité, mystérieusement présent parmi eux et avec eux sur les chemins du monde, que se fonde l’espérance des fidèles de toute l’Église. Sur ces chemins, il est leur Bon Pasteur, leur vraie Lumière et la puissance de Dieu parmi eux. Cette figure du Bon Pasteur, qui se retrouve dans les plus anciennes traditions, a été aussi l’un des thèmes les plus constants du christianisme. Le Seigneur lui-même s’est ainsi désigné (cf. Jn 10, 11). Les chrétiens reconnaissent là une image remarquablement expressive de la personne de Jésus Christ. Il est Celui qui les a aimés jusqu’à l’extrême de l’amour (cf. Jn 13, 1). « Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13). Sa vie, il l’a livrée par amour, librement et volontairement (cf. Jn 10, 18). Jésus était tout entier pénétré de son amour infini de Fils envers son Père. Ce n’est pas pour faire sa propre volonté qu’il est descendu du ciel mais pour faire la volonté de Celui qui l’a envoyé (cf. Jn 6, 38). Jésus a dit lui-même : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas mais ait la vie éternelle » (Jn 3, 16) et « telle est la volonté de mon Père, que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour » (Jn 6, 40). Méditons sans cesse l’hymne antique que nous rapporte saint Paul : « Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’anéantit lui-même, prenant condition d’esclave, et devenant semblable aux hommes. S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une croix » (Ph 2, 6-8). La Lettre aux Hébreux montre en termes vigoureux le sens du Sacrifice du Seigneur : « C’est en vertu de cette volonté [celle du Père] que nous sommes sanctifiés par l’oblation du Corps de Jésus Christ, une fois pour toutes » (10, 10).
28. L’espérance chrétienne se fonde sur la foi en Jésus Christ et sur le don de son amour. Par « la foi [qui] est la garantie des biens que l’on espère [et] la preuve des réalités qu’on ne voit pas » (He 11, 1), nous tendons vers l’accomplissement des promesses du Seigneur. Cette espérance « répond à l’aspiration au bonheur placée par Dieu dans le cœur de tout homme ; elle assume les espoirs qui inspirent les activités des hommes ; elle les purifie pour les ordonner au Royaume des cieux ; elle protège du découragement ; elle soutient en tout délaissement ; elle dilate le cœur dans l’attente de la béatitude éternelle. L’élan de l’espérance préserve de l’égoïsme et conduit au bonheur de la charité » (54). Et c’est l’amour qui donne tout son dynamisme à l’espérance. Il ne s’agit pas tant de rechercher une félicité individuelle que de rechercher le bonheur de ceux que l’on aime, de toute la communauté humaine dans laquelle on vit. L’amour, en effet, est à l’origine de l’Incarnation du Verbe de Dieu, de la venue de l’Esprit Saint et de la fondation de l’Église, communion des hommes avec Dieu et entre eux. Nous mettons notre espérance dans la personne même de Jésus, Emmanuel, Dieu-avec-nous. Le désir d’être uni au Seigneur et d’être en communion avec ses frères est l’expression la plus haute de l’espérance et de l’amour chrétiens. Nous sommes en général loin de vivre pleinement ce désir dont la source est en Celui qui nous a sauvés par son sang et revivifiés par sa Résurrection. Il est, en effet, la tête du Corps dont nous devenons les membres par le baptême et auquel nous nous conformons de plus en plus par l’Eucharistie ; il est la vigne dont nous sommes les sarments et sa vie divine coule en nous. C’est l’Esprit qui a inspiré à son Église de se laisser gagner par cette « espérance qui nous pousse constamment au renouveau, [...] afin de nous configurer au Christ » (55). Dans l’espérance de l’accomplissement final du dessein de Dieu, l’Esprit et l’Église disent : « “Viens !” Et que l’homme assoiffé s’approche, que l’homme de désir reçoive l’eau de la vie, gratuitement. [...] Amen, viens, Seigneur Jésus » (Ap 22, 17.20). Bon Pasteur de son peuple, le Verbe Incarné l’est à jamais. Il est venu retrouver la brebis perdue et la ramener auprès du Père (cf. Lc 15, 4-7). Du haut du ciel où il est allé nous préparer une place (cf. Jn 14, 2), Il intercède pour nous auprès du Père (cf. Rm 8, 34; 1 Jn 2, 1; He 2, 17). Il a confié à Pierre (cf. Jn 21, 15-17), aux autres Apôtres et après eux à leurs successeurs, de veiller fidèlement sur son troupeau en attendant son retour à la fin des temps. À son Église, il a envoyé l’Esprit Saint et, en se dérobant à ses yeux (cf. Ac 1, 9) le jour de l’Ascension, il l’a assurée de sa présence : « Voici que je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20).
Le Christ, lumière véritable du monde
29. Les multiples difficultés que les fidèles du Liban ont dû affronter au long des siècles et qu’ils continuent de connaître sous diverses formes — qu’elles soient dues à leur propre faiblesse ou aux circonstances extérieures — constituent souvent une entrave sérieuse à leur espérance (56). Je souhaite que tous puissent entendre l’appel des Pères synodaux, en conclusion de leur Message. Leur point de départ était la méditation d’une page majeure des Évangiles du Seigneur ressuscité (cf. Lc 24, 13-35) : « Nous sommes ces disciples d’Emmaüs. [...] Nous aussi, nous avions douté de la présence du Christ ressuscité parmi nous. Mais il nous a rejoints sur notre route [...]. Nous aussi, nous l’avons prié : “Reste avec nous car la nuit vient”. Et puis nous l’avons reconnu au partage du pain, car il est celui qui partage et fait partager. Alors nous retournons vers vous pour vous dire : “Frères et sœurs n’ayez pas peur, le Christ est ressuscité ; nous l’avons retrouvé ; nous ne le quitterons plus” » (57). Oui, c’est Jésus qui ouvre les yeux des hommes pour qu’ils reconnaissent sa présence. Dans sa lumière, les disciples comprennent qu’il leur demande de vivre une espérance exigeante : « Espérer, c’est s’engager » au partage et à la communion, ainsi que le demande l’Assemblée spéciale (58).
30. Lumière véritable qui ravive en nous l’espérance selon toutes ses dimensions, le Christ l’est par sa Personne, par son œuvre et par son enseignement. En sa Personne, nous découvrons le sens de notre être et de notre mission. Parce qu’il est « le même, vraiment Dieu et vraiment homme [...], consubstantiel au Père selon la divinité et consubstantiel à nous selon l’humanité » (59), nous apprenons que la soif d’absolu, qui caractérise notre nature humaine, n’est pas vaine. Avec Lui et en Lui, le Royaume des cieux, nom biblique de la rencontre intime de l’humanité avec son Seigneur et de son union à Lui, est déjà parmi nous (cf. Mt 12, 28). Dans notre histoire, à travers ses petits et grands événements, commence déjà notre rencontre de Dieu et sont vécus des engagements constructifs qui ont une vraie valeur d’éternité. Le Concile Vatican II a enseigné que « l’importance des tâches terrestres n’est pas dépréciée par l’espérance eschatologique, mais que, bien plutôt, grâce à cette espérance, l’accomplissement de celles-ci peut s’appuyer sur de nouveaux motifs » (60).
31. Le Royaume de Dieu, préparé dans l’Ancien Testament, inauguré dans le Nouveau, atteindra sa plénitude à la fin des siècles. Dès à présent, « constitué Seigneur par sa résurrection, le Christ, à qui tout pouvoir a été donné, au ciel et sur la terre, agit désormais dans le coeur des hommes par la puissance de son Esprit » (61). À la fin des temps, lorsque le Christ aura récapitulé toutes choses en Lui-même (cf. Ep 1, 10), afin qu’ainsi « Dieu soit tout en tous » (1 Co 15, 28), la réalisation définitive du dessein divin nous surprendra. Cependant, tout comme dans l’homme Jésus la divinité n’a pas dissout l’humanité mais l’a élevée à sa plus haute perfection, de même notre incorporation au Christ et la récapitulation du temps et de l’histoire en lui n’aboliront pas les valeurs de ce monde mais les parachèveront : « Ces biens de la dignité humaine, de la communion fraternelle et de la liberté, tous ces fruits excellents de notre nature et de notre activité, après que nous les aurons propagés sur terre, selon le commandement du Seigneur et dans l’Esprit du Seigneur, nous les retrouverons plus tard, mais purifiés de toute souillure, illuminés et transfigurés [...]. Ce Royaume est déjà présent sur terre dans le mystère ; il connaîtra son achèvement lors de l’avènement du Seigneur » (62). Dans le « nouveau ciel » et la « nouvelle terre » qui remplaceront alors les nôtres, nous reconnaîtrons, avec joie, les traces de ce qu’il y avait de plus beau en ce monde et de ce que nous y aurons accompli de meilleur.
32. L’appel du Synode, « Espérer c’est s’engager », signifie que les chrétiens ont une responsabilité effective pour hâter la réalisation des desseins de Dieu ; ils peuvent et ils doivent compter sur la présence actuelle du Ressuscité parmi eux et sur l’action silencieuse de l’Esprit dans le monde ; guidés et soutenus par la Parole de Dieu et par la grâce, ils doivent eux-mêmes agir. Dieu poursuit l’économie du salut avec le concours librement consenti des justes. C’est le « oui » de Marie qui nous a valu l’Incarnation du Fils et c’est grâce à la réponse volontaire des Apôtres à l’appel du Seigneur que sa Parole divine nous est parvenue. Celui qui annonce l’Évangile est « coopérateur de Dieu » (1 Co 3, 9). Par la médiation de l’Église et aidés par le témoignage de nos frères, nous continuons, selon la volonté expresse de Jésus (cf. Mt 28, 18-20; Jn 20, 21-23) à recevoir la vie divine, à être unis au Corps du Christ et à être réconciliés avec Dieu. Aujourd’hui encore, c’est la volonté du Christ que les chrétiens du Liban fassent connaître et aimer son Nom.
Dans cette perspective, les Pères du Synode n’ont négligé aucun aspect de la vie, personnelle et publique, religieuse et politique, de leurs fidèles : « Dans nos prières et nos réflexions, aucune question essentielle n’a été exclue, aucune catégorie de personnes n’a été négligée, aucune difficulté n’a été atténuée » (63). Ils synthétisaient ainsi les efforts qu’ils avaient déployés avec tous leurs fidèles, clergé et laïcs, tout au long de leur démarche synodale, pour discerner les « signes des temps » inscrits dans la vie des personnes et des Églises locales, à la lumière de la vie et de l’enseignement de leur Maître et Seigneur, notre ultime référence : « Seigneur à qui irons-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. Nous, nous croyons, et nous avons reconnu que tu es le Saint de Dieu » (Jn 6, 68-69). Dans la clarté de l’Évangile, ils proclamaient que l’espérance devait stimuler les fidèles dans leurs engagements, sans hésitation, en esprit et en vérité, en communion avec Dieu et avec les membres de l’Église, pour rendre quotidiennement la vie sociale et nationale plus fraternelle et plus juste.
33. L’espérance des chrétiens du Liban est donc essentiellement de répondre aux exigences du Christ, là où il les a placés, ainsi que le disait la Lettre à Diognète : « Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur la terre, mais sont citoyens du ciel » (64) et s’attachent à rendre perceptible l’amour du Seigneur. Je rappellerai ici de sages paroles du Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, à l’adresse des fidèles du Liban : « Les situations difficiles auxquelles nous sommes confrontés ne doivent pas nous porter à fuir, à nous mettre à l’écart de notre univers, ou à nous y dissoudre. Elles doivent nous ramener plutôt aux racines de notre foi pour y trouver la force, la constance, la confiance et l’espérance » (65). Dans cette région perturbée du monde, les chrétiens ont à prendre conscience de la gravité de leur mission : « Notre présence chrétienne — ont dit encore les patriarches — ne veut pas être une présence pour nous-mêmes. Car le Christ n’a pas fondé son Église pour qu’elle soit au service d’elle-même, mais pour qu’elle soit une Église confessante et porteuse d’une mission, la mission même de son Fondateur et Maître. La mise en échec du témoignage et de la mission dans notre vie chrétienne et dans notre cheminement ecclésial reviendrait à un renoncement à nous-mêmes et à la mission pour laquelle notre Sauveur nous a appelés » (66).
Les chrétiens sont sans cesse appelés à dépasser leurs inquiétudes pour leur propre sort, afin d’éprouver la véritable crainte des sages de Dieu (cf. Pr 1, 7 ; Ps 111/110, 10 ; Ac 10, 34-35), celle de lui être infidèle et de manquer à sa Justice : « Ne craignez rien de ceux qui tuent le corps, mais ne peuvent tuer l’âme » (Mt 10, 28). Avoir confiance en Dieu signifie essentiellement se consacrer sans retard au service du Royaume du Christ : « Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous le vêtirez. [...] Cherchez d’abord [le] Royaume [de Dieu] et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » (Mt 6, 25.33).
34. Au long de sa route, toute personne humaine rencontre la souffrance. Le disciple n’est pas plus grand que son Maître ; comme Lui, il doit accepter la Croix. Le chrétien ne recherche pas la souffrance, il doit lutter contre elle, pour lui-même et pour les autres (67), parce qu’il sait qu’elle est un mal, une conséquence du péché des hommes depuis les origines (cf. Gn 3, 16-19). Mais quand elle est inéluctable, il la porte dans la foi, en réponse à cet appel du Seigneur : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive » (Mt 16, 24).
Cette croix comprend d’inévitables douleurs dans la vie des hommes, mais elle comprend aussi pour le croyant la souffrance d’être soi-même un obstacle à l’amour du Christ, un reflet défiguré de son visage. Par la grâce de Celui qui a vaincu la mort et le péché, une autre logique doit désormais guider le chrétien : « Si donc quelqu’un est dans le Christ, c’est une création nouvelle » (2 Co 5, 17) qui obéit à la « Loi du Christ » (Ga 6, 2), celle des Béatitudes et de la Charité qui ne connaît pas de limites. Cette « Loi du Christ » est fruit de l’Esprit Saint, elle est « charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi » (Ga 5, 22-23). Elle est à l’opposé de la loi du monde soumis à la force du péché, qui produit «fornication, impureté, débauche, idolâtrie, magie, haines, discorde, jalousie, emportements, disputes, dissensions, scissions, sentiments d’envie, orgies, ripailles, et choses semblables » (Ga 5, 19-21). Comme le rappelle saint Paul, toute personne fait dans sa chair et dans son esprit l’expérience de cette tension caractéristique de la condition des créatures pécheresses : « Je me complais dans la loi de Dieu du point de vue de l’homme intérieur ; mais j’aperçois une autre loi dans mes membres qui lutte contre la loi de ma raison et m’enchaîne à la loi du péché qui est dans mes membres » (Rm 7, 22-23). Et les conséquences de l’emprise du péché peuvent compromettre gravement la paix sociale et entretenir des affrontements destructeurs. Dans toute croix qu’il accepte de porter par amour pour le Christ, le croyant sait qu’il participe avec lui au salut du monde : « Je trouve ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l’Église » (Col 1, 24). Il sait aussi que le dernier mot de cette confrontation avec le mal, lorsqu’elle est menée dans le Christ, est le triomphe de la résurrection : « Car si c’est un même être avec le Christ que nous sommes devenus par une mort semblable à la sienne, nous le serons aussi par une résurrection semblable » (Rm 6, 5; cf. Ph 3, 10-11). À la lumière de la Personne, de la vie et de l’enseignement du Sauveur, l’Église catholique au Liban est appelée à se renouveler, avec le dynamisme de l’espérance et la générosité de l’amour, au prix de réels sacrifices s’il le faut (68), dans une fidélité absolue au Seigneur, à la mission qu’il lui a confiée et à l’Esprit dans lequel il veut qu’elle l’accomplisse.
Le Christ, Puissance de Dieu
35. Le drame vécu durant ces dernières années par l’Église catholique au Liban fut une occasion cruelle pour elle d’éprouver la nécessité de la conversion, pour vivre l’Évangile, pour demeurer unie, pour dialoguer en vérité avec les autres Églises et Communautés chrétiennes en vue d’avancer vers la pleine unité, pour construire aussi, avec les autres citoyens, une société capable de dialogue ouvert, de convivialité et d’attention aux autres, surtout aux frères les plus démunis.
Il est évident qu’un tel renouveau dépasse absolument les forces humaines. Cela, les chrétiens le savent et ils tiennent à le proclamer pour que Dieu en soit glorifié. Mais ils mettent leur confiance en Dieu, « riche en grâce et en fidélité» (Ex 34, 6), et dont «les dons et l’appel [...] sont sans repentance » (Rm 11, 29), lui qui connaît la profondeur de notre faiblesse. Ils mettent leur confiance en Jésus Christ, car « toutes les promesses de Dieu ont leur oui en lui » (2 Co 1, 20), et « si nous sommes infidèles, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même » (2 Tm 2, 13). Ils mettent leur confiance dans l’Esprit Saint, qui leur rappelle tout ce que Jésus a enseigné (cf. Jn 14, 26), qui donne de se renouveler (cf. Rm 7, 6), de former un seul corps (cf. 1 Co 12, 13) et de grandir dans la communion et l’unique espérance (cf. Ep 4, 3-4).
Aussi l’Église au Liban doit-elle s’appuyer sur le Christ, au coeur de son espérance, Lui, le Verbe incarné qui a vaincu le péché et la mort. Il est vrai que le mal et la mort ne sont pas éliminés et que tous ressentent les conséquences du péché, que ce soit dans l’être individuel ou dans les relations interpersonnelles et intercommunautaires. Mais, par le Christ, les hommes peuvent être en communion de vie avec Dieu, et les uns avec les autres.
Pour vaincre la peur, pour se convertir à l’humilité, pour être capable de désintéressement, pour surmonter l’égoïsme, pour comprendre « [qu’]il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Ac 20, 35), et qu’il est plus heureux de s’occuper de l’autre que de se fermer sur soi-même, personne ne peut compter sur ses seules forces. Le Christ nous a d’ailleurs avertis : « Hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5) ; il a aussi réconforté saint Paul : « Ma grâce te suffit : car la puissance se déploie dans la faiblesse » (2 Co 12, 9) ; et il a déclaré à ses disciples : « Dans le monde vous aurez à souffrir. Mais gardez courage ! J’ai vaincu le monde » (Jn 16, 33).
36. C’est pourquoi, chers fils et filles de l’Église catholique au Liban, l’Assemblée spéciale du Synode des Évêques vous exhorte à vous laisser saisir par le Christ pour que vous progressiez dans la communion que Lui seul peut rendre parfaite. Alors vous pourrez poursuivre avec courage un dialogue sincère et constructif avec vos concitoyens. Ce dialogue suppose toute une ascèse de l’écoute et de la parole: vouloir et savoir comprendre le sens profond du discours et du comportement de l’interlocuteur, saisir la source de son expérience et les perspectives humaines dans lesquelles il se situe, s’exprimer de façon que la parole puisse être réellement comprise par l’autre et se conduire selon l’Évangile de manière que le témoignage de la vie rende la parole crédible. Ainsi vous serez fidèles à la mission d’évangélisation confiée par le Seigneur à son Église : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, [...] leur apprenant tout ce que je vous ai prescrit » (Mt 28, 19-20).
Du point de vue de la foi et de la charité, aller vers l’autre ne peut se limiter à lui communiquer ce que nous avons compris du Seigneur, mais cela consiste aussi à recevoir de lui le bien et le vrai qu’il lui aura été donné de découvrir. Nous progressons ainsi dans une connaissance toujours plus grande du seul vrai Dieu et de Celui qu’il a envoyé, son Fils Jésus Christ (cf. Jn 17, 3). Car si « la grâce et la vérité [nous] sont venues par Jésus Christ » (Jn 1, 17), l’Esprit de Dieu, qui souffle dans l’Église, souffle aussi dans la communauté humaine en sa totalité. Comme l’enseigne le Concile Vatican II, « nous devons tenir que l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon connue de Dieu, la possibilité d’être associés au mystère pascal » (69). «Dans le coeur de tous les hommes de bonne volonté, la grâce agit de façon invisible» (70).
Tout cela, l’Église l’a appris du Christ, Bon Pasteur, et elle reçoit de lui la force d’en vivre, afin que les hommes croient en lui et qu’ils entrent dans la vie nouvelle. Comme Jean le Baptiste, elle est là pour « rendre témoignage à la lumière » (Jn 1, 7), car l’Esprit lui a révélé que « le Verbe était la lumière véritable, qui éclaire tout homme » (Jn 1, 9), et qu’il est l’unique « Puissance de Dieu et Sagesse de Dieu » (1 Co 1, 24). En lui et par lui, l’homme se connaît, découvre le sens de la vie et acquiert la capacité de s’engager dans la vraie vie et d’y entraîner les autres.
CHAPITRE III
Synode pour le renouveau de l’Église
Convocation et travaux du Synode
37. L’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques a été convoquée d’abord pour que l’Église catholique au Liban soit renouvelée dans le Christ notre espérance, par l’Esprit Saint, c’est-à-dire qu’elle soit fidèle à sa vocation, à sa mission, et à sa raison d’être dans le dessein d’amour du Père pour le salut de tous les hommes. En réponse à l’invitation que j’avais faite dans ma Lettre aux patriarches, archevêques et évêques catholiques du Liban (71), les Lineamenta proposaient à tous les catholiques libanais une recherche sérieuse sur leur fidélité à la mission voulue par le Seigneur. « Dans la situation actuelle, [...] l’Église au Liban se demande si elle a été fidèle, si elle est encore fidèle à ce que le Christ lui a réservé, en elle-même et pour sa mission » (72).
Les réflexions à partir des Lineamenta ont été synthétisées dans l’Instrumentum laboris, et, sur cette base, les Pères du Synode ont indiqué, dans les grandes lignes, des domaines où le renouveau est nécessaire et où de profondes conversions sont indispensables; cela exige avant tout un cheminement continu de prière, de sacrifice et de réflexion, pour se mettre sous la mouvance de l’Esprit et pour faire la volonté de Dieu, car c’est Lui qui donne la croissance et nous sommes ses coopérateurs (cf. 1 Co 3, 5-9).
Dans un premier temps, les Pères ont déterminé ce que signifie « être renouvelés par l’Esprit du Christ ». Puis, sous le regard du Christ, ils se sont demandé en vérité à quel renouveau sont appelés tous les catholiques libanais, chacun selon son propre charisme au sein de son Église particulière comme dans l’ensemble de l’Église catholique. Ensuite, ils ont recherché les transformations à opérer dans les principales structures des institutions ecclésiales. Enfin, avec un grand souci pastoral, ils ont envisagé comment engager ce renouveau et comment y former les fidèles.
L’Esprit Saint, agent du renouveau
38. « L’espérance ne déçoit point, parce que l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous fut donné » (Rm 5, 5). Le Christ ne nous laisse pas orphelins dans nos tribulations ; il vient au secours de notre faiblesse, pour faire de nous des disciples selon son cœur. Il nous a donné son Esprit comme Consolateur et source de vérité : « Lorsque viendra le Paraclet, que je vous enverrai d’auprès du Père, l’Esprit de vérité qui provient du Père, il me rendra témoignage » (Jn 15, 26). « Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous introduira dans la vérité tout entière ; [...] il vous dévoilera les choses à venir » (Jn 16, 13). Pour affermir la foi, l’espérance et la charité des fidèles et pour raviver leur ardeur missionnaire, c’est vers ces « choses à venir » qu’il convient de porter son regard, car c’est en fonction du sens de l’histoire, dont le Christ est l’alpha et l’oméga, et en fonction du bonheur auquel il nous convie, que les catholiques libanais sont appelés à se convertir et à changer de vie sous la motion de l’Esprit ; ainsi, peu à peu, un monde nouveau apparaîtra sur cette terre, avec l’aide de l’Esprit Saint, qui nous communique la vie nouvelle qui vient de Dieu (73).
C’est pourquoi le renouveau que le Synode doit favoriser sera, en premier lieu, l’œuvre de l’Esprit Saint. Tous les membres de l’Église ont à se mettre à son écoute, en reconnaissant qu’ils ont péché lorsqu’ils ont fait leur volonté propre au lieu de faire la volonté divine (cf. 1 S 7, 1-17) et qu’ils ont voulu réaliser leurs projets personnels au lieu de construire le Corps du Christ en suivant humblement Celui qui en est la Tête et qui peut seul conduire l’Église à son achèvement (74). La coopération de tous à l’action de l’Esprit Saint est la réponse constante à son grand don du renouveau : « Laissez-vous mener par l’Esprit. [...] Puisque l’Esprit est notre vie, que l’Esprit nous fasse aussi agir ! » (Ga 5, 16.25). À cette fin, l’Assemblée synodale invite instamment tous ceux et celles qui ont été baptisés en un seul Esprit à venir s’abreuver à sa source (cf. 1 Co 12, 13), afin de porter des fruits dans leur vie personnelle comme pour le renouveau de toute l’Église (cf. Ga 5, 22-24) (75).
I. Les sources et les fruits du renouveau
La Parole de Dieu
39. Au cours de son pèlerinage vers le Royaume, dont elle constitue le germe et le commencement sur la terre (76), l’Église est nourrie de la Parole vivante de Dieu par l’Esprit, qui a aussi inspiré les Auteurs sacrés, donnant ainsi chaque jour au peuple de Dieu la possibilité d’accéder à la plénitude du sens de cette Parole et de contempler le Verbe de Dieu qui « s’est fait porteur de la chair pour que nous puissions devenir porteurs de l’Esprit » (77). « Dans les saints Livres, le Père qui est aux cieux vient avec grand amour au-devant de ses fils et entre en conversation avec eux ; or, la force et la puissance qui sont inhérentes à la Parole de Dieu sont si grandes que celle-ci constitue pour l’Église soutien et vigueur, et pour les fils de l’Église solidité de la foi, nourriture de l’âme, source pure et intarissable de vie spirituelle » (78). A la suite des Pères du Synode, j’invite donc tous les fidèles à une écoute renouvelée de Dieu qui, dans le Verbe fait chair, a tout donné au monde, et « dont l’Ecriture Sainte est le témoin privilégié, fidèle et véridique » (79). Reprenant la mise en garde de saint Jérôme, le deuxième Concile du Vatican n’a pas manqué d’attirer l’attention des chrétiens sur la place qu’il convient d’accorder à la Parole de Dieu, car « l’ignorance des Écritures, c’est l’ignorance du Christ » (80). Au cours de leur histoire, les Églises d’Orient ont développé la lecture de la Parole de Dieu, car « chacun, selon ses besoins, apprend de l’Écriture inspirée » (81), spécialement par la lectio divina qui permet de découvrir avec certitude « qu’il existe dans les Écritures saintes une sorte de force qui suffit, même sans explication, à celui qui les lit » (82). À l’exemple des Pères, l’Orient chrétien a fait une admirable lecture de l’Écriture, par une exégèse sapientiale qui lie étroitement la théologie et la vie spirituelle.
L’Assemblée synodale a souligné de manière particulière le lien vital qui unit la Parole de Dieu et l’Église dans le mystère du Christ, mort et ressuscité, Pain de Vie pour ceux qui croient en Lui (cf. Jn 6). C’est le Christ, Verbe de Dieu, qui est proclamé dans l’Église et c’est Lui qui la nourrit aux deux tables de la Parole et de son Corps, et qui, ainsi, la construit (83). « Nous avons la nourriture fournie par les Apôtres [la Parole de Dieu] ; mangez-la et vous ne défaillirez pas. Cette nourriture, mangez-la d’abord afin de pouvoir venir ensuite à la nourriture du Christ, à la nourriture du Corps du Seigneur » (84). C’est pourquoi l’Église au Liban est poussée aujourd’hui par l’Esprit Saint à accueillir la Parole de Dieu, à l’annoncer et à la mettre en pratique. Aussi, dans le ministère des prêtres, l’enseignement du mystère chrétien doit-il occuper une place prépondérante et faire l’objet d’une préparation minutieuse. En effet, affrontés à des cultures et à des sciences qui posent des questions importantes à la foi, nos contemporains ont besoin d’une formation structurée, d’une culture religieuse sérieuse et d’une vie spirituelle forte, s’ils veulent suivre le Christ. J’attire particulièrement l’attention des pasteurs sur les homélies dominicales, qui doivent donc être préparées avec beaucoup de soin, par la prière et par l’étude. À ce propos, j’encourage vivement l’initiative d’offrir aux prêtres des dossiers comportant des analyses exégétiques qui sont suggestives pour la méditation personnelle et qui permettent de préparer plus intensément les homélies. Ces dernières ont avant tout pour fonction d’aider les fidèles à vivre leur foi dans leur existence quotidienne et à entrer en dialogue avec leurs frères. De même, la diffusion de la Bible imprimée et la faculté pour les laïcs de participer à des sessions de formation exégétique permettent à « un plus grand nombre de lire la Parole de Dieu, de la méditer, de la prier et de la vivre » (85).
La Tradition apostolique
40. C’est par l’assistance indéfectible de l’Esprit Saint que se transmet dans l’Église la Tradition reçue des Apôtres, cette « mémoire vivante du Ressuscité » (86). Sous diverses formes, la Tradition apostolique a évangélisé les cultures présentes au Liban, en ayant soin de prendre en compte les riches sensibilités spirituelles et les langues locales. À côté de la tradition arménienne qui, tout en étant originale, n’est pas sans lien avec les Pères cappadociens et syriaques, il y a la très ancienne tradition antiochienne, d’origine à la fois araméenne et hellénistique. Toutes ces racines sont communes aux Églises orientales catholiques et aux Églises orthodoxes. Cette sainte et vivante Tradition pluriforme s’est transmise par les Pères de l’Église et par les auteurs spirituels, par la divine Liturgie, par l’exemple des martyrs, des saints et des saintes. La fidélité à la Tradition permet un véritable « retour aux sources » par lequel l’Esprit Saint veut renouveler chaque Église particulière, ainsi que développer la communion entre toutes (87). Dans la docilité au Dieu Trinité, le courant de la grande Tradition vivante anime l’Église, pour qu’elle annonce dans chaque culture et à chaque époque le mystère chrétien. « À mesure que l’Église s’est développée dans le temps et dans l’espace, l’intelligence de la Tradition dont elle est porteuse a, elle aussi, connu les étapes d’un développement dont l’étude constitue, pour le dialogue œcuménique et pour toute réflexion théologique authentique, le parcours obligatoire » (88).
41. Durant l’Assemblée synodale, plusieurs intervenants ont déploré que les fidèles ignorent leur tradition ecclésiale et celles de leurs frères. D’autres ont affirmé que l’enracinement des Églises d’Antioche dans leur tradition commune est une exigence vitale pour leur renouveau, pour la communion entre les Églises patriarcales catholiques qui en dépendent, pour le dialogue œcuménique et pour la mission (89). C’est pourquoi il est important d’insister sur la remise en valeur des traditions patristiques, liturgiques et iconographiques de l’Église catholique au Liban, qui offre au peuple libanais des chemins spirituels pour rencontrer le Dieu vivant et vrai, et pour devenir la vivante icône du Christ (90). Il faudra aussi poursuivre la mise en valeur des écrits arabes chrétiens dans les domaines de la théologie, de la spiritualité, de la liturgie et de la culture générale ; autant de trésors qui ont enrichi la tradition antiochienne à partir du VIIe siècle. Enfin, au niveau des moyens, beaucoup d’initiatives sont à promouvoir ou à encourager: des recherches scientifiques, des traductions, des programmes rénovés dans les organismes de formation théologique et catéchétique, des propositions de formation pour adultes et jeunes, ainsi que la diffusion de biographies des témoins de la foi de tous les temps, la connaissance des hauts lieux de la tradition et le souci de faire connaître les traditions des Églises orientales dans les communautés catholiques de la diaspora (91).
La Liturgie
42. C’est surtout dans la célébration eucharistique que l’Esprit Saint renouvelle l’Église en la conformant toujours davantage à son Seigneur. L’Eucharistie est le pain quotidien qui nous unit au Christ, qui fait de nous des membres vivants de son Corps et qui nous maintient dans l’unité (92). Ainsi, nous devenons ce que nous recevons pour, « le visage découvert en une conscience pure, réfléchir comme un miroir la gloire du Seigneur » (93). La liturgie, source et sommet de la vie et de l’action de l’Église, est la célébration du mystère pascal, spécialement dans l’Eucharistie, mais aussi dans les autres sacrements et dans l’office divin, encore appelé la « liturgie des heures ». Tout au long de l’année, en particulier dans les églises paroissiales où s’assemble la communauté chrétienne, c’est dans la célébration des « Saints Mystères » que la parole de Dieu est efficacement « esprit et vie » (Jn 6, 63) et que la sainte Tradition manifeste le plus sa force vivifiante. La connaissance intime de la Trinité sainte se réalise particulièrement dans la prière constante de l’Église, par le Christ, seul médiateur entre Dieu et les hommes, et par l’Esprit qui nous pousse à redire sans cesse Abba, Père (94). Au long des siècles, s’est développée la « très riche hymnographie liturgique : [...] ces hymnes sont en grande partie des paraphrases sublimes du texte biblique » (95), que les fidèles assimilent pour nourrir leur prière.
Participation à la liturgie céleste et anticipation du « monde qui vient », la Divine Liturgie est le don grâce auquel les Églises orientales ont pu tenir ferme dans l’espérance à travers des siècles de tribulations. Source permanente qui a nourri et animé la foi, elle nécessite aujourd’hui une approche pastorale nouvelle conforme aux orientations du Concile œcuménique Vatican II, dans la fidélité aux traditions spirituelles spécifiques. Cette attention nouvelle est essentielle, afin que se développe la pastorale liturgique et sacramentelle et que tous les fidèles puissent participer plus activement à la vie liturgique ; ainsi, les célébrations deviendront toujours plus vraies et plus significatives (96). Je recommande aux pasteurs de veiller à ce que les réformes liturgiques entreprises maintiennent la beauté et la dignité des célébrations, qui forment un patrimoine commun aux Églises orientales ; il est indispensable que ces réformes ne dénaturent pas le sens théologique des Saints Mystères et que, selon les normes de l’Église catholique et dans le respect des traditions ecclésiales propres, les différentes Églises particulières aient conscience d’être en communion et en harmonie avec toute l’Église (97). Pour mener à bien les réformes, il sera bon de suivre les critères donnés par l’Instruction pour l’Application des Règles liturgiques du Code des Canons des Églises orientales, publiée par la Congrégation pour les Églises orientales (98). Pour que soit mis en oeuvre ce renouveau, les Pères du Synode ont insisté sur des conditions indispensables : le travail de commissions liturgiques au niveau des Synodes des évêques des Églises patriarcales, des éparchies ou des paroisses, la formation initiale et permanente des prêtres, des diacres et des responsables laïcs, ainsi que la connaissance des traditions et de la pastorale liturgiques. Loin de toute recherche de prestige, tous auront à coeur de faire apparaître la vérité profonde et la beauté du mystère de la foi qui est célébré (99).
La prière personnelle et communautaire
43. Au terme des interventions en session plénière, le Rapport de synthèse de l’Assemblée synodale rappelait avec courage que les transformations dans la vie personnelle et dans la vie sociale nécessitent une libération profonde au sein même de l’Église catholique au Liban, la libération intérieure qui nous vient du Christ à travers la vie spirituelle. Avant donc de transformer ses structures, il est urgent que l’Église au Liban se laisse transformer par le Christ et que s’accomplisse pleinement en chaque fidèle l’oeuvre de la déification, thème si cher à la théologie orientale (100). « Par la puissance de l’Esprit qui demeure dans l’homme, la déification commence déjà sur la terre, la créature est transfigurée et le Royaume de Dieu est inauguré » (101). Il est donc important que tout soit mis en oeuvre pour que les fidèles soient guidés dans l’initiation à la prière personnelle et communautaire, et qu’ils puissent raviver leur vie spirituelle dans leur cadre quotidien et dans des lieux de silence et d’accueil, et dans les monastères. On se réjouit aussi que se développent des groupes de prière, appelés à être d’authentiques communautés ecclésiales et des témoins de la force obtenue par la prière.
II. Le renouveau des personnes
L’unité dans la diversité
44. Un des thèmes majeurs de cette Assemblée synodale consacrée au Liban est celui de l’unité dans la diversité. Les Pères ont voulu souligner à plusieurs reprises le respect nécessaire de l’identité de chaque groupe et de chaque personne, ainsi que le besoin urgent de dépasser les barrières que l’histoire a élevées entre les communautés chrétiennes libanaises, afin que tous ensemble deviennent « les pierres de construction d’une tour [...] construite sur le rocher de la foi » (102). Ce désir de collaboration et d’ouverture ne s’est pas seulement manifesté au niveau des diverses Églises locales dans leur ensemble, mais aussi au niveau des différentes catégories qui composent le peuple de Dieu. Chacun a le droit d’être respecté dans sa démarche spirituelle propre, mais tous doivent aussi s’engager dans la voie du dialogue avec leurs frères. Les charismes et les dons confiés aux uns sont à mettre au service de tous, par une recherche commune de vérité, dans l’amour.
Les fidèles laïcs
45. Durant le Synode, les laïcs présents ont largement exprimé le désir que les fidèles puissent participer de manière active et responsable à la vie ecclésiale, au sein des différentes structures et des divers conseils pastoraux (103), à la mesure de leurs compétences. Ils devraient s’engager dans la vie de l’Église, à tous les niveaux, mais ils attendent souvent qu’elle fasse appel à eux et leur témoigne sa confiance. Les missions des laïcs sont vastes. Il leur appartient, « en raison de leur vocation propre, de chercher le Royaume de Dieu en gérant les affaires temporelles et en les ordonnant selon Dieu. [...]. C’est à cette place qu’ils sont appelés par Dieu, pour que, en accomplissant leur charge propre, en se laissant conduire par l’esprit évangélique, ils contribuent à la sanctification du monde comme du dedans, à la manière d’un ferment, et qu’ils manifestent ainsi le Christ aux autres, avant tout par le témoignage de leur vie, dans le rayonnement de leur foi, de leur espérance et de leur charité » (104), qui les unissent à leur Seigneur. La gestion des affaires publiques et le gouvernement de la cité sont cette scientia civilis (105), qui permet d’unir entre eux les hommes par les liens de l’amitié, avec le souci de construire ensemble une communauté de destin et d’intérêt, dont la vocation est le bien des personnes et le service de la vérité (106), et de donner à chaque citoyen l’amour de sa patrie.
« Outre cet apostolat qui concerne tous les fidèles sans exception, les laïcs peuvent de surcroît être appelés de diverses manières à apporter une collaboration plus immédiate à l’apostolat de la hiérarchie, à la manière de ces hommes et de ces femmes qui secondaient l’Apôtre Paul dans la proclamation de l’Évangile et qui peinaient lourdement pour le Seigneur (cf. Ph 4, 3 ; Rm 16, 3) » (107). Il est aussi important que des fidèles laïcs s’engagent plus directement dans la recherche intellectuelle et dans l’étude, pour que se développe une véritable culture chrétienne dans le monde arabe, avec le soutien des pasteurs. Afin de pouvoir exercer leurs responsabilités, ils doivent pouvoir trouver dans leurs paroisses et dans leurs mouvements des propositions de formation catéchétique, théologique et spirituelle, qui les aideront à collaborer avec les prêtres dans leurs activités paroissiales, avec le souci de la coresponsabilité (108).
Dans cette perspective, devront être créés des centres de formation pour adultes, auxquels les fidèles auront facilement accès. L’animation et l’administration pourront être prises en charge en commun par l’ensemble des patriarcats, dans leurs différentes instances, ou bien elles pourront être le fruit de la collaboration étroite de plusieurs organismes, dans un esprit de concertation avec les autres centres existants; de telles structures permettront aussi de réaliser des moyens techniques et pédagogiques adaptés aux connaissances des fidèles. En s’appuyant sur le Catéchisme de l’Église catholique, les évêques au Liban sont invités à poursuivre la publication d’ouvrages présentant la foi chrétienne dans son ensemble, qui prendront en considération leur diversité culturelle. Je salue les efforts déjà entrepris, avec d’autres catholiques du Moyen-Orient, pour publier en langue arabe des textes du Magistère pontifical et de certains dicastères du Saint-Siège. En outre, une présence plus grande dans les moyens de communication sociale permet de diffuser l’enseignement de l’Église, soit par le canal de journaux, de radios et de télévisions, soit en préparant des émissions pour les médias qui n’ont pas un caractère proprement ecclésial, mais qui sont disposés à faire une place aux programmes religieux dans leurs émissions (109).
La famille
46. Le Message du Synode a clairement énoncé les menaces qui pèsent sur la famille libanaise : « Démembrement familial à cause de l’émigration du père ou des enfants en quête d’un emploi ou d’une formation ; vie familiale compromise par les difficultés matérielles ; vie familiale minée par une conception erronée de l’indépendance des conjoints et une mentalité contraceptive » (110). Face à cela, le soutien spirituel, moral et matériel des futurs couples et des familles est une des tâches les plus urgentes.
C’est d’abord à partir de la famille que le tissu social se construit, que l’éducation de la jeunesse, demain responsable de la nation, se réalise et que la foi chrétienne se transmet de génération en génération. L’Église fait confiance aux familles et compte sur les parents, tout spécialement dans la perspective du troisième millénaire, pour que les jeunes puissent connaître le Christ et le suivre généreusement dans le mariage, dans le sacerdoce ou dans la vie consacrée. « Le sacerdoce baptismal des fidèles, vécu dans le mariage-sacrement, constitue pour les époux et pour la famille le fondement d’une vocation et d’une mission sacerdotales » (111). Les foyers sont porteurs d’un riche dynamisme spirituel et sont les premiers lieux de maturation des vocations. Par leur façon de vivre, les parents témoignent de la beauté du mariage et du don de soi. L’exemple quotidien de couples unis nourrit chez les jeunes le désir de les imiter. « Petite Église », la famille est une école de l’amour (112) et le premier lieu d’un témoignage chrétien et missionnaire, par l’exemple autant que par la parole. Le mystère d’amour qui lie l’homme et la femme est le reflet de l’union entre le Christ et son Église (cf. Ep 5, 32). C’est dans la famille que, dès le bas âge, les enfants sont initiés à la présence de Dieu et à la confiance en sa bonté de Père. Une pédagogie toute simple de la prière chrétienne suppose que les adultes donnent l’exemple de la prière personnelle et de la méditation de la parole de Dieu. C’est donc pour soutenir, aider et préserver cette institution primordiale que les participants à l’Assemblée synodale ont souhaité que la pastorale familiale soit développée.
47. Dans cet esprit, la préparation au mariage est extrêmement importante. Pour exercer leurs futures responsabilités, les fiancés doivent pouvoir trouver des appuis auprès de l’Église locale. Dans chaque paroisse, des couples ayant de l’expérience, en liaison avec le clergé, pourront aider les jeunes à se préparer au mariage ; des gens déjà mariés seront d’utiles conseillers; ceux qui ont des difficultés pourront trouver l’écoute attentive et l’aide fraternelle dont ils ont besoin. Pour animer les centres de préparation au mariage et de conseil, il est souhaitable qu’un Institut d’études matrimoniales et familiales soit créé pour former des prêtres et des personnes compétentes. Un tel institut fournira aussi une documentation au service des divers centres, présentant l’enseignement de l’Église qui, ces dernières années, a proposé de nombreux textes à la réflexion des chrétiens (113).
Il serait bon de créer un réseau de couples capables d’accompagner ceux qui connaissent des difficultés, de les aider à porter un autre regard sur les problèmes rencontrés et à réinstaurer entre eux un dialogue serein (114). Des réconciliations entre couples deviendront ainsi possibles, avant d’en arriver trop rapidement à des solutions judiciaires (115).
48. Devant les difficultés croissantes des couples, il convient que les tribunaux ecclésiastiques travaillent en coordination avec les centres d’aide, en vue de tout tenter pour réconcilier les époux (116). Chaque Église patriarcale ayant ses propres tribunaux, une étroite collaboration entre eux est indispensable, afin de garantir une même justice pour tous, à travers la diversité des pouvoirs judiciaires, et d’éviter ainsi que ceux qui s’adressent aux tribunaux puissent manipuler le cours de la justice en jouant sur les divergences entre les juridictions. Cela suppose de la part des juges un esprit pastoral et une parfaite intégrité qui devraient être garantis grâce à la vigilance permanente de la hiérarchie ecclésiastique (117). Il convient aussi que le droit à la défense des personnes nécessiteuses soit bien assuré, notamment en renforçant leur assistance judiciaire par l’exemption des frais et par la mise à leur disposition d’avocats bénévoles (118).
49. Les familles doivent aussi être aidées dans les difficultés économiques qu’elles affrontent. Dans ce domaine, je fais confiance aux différentes institutions catholiques locales pour être inventives, pour s’associer entre elles et pour constituer des réseaux d’aide, en liaison avec les institutions nationales qui ont pour mission de promouvoir une politique familiale, en protégeant chaque membre et en promouvant l’éducation de la jeunesse.
Les femmes
50. Les femmes méritent une attention spéciale, pour que leur soient reconnus leur dignité et leurs droits dans les différentes instances de la vie sociale et nationale. En effet, dans son anthropologie et dans sa doctrine, l’Église affirme l’égalité des droits entre l’homme et la femme, fondée sur la création de tout être humain à l’image de Dieu. « L’Église est fière, vous le savez, d’avoir magnifié et libéré la femme, d’avoir fait resplendir au cours des siècles, dans la diversité des caractères, son égalité foncière avec l’homme » (119). À partir du Christ et du mystère de l’Incarnation, le rôle de la femme est exprimé de manière admirable par la Vierge Marie, dont la tradition orientale à souvent mis en valeur la place unique, car elle est celle par qui « nous est donné l’arbre de l’immortalité » (120). A juste titre et en vérité, nous appelons sainte Marie Mère de Dieu, car ce nom contient tout le mystère du salut (121).
« La force morale de la femme, sa force spirituelle, rejoint la conscience du fait que Dieu lui confie l’homme, l’être humain, d’une manière spécifique. Naturellement, Dieu confie tout homme à tous et à chacun. Toutefois cela concerne la femme d’une façon spécifique — précisément en raison de sa féminité — et cela détermine en particulier sa vocation » (122). Les femmes ont une conscience aiguë de ce qui leur est confié et elles ont la capacité de manifester leur « génie » dans les circonstances les plus diverses de la vie humaine.
Il nous faut cependant reconnaître que, au sein de la société et dans les institutions catholiques locales, la place des femmes n’est souvent pas à la mesure de leurs engagements et de leurs efforts. Nous devons tout d’abord nous souvenir que la tradition orientale situe une femme, Marie-Madeleine, à un rang important à côté des Apôtres, car, après avoir suivi Jésus, elle fut la première à se rendre au tombeau, à accueillir la Bonne Nouvelle de la Résurrection et à l’annoncer aux disciples (123). Il convient donc d’offrir aux femmes des participations plus importantes et des responsabilités dans la vie et dans les décisions ecclésiales, et de leur donner la possibilité d’acquérir la formation nécessaire. Leur rôle dans l’éducation de la jeunesse, en particulier dans les domaines catéchétique, spirituel, moral et affectif (124), est de tout premier plan, car « l’âme de l’enfant est une cité, une cité récemment fondée et organisée », qui demande une patience et une attention de tous les instants (125). Elles ont aussi joué et jouent encore un rôle déterminant dans la vie ecclésiale et dans la société libanaise, manifestant ainsi que le don de soi par amour appartient à la vraie nature de la personne humaine. Durant les années de guerre, elles se sont spécialement dépensées pour sauvegarder la vie et pour entretenir l’espérance de la paix. Comme je le rappelais récemment, elles ont aussi pour vocation d’être des éducatrices de la paix, « dans les relations entre personnes et entre générations, dans la famille, dans la vie culturelle, sociale et politique des nations » (126). Elles sont particulièrement actives dans les services de santé, dans les services sociaux et dans l’éducation. Je me réjouis que les Pères du Synode aient voulu leur donner la possibilité d’être plus actives au sein des différentes structures ecclésiales des paroisses, des éparchies et des instances patriarcales et inter-patriarcales, dans les domaines spirituel, intellectuel, éducatif, humanitaire, social, administratif. Elles peuvent y rendre de grands services par leurs qualités personnelles spécifiques.
Les jeunes
51. Les jeunes Libanais sont « déçus par la génération qui les a précédés et qui ne leur a pas permis de faire l’expérience de la paix, mais de la guerre et de la haine » (127). Durant l’Assemblée synodale, ils ont fait part aux Pères de leurs critiques et de leurs exigences, avec franchise et courage, manifestant ainsi qu’ils attendaient des changements décisifs dans l’Église. Ils ont réclamé des actions concertées au nom de l’Évangile et ils ont exprimé leurs souffrances devant les divisions ecclésiales qui entravent la mission. Ils souhaitent une Église qui montre son unité dans la diversité, qui soit un véritable lieu de vie fraternelle, de partage, de ressourcement et d’espérance.
Dans la conscience de la nation libanaise et au sein de l’Église au Liban, les jeunes doivent avoir une place importante et être une force de renouvellement national et ecclésial, en participant aux différentes structures de la vie sociale et aux instances de décision. Il faut les aider à vaincre les tentations d’extrémisme et de laxisme qui peuvent les guetter, ainsi qu’à refuser les différentes formes de vie qui sont opposées à une saine moralité. D’autre part, il convient de les éclairer sur les principes et les valeurs de la vie personnelle et sociale. Ils deviendront ainsi des partenaires à part entière, soucieux de poursuivre inlassablement le dialogue avec leurs frères désireux de parvenir à des compromis pour que la convivialité soit possible, mais sans que cela n’aboutisse à des concessions sur les principes et les valeurs.
L’Église compte sur les jeunes pour donner un nouvel élan à la vie ecclésiale et à la vie sociale. Les communautés chrétiennes sont donc invitées à les intégrer davantage dans toutes leurs activités, pour qu’ils soient des acteurs de la «nouvelle évangélisation», des semeurs de la Parole auprès d’autres jeunes, apportant leur dynamisme particulier en vue du renouveau ecclésial (128). De même, ils sont appelés à être des partenaires à part entière dans l’édification de la société. Pour cela, il convient de leur donner une formation intellectuelle et spirituelle solide, qui réponde ainsi à leur soif d’absolu et de vérité. Là où ils s’engagent, ils doivent pouvoir trouver l’accompagnement spirituel dont ils ont besoin. Le rôle des conseillers religieux, dans les mouvements et sur les campus universitaires, qu’ils soient prêtres, diacres, religieux, religieuses ou laïcs, est d’une grande importance pour leur croissance et leur maturation humaine et spirituelle, afin de les aider à discerner leur vocation et à trouver leur place dans la société (129).
Les religieux et les religieuses
52. Aujourd’hui, les religieux et les religieuses sont présents dans tous les domaines de l’Église et de la société. Ils sont donc bien placés pour continuer à être un point de référence pour leurs frères, en configurant étroitement leur vie au Christ et en approfondissant leur charisme spécifique, pour le bien de toute l’Église et pour le salut du monde (130). Pour cela, il est demandé aux personnes qui s’engagent dans la vie consacrée de s’attacher à vivre une profonde expérience de Dieu (131), pour manifester que le Seigneur est le terme de l’histoire et qu’il aime le monde. En effet, « grâce à la profession des conseils évangéliques, les traits caractéristiques de Jésus — chaste, pauvre et obéissant — deviennent “visibles” au milieu du monde de manière exemplaire et permanente et le regard des fidèles est appelé à revenir vers le mystère du Royaume de Dieu, qui agit déjà dans l’histoire, mais qui attend de prendre sa pleine dimension dans les cieux » (132).
Les religieux et les religieuses qui sont au Liban et dans tout le Moyen-Orient sont invités à analyser en vérité leurs modes de vie et leurs façons de témoigner de l’Évangile et d’accomplir les missions qui leur sont confiées. Ils s’assureront ainsi qu’ils restent fidèles aux intuitions d’origine de leurs fondateurs et qu’ils demeurent pour les hommes de leur temps des témoins du Christ et des exemples de vie chrétienne, par la vie communautaire et par la pratique des conseils évangéliques de pauvreté, de chasteté et d’obéissance. Le Seigneur nous ordonne, en effet, de soigner ceux qui chancellent et de viser d’abord le profit du prochain avant ce qui nous plaît (cf. Tt 2, 12) (133). D’autre part, leur mission exige une grande fidélité à l’idéal de toute vie consacrée et à l’orientation propre des fondateurs, ainsi qu’un esprit créatif pour répondre aux attentes des hommes et pour faire face aux besoins spécifiques de l’Église.
Par vocation, les personnes consacrées proclament l’Évangile et témoignent du primat de l’Absolu sur toutes les réalités humaines, par la parole et par leur vie exemplaire, car elles appartiennent au Seigneur. De ce fait, leur relation avec Dieu s’accompagne d’un comportement moral en harmonie avec l’engagement pris, car c’est en « vivant dans la vertu, que nous sommes reliés à Dieu » (134) et que nous marchons dans la voie de la filiation divine (135). Toutes les personnes vertueuses, en particulier celles qui sont consacrées, donnent une dimension oblative à leur vie, reflètent la gloire de Dieu et font triompher le sens profond et véritable de l’existence (136). Dans un monde qui se tourne de plus en plus vers le matérialisme et vers de nombreuses idoles, cela est d’autant plus urgent. Que le témoignage des personnes consacrées soit crédible, car « l’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres » (137) ; car, par leur façon d’être et la fidélité à leurs promesses, ils montrent la voie du bonheur et sont reconnus comme de véritables guides spirituels dont le peuple a besoin, sur le modèle de saint Antoine, le père des moines (138).
53. La vie religieuse est fondée sur la double fidélité au Christ et à son Église (139). Son renouvellement suppose l’attention à l’Évangile, l’amour de l’Église et le développement du charisme propre à chaque Institut. Des jeunes cherchent comment répondre à l’appel du Seigneur. Les Instituts et les pasteurs portent donc ensemble, dans une collaboration étroite, le souci de la promotion et du discernement des vocations (140), pour orienter les jeunes là où Dieu les appelle réellement, sans vouloir les détourner de leur libre engagement dans une spiritualité particulière et pour leur assurer la formation nécessaire, en tenant compte du contexte socio-culturel libanais.
Il est très important, pour des raisons théologiques et pastorales, que les religieux et les religieuses soient effectivement bien intégrés dans la vie ecclésiale. Ils donneront ainsi l’exemple à tous leurs frères de l’unité nécessaire entre la vie spirituelle et la vie caritative (141). Tout en jouissant d’une juste autonomie pour ce qui concerne les questions internes de leurs Instituts, ils font partie intégrante de l’Église particulière et leur action ne peut être conduite qu’en harmonie et en étroite collaboration avec l’ensemble de l’Église (142), dans une communion toujours plus confiante avec « le Pontife romain en tant que Supérieur suprême de tous les religieux » (143) et avec les évêques et en obéissance à leur égard (144) ; une telle nécessité est encore plus impérative lorsqu’il s’agit d’une activité liée à la vie pastorale d’une manière ou d’une autre (145). En effet, la mission de l’Église, Corps du Christ, repose sur les successeurs des Apôtres, par la volonté même du Seigneur.
Dans bien des cas, prenant une conscience nouvelle de la conception de la vie religieuse telle qu’elle est ici présentée, les religieux et les religieuses du Liban ressentiront le besoin d’une réforme, parfois profonde, de leurs manières de vivre et d’exprimer la sequela Christi, conformément au décret du Concile Vatican II Perfectæ caritatis sur la rénovation et l’adaptation de la vie religieuse. Cette réforme devra concerner particulièrement les nouveaux membres des Instituts, auxquels sera proposée, avec l’appui de l’exemple authentique de leurs formateurs, une conception de la vie consacrée qui les engage à répondre à l’appel du Seigneur dans l’Église de manière cohérente et crédible. Pour leur formation, il conviendra de faire appel à des religieux et à des religieuses qui donnent un témoignage de sainteté personnelle, de profondeur de la vie intérieure, de fidélité joyeuse à leurs vœux (146). Commençant par les membres les plus jeunes, une telle réforme pourra transformer progressivement la vie de toute la communauté religieuse et sera une contribution notable à la transformation de la vie sociale ; car, comme l’écrivait affectueusement saint Basile à ses moines qu’il invitait à la perfection dans la pratique des conseils évangéliques, c’est une vie morale et une vie ascétique conformes à l’engagement pris qui provoquent à la réconciliation entre les personnes (147).
La vie religieuse apostolique
54. Les communautés religieuses sont une grande richesse et une source de grâce et de dynamisme pour les diocèses. Par leurs différentes activités apostoliques, elles participent à la démarche pastorale voulue par les évêques et, de ce fait, sont intégrées aux différentes instances diocésaines (148). Je rends grâce à Dieu pour ce qu’elles ont accompli durant les douloureuses années de la guerre, dans les services sanitaires, éducatifs et sociaux, parfois au risque de la vie de leurs membres. Je remercie le Seigneur de ce qu’elles continuent à réaliser avec dévouement et désintéressement, sans méconnaître leurs lourdes tâches et leurs effectifs réduits. Avec le souci de l’unité dans la diversité qui a été une des lignes directrices de l’Assemblée spéciale, les religieux et les religieuses sont invités à travailler toujours en étroite collaboration, montrant ainsi la complémentarité des charismes. Dans cet esprit, ils auront à être attentifs à une bonne répartition des personnes et des institutions en fonction des priorités pastorales, dans une totale disponibilité au service du peuple libanais et de la mission universelle de l’Église, au-delà des frontières du pays. Cette ouverture donnera un élan nouveau à la vie religieuse apostolique au Liban et suscitera de nouvelles vocations (149). Il convient que tous ceux qui sont engagés dans la vie apostolique « trouvent un juste et fécond équilibre entre l’action et la contemplation, entre la prière et la charité, entre l’engagement dans l’histoire et l’attente eschatologique » (150).
55. En particulier, la présence visible de l’Église est requise auprès de ceux qui sont dans le besoin. Les religieux et les religieuses sont appelés à être les témoins de l’amour préférentiel du Christ pour les pauvres à travers leurs services diversifiés et par leur vie de pauvreté et de communion fraternelle. Il est aussi souhaitable que les Instituts religieux renforcent leur présence et leur mission dans les régions éprouvées et périphériques du pays, aidant chacun à demeurer dans la terre de ses ancêtres, pour en prendre soin et y vivre décemment.
Dans les institutions dont les religieux ou les religieuses ont la responsabilité, des laïcs accomplissent souvent une très grande partie du travail. On doit pleinement reconnaître leur place, y compris en leur confiant des postes de responsabilité en fonction de leurs compétences.
La vie monastique
56. Le monachisme n’a « pas été considéré en Orient uniquement comme une condition à part, propre à une catégorie de chrétiens, mais de façon plus particulière, comme un point de référence pour tous les baptisés, selon les dons offerts à chacun par le Seigneur, se présentant comme une synthèse emblématique du christianisme » (151). Paradoxalement, en Orient, la vie religieuse apostolique est actuellement bien plus développée que la vie monastique dans ses différentes expressions, du cénobitisme strict, ainsi que le concevaient Pacôme ou Basile, à l’érémitisme plus rigoureux d’un Antoine ou d’un Macaire l’Égyptien (152), qui sont pourtant intimement liées aux traditions propres de l’Orient chrétien. Dans sa forme traditionnelle, « le monachisme oriental privilégie la conversion, le renoncement à soi-même et la componction du cœur, la recherche de l’hésychia, c’est-à-dire de la paix intérieure, et la prière continuelle, le jeûne et les veilles, le combat spirituel et le silence, la joie pascale dans la présence du Seigneur et dans l’attente de sa venue définitive, l’offrande de soi et de ses propres biens, vécue dans la sainte communion du monastère ou dans la solitude érémitique » (153).
Avec les Pères synodaux, je souhaite que la vie monastique retrouve la place qui lui revient (154) ; et je suis heureux de constater qu’il y a aujourd’hui dans certains ordres religieux un désir sincère de renouer avec ces traditions authentiques et de revenir aux valeurs monastiques traditionnelles, rappelant ainsi à tous les hommes l’importance de la prière, de la liturgie, de la lectio divina, de l’ascèse, du service et de la vie communautaire. Ces éléments sont souvent appelés par les Pères d’Orient « les armes spirituelles » puissantes (155), indispensables dans le combat pour la perfection. La vie monastique est à la fois un chemin de sanctification personnelle et, à l’exemple de l’Apôtre, une contribution à la sanctification du peuple de Dieu et de tous les hommes, en complétant « en [sa] chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l’Église » (Col 1, 24). Ainsi, par sa vie orante, l’Église répand des germes de perfection et soutient ceux qui oeuvrent dans le champ du monde, car la proximité de Dieu fait découvrir la vérité et la beauté des mystères divins et rend solidaire de ses frères (156).
57. J’invite les Églises orientales à puiser aux sources du monachisme antique, pour retrouver la ferveur spirituelle des origines, qui est une part importante de leur trésor et de leurs traditions. Elles proposeront de nouveau à des hommes et à des femmes la vie monastique comme une des formes éminentes de vie chrétienne, pour veiller sur leur âme et former leur être intérieur (157). Cela rejaillira sur tout le peuple, pour encourager leurs frères chrétiens à « s’engager avec ardeur dans le combat intérieur » (158) et pour témoigner d’une façon exemplaire de la grandeur de la vie fraternelle, invitant ainsi les chrétiens et tous les hommes de bonne volonté à vivre de nouvelles formes de relations humaines, fondées sur la charité et sur l’amour.
Les monastères pourront devenir des lieux prophétiques dans lesquels « la création devient louange de Dieu et le commandement de la charité vécue de façon concrète devient un idéal de coexistence humaine, au sein [desquels] l’être humain cherche Dieu sans barrière ni obstacle, devenant une référence pour tous, les portant dans son coeur et les aidant à chercher Dieu » (159). Ils manifesteront que la prière est une des responsabilités majeures des moines et de l’ensemble des chrétiens. Par le renoncement total à eux-mêmes, ils seront les témoins de l’invisible et de ce qui est essentiel dans l’existence. « Renoncer à soi-même, considère que c’est cela : s’abandonner en tout à la fraternité, ne suivre en rien sa volonté propre, ne rien posséder d’autre que le seul vêtement, afin, libre de toutes parts, de s’attacher avec joie à cela seul qui a été ordonné, prenant en considération tous les frères » (160).
Il est souhaitable que les communautés monastiques aient leur place dans l’Église au Liban, pour faire resplendir la glorieuse tradition des Pères, pour partager les trésors de grâce qui ont été communs aux Églises antiques, afin de redonner à toute l’Église aujourd’hui un témoignage profondément enraciné dans l’Orient chrétien, en quelque sorte le lieu élevé d’où il peut être contemplé dans toute sa beauté.
Dans la mesure où la vie communautaire, qui rend visible la communion ecclésiale, deviendra florissante et prophétique, on espère aussi un nouveau développement de la vie ascétique et de l’expérience érémitique (161). Les moines seront, comme ils l’étaient autrefois, des guides et des maîtres spirituels, et leurs monastères des lieux de rencontre œcuméniques et interreligieux (162).
Les ministères ordonnés
58. « Au service du sacerdoce universel de la Nouvelle Alliance, Jésus [...] appelle et institue les Douze « pour être ses compagnons et pour les envoyer prêcher, avec pouvoir de chasser les démons » (Mc 3, 14-15) » (163). « À leur tour, les Apôtres, institués par le Seigneur, s’acquitteront progressivement de leur mission en appelant, sous des formes diverses mais finalement convergentes, d’autres hommes, comme évêques, comme prêtres et comme diacres, pour accomplir la mission reçue du Christ ressuscité qui les a envoyés à tous les hommes de tous les temps. [...] Dans l’Église et pour l’Église, les prêtres représentent sacramentellement Jésus Christ, Tête et Pasteur, ils proclament authentiquement la parole, ils répètent ses gestes de pardon et d’offre du salut, surtout par le Baptême, la Pénitence et l’Eucharistie, [...] jusqu’au don total de soi-même, pour le troupeau qu’ils rassemblent dans l’unité et conduisent au Père par le Christ dans l’Esprit » (164).
« En tant qu’il représente le Christ Tête, Pasteur et Époux de l’Église, le prêtre est placé non seulement dans l’Église, mais aussi face à l’Église. Le sacerdoce, en même temps que la parole de Dieu et les signes sacramentels dont il est le serviteur, appartient aux éléments constitutifs de l’Église. Le ministère du prêtre est entièrement au service de l’Église pour promouvoir l’exercice du sacerdoce commun de tout le peuple de Dieu ; il est ordonné non seulement à l’Église particulière, mais encore à l’Église universelle (cf. Presbyterorum ordinis, n. 10), en communion avec l’évêque, avec Pierre et sous l’autorité de Pierre » (165).
59. Ces quelques textes du Magistère sur le ministère ordonné doivent éclairer l’ensemble des pasteurs dans leur mission épiscopale, presbytérale ou diaconale. Les patriarches, les évêques avec les prêtres et les diacres, tous participent à l’unique mission du Christ. Pour que la diversité ecclésiale au Liban puisse être perçue par les fidèles comme une véritable richesse, l’unité de la mission confiée à tous ces pasteurs doit devenir visible. Aucun ministre ne peut ignorer les autres ministres qui travaillent sur le même terrain, qu’ils appartiennent à son Église patriarcale ou à une autre. Le témoignage d’unité et de fraternité par la collaboration étroite des pasteurs de diverses Églises particulières est au Liban une nécessité urgente. Beaucoup de choses se réalisent déjà, mais je voudrais demander à chacun de redoubler d’efforts et d’être particulièrement attentif en ce domaine dont les enjeux sont évidents pour l’avenir, comme les Pères du Synode l’ont pour leur part clairement exprimé.
Les ministères ordonnés, dans leur variété, sont là pour édifier l’Église et maintenir son unité aussi bien au sein du clergé qu’entre celui- ci et l’ensemble du peuple chrétien, pour former un seul corps (166). En effet, l’Église est un corps organique et, dans la mesure où chacun remplit son rôle en harmonie avec les autres, tout le corps sera sain.
L’épiscopat
60. Le patriarche est le chef et le père de son Église patriarcale ; il est, avec le Synode des évêques, le responsable de sa vie et de son renouveau. Comme successeur des Apôtres, l’évêque exerce « les fonctions d’enseignement, de sanctification et de gouvernement » (167) ; avec son clergé, il conduit le peuple qui lui est confié sur le chemin de Dieu. Je m’associe aux membres de l’Assemblée synodale pour exhorter les patriarches et évêques du Liban à un examen de conscience en vérité et à un engagement renouvelé sur la voie d’une conversion personnelle nécessaire à un témoignage plus fructueux et à la sanctification des fidèles: d’abord par leur vie de prière, d’abnégation, de sacrifice et d’écoute ; puis par leur vie exemplaire d’apôtres et de pasteurs, faite de simplicité, de pauvreté et d’humilité ; enfin par leur souci constant de défendre la vérité, la justice, les mœurs et la cause des faibles (168).
61. Dans leur ministère, les évêques ont d’abord le souci de leurs collaborateurs immédiats, les prêtres. Ils ont à discerner la vocation des candidats au sacerdoce, à les accompagner, spirituellement et matériellement, et, enfin, à veiller à leur formation humaine, théologique et pastorale, qui devra être chaque jour plus soignée, pour répondre aux attentes des fidèles et à la complexité des problèmes de notre temps. Si les candidats au sacerdoce qui sont déjà mariés ou qui désirent se marier ne rentrent pas dans un séminaire, il est essentiel de leur assurer un cadre humain et spirituel approprié durant leur temps de formation, qui devra être d’un niveau élevé et semblable à celui des autres candidats, pour qu’ils puissent véritablement accomplir leur ministère dans les conditions spirituelles et culturelles actuelles. Le souhait de temps communs de formation pour les candidats au sacerdoce, les religieux, les religieuses et les laïcs a été exprimé par les Pères du Synode, ainsi que la possibilité pour les séminaristes des différentes traditions liturgiques de vivre en commun au moins une partie de leur période de formation, dans le but de créer des relations d’amitié et d’engager les collaborations pastorales ultérieures.
Ensuite, en ce qui concerne les prêtres, célibataires ou mariés, l’évêque doit être proche d’eux (169), veiller à développer avec eux une collaboration fraternelle et confiante (170), et à prévoir une formation permanente sérieuse pour leur ressourcement spirituel et pour leur action pastorale. Il doit aussi garantir leur sécurité matérielle dans le cadre d’une solidarité ecclésiale institutionnalisée, qui réponde à leurs besoins personnels et pastoraux. Ceci est particulièrement important pour les prêtres mariés qui ont une famille à charge. Il est également demandé aux évêques de se soucier spécialement des prêtres malades, âgés ou en difficulté. Concernant les prêtres mariés (171), il faut envisager pour leurs épouses une formation religieuse et pastorale adaptée (172). Enfin, une collaboration fraternelle entre les évêques de différentes éparchies est nécessaire pour une répartition des prêtres qui corresponde aux besoins des fidèles, en évitant une concentration trop importante dans les villes et leurs banlieues (173).
Le presbytérat
62. Par la vie sacramentelle, par la prière régulière et par la lectio divina, les prêtres affermiront leur vie spirituelle, qui produira des fruits dans leur ministère au service du peuple de Dieu. Il convient qu’ils soient attentifs à la fonction d’enseignement, en particulier dans les homélies au cours desquelles la parole de Dieu doit être expliquée et actualisée, pour aider les fidèles à approcher le mystère chrétien et à vivre chaque jour les valeurs évangéliques.
Fréquemment, étant donné l’imbrication territoriale des différentes éparchies, les prêtres, qui relèvent de juridictions diverses, exercent leur ministère sur un même territoire. La collaboration et la coordination de leur apostolat supposent des rencontres régulières et des coopérations réelles. Ils ont aussi à développer leur esprit de collaboration avec les fidèles. « Les pasteurs sacrés savent fort bien quelle importante contribution les laïcs apportent au bien de toute l’Église. Ils savent qu’ils n’ont pas été institués par le Christ pour assumer à eux seuls toute la mission salvifique de l’Église à l’égard du monde, mais que leur charge éminente consiste à être les pasteurs des fidèles du Christ et à reconnaître leurs services et leurs charismes de façon que tous, chacun à sa manière, coopèrent unanimement à l’oeuvre commune » (174).
Des prêtres se soucient aussi de leur formation permanente par la lecture et par des rencontres. Je les encourage dans cette voie ; j’invite aussi les évêques, en collaboration avec des personnes préparées à cette fin, à organiser et à développer des programmes d’enseignement théologique et pastoral qui enrichissent les prêtres dans leur service auprès des fidèles.
En ce qui concerne le dialogue œcuménique, les prêtres ont une place privilégiée, car ils ont des relations fréquentes avec les pasteurs des autres Églises et Communautés ecclésiales. Leur ouverture œcuménique et leur aptitude à la collaboration et au dialogue, sans confusion et dans le respect des personnes, aideront les fidèles à instaurer à leur tour des relations chaleureuses avec leurs frères, qui feront avancer la cause de l’unité entre les Églises.
Lorsque la paroisse se trouve dans une zone où vivent aussi des musulmans, l’attitude fraternelle d’ouverture et d’entraide des prêtres indiquera aux fidèles le chemin d’une convivialité réussie, conforme à la vocation propre du Liban (175).
Ces préoccupations qui importent dans une vie sacerdotale font clairement apparaître que les candidats au sacerdoce doivent recevoir non seulement une bonne formation intellectuelle, théologique, biblique et spirituelle, mais également une formation humaine qui les aide à acquérir une maturité personnelle et qui les rende attentifs à la complexité culturelle dans laquelle ils auront à exercer leur ministère (176).
Le diaconat
63. Le Concile œcuménique Vatican II a remis en vigueur le ministère diaconal permanent, que la tradition orientale a toujours conservé. Les diacres représentent le Christ en tant que Serviteur, plus particulièrement dans le service des pauvres, de la parole de Dieu et de la liturgie. En conséquence, ce ministère ordonné est à revaloriser. Il convient d’assurer aux candidats une formation appropriée et des moyens de subsistance adéquats selon leur situation personnelle (177).
III. Le renouveau des structures de communion
Édifier ensemble le Corps du Christ
64. Le renouveau voulu avec courage par les Pères synodaux va supposer de la part de chacun une réelle ouverture d’esprit et de cœur, pour développer la coordination et la collaboration entre tous les catholiques. Personne ne peut se dire détenteur exclusif de la mission, mais tous doivent laisser le Christ agir à travers eux pour qu’il n’y ait pas d’entraves aux dons et aux charismes des différents membres de l’Église catholique. Cela nécessite, entre toutes les instances ecclésiales, un réseau de communications d’autant plus indispensable que, au Liban, s’entrecroisent différentes éparchies catholiques et donc différentes juridictions. Cette difficulté peut être une grâce : elle pousse les responsables à se concerter, dans le respect de la diversité et des juridictions spécifiques : elle les invite aussi à édifier ensemble le Corps du Christ, en ayant un véritable sens ecclésial (178), sans s’attribuer pour eux seuls ou pour leur propre communauté confessionnelle le privilège de la mission sur un territoire déterminé, tout en étant soumis au Christ, qui est le Souverain Prêtre. Chaque personne ou chaque organisme ecclésial qui ne cherche pas la collaboration s’appauvrit et devient comme une branche morte qui empêche la vie de l’Esprit de circuler à travers l’ensemble de l’Église catholique au Liban.
Les paroisses
65. Fréquemment, des fidèles catholiques n’ont pas le sentiment d’appartenir à la communauté paroissiale de leur lieu de résidence. Certains restent attachés à la paroisse de leur lieu de naissance, même s’ils n’ont plus en réalité aucun contact. Les déplacements forcés, durant la guerre, ont également créé des situations ambiguës : les fidèles se sentent partagés entre le lieu où ils ont trouvé refuge et leur lieu d’origine. Dans les villes, le sens de la communauté paroissiale s’atténue de plus en plus. Les fidèles se contentent d’aller à la Messe dans l’église la plus proche, sans se rendre compte que participer aux Saints Mystères signifie aussi appartenir à un Corps, car l’Eucharistie édifie l’Église, unit l’Église du ciel et de la terre, est le signe de l’unité et de la charité (179). Les liens spirituels créés par l’écoute de la Parole et par la communion au même Pain portent des fruits de paix et de solidarité dans les relations humaines. Cependant, beaucoup de fidèles en sont venus à une conception individualiste de la foi chrétienne, sans une participation active à la vie de l’Église locale. Le prêtre risque alors de devenir celui qui assure la célébration des sacrements et qui accomplit les formalités nécessaires au moment du baptême, du mariage ou du décès, alors qu’il est avant tout celui qui anime la communauté chrétienne, en liaison avec les diacres et des laïcs compétents. Le pasteur doit avoir le souci de tout le troupeau, sans négliger les membres les plus faibles, ceux qui souvent ne se rendent pas à l’église, ceux qui sont mis en marge de la société et ceux qui sont malades et qui ont besoin d’être visités à domicile. J’exhorte volontiers les pasteurs à visiter les fidèles qui leur sont confiés pour être proches d’eux, resserrant ainsi les liens entre tous les membres de la communauté paroissiale, pour les accompagner dans leur vie spirituelle et pour les soutenir dans les épreuves.
66. Les paroisses sont les cellules de base du corps ecclésial. Elles sont des portions du peuple de Dieu qui, « d’une certaine manière, représentent l’Église visible établie dans le monde entier » (180) ; elles sont un lieu privilégié d’apostolat communautaire, car elles rassemblent en elles de multiples diversités humaines, sans distinction d’âge ni de rang social, pour les intégrer dans l’Église universelle. Par la pratique sacramentelle, de manière spéciale par l’Eucharistie et par la pénitence (181), les fidèles sont fortifiés pour la mission qui leur est confiée dans le monde, en particulier l’éducation religieuse des jeunes et le témoignage. Dans cet esprit, il s’avérera utile d’aider les chrétiens à approfondir le Catéchisme de l’Église catholique (182), qui présente « fidèlement et organiquement l’enseignement de l’Ecriture sainte, de la Tradition vivante dans l’Église et du Magistère authentique, de même que l’héritage spirituel des Pères, des saints et des saintes de l’Église, pour permettre de mieux connaître le mystère chrétien et de raviver la foi du peuple de Dieu » (183). Cet enseignement doit s’accompagner d’un effort permanent et conscient d’avoir à traduire le dogme chrétien et les directives du Magistère en fonction des situations déterminées, dans une culture spécifique, « par une application concrète et fidèle, au niveau de chaque Église et de toute l’Église. Il faut sans cesse revenir à cette source » (184) et à cette référence pastorale qu’est le Concile, en l’associant avec ses propres sources spirituelles et liturgiques, pour que la liturgie soit vraiment une confession de la foi reçue des Apôtres (185).
C’est pourquoi, avec leurs pasteurs, j’encourage les fidèles catholiques à approfondir leur foi, par l’étude, par la lecture de la Bible en famille, par la participation à des groupes bibliques, à des partages et à des veillées évangéliques dans les paroisses, dans les écoles, dans les universités et dans les mouvements ecclésiaux. Je demande que des retraites spirituelles, prenant appui sur la Parole de Dieu et sur le dogme chrétien, soient proposées pour jeunes et adultes (186). En effet, la plupart des fidèles acquièrent dans des domaines techniques et scientifiques des connaissances de plus en plus poussées. Leur connaissance du mystère chrétien doit pouvoir grandir pareillement, pour que leur vie spirituelle éclaire leur vie quotidienne. Dans le Liban moderne, il est important que la culture soit avant tout nourrie par la Parole de Dieu et par une foi approfondie, pour inspirer une réflexion chrétienne sur les problèmes fondamentaux auxquels l’homme et la société sont affrontés (187). Ainsi, les fidèles laïcs découvriront que leur participation à la vie de l’Église est essentielle, au niveau des paroisses, des mouvements ou de l’éparchie, en particulier dans les instances de décision comme le conseil pastoral de l’éparchie et les conseils paroissiaux (188).
67. Lorsque plusieurs paroisses coexistent sur un même territoire, tout en conservant leur identité propre et leur indépendance, elles sont appelées à collaborer étroitement, ce qui sera un signe éloquent de l’unité de l’Église dans une communion inventive et dans le légitime respect des diversités, en particulier au sein de conseils paroissiaux inter-rituels (189). D’autre part, il n’y a pas toujours la possibilité d’avoir des curés à demeure pour chaque paroisse de chaque Église patriarcale. En fonction des besoins pastoraux concrets, il peut être demandé à un prêtre de célébrer les sacrements dans une autre tradition liturgique que la sienne, à condition d’y avoir été préparé convenablement et d’avoir reçu la permission des autorités compétentes.
De petites communautés paroissiales peuvent aussi trouver de grandes difficultés à construire leur propre église, tandis qu’il en existe déjà une ou plusieurs dépendant d’une autre éparchie dans le secteur. Durant la guerre, lorsque les nécessités l’imposaient, des églises ont été mises à la disposition des fidèles de différentes traditions liturgiques. Une telle hospitalité pourrait aujourd’hui s’étendre partout où cela semble souhaitable, donnant ainsi le témoignage d’un amour « en actes et en vérité » (1 Jn 3, 18).
Pour favoriser le partage des richesses humaines et spirituelles entre les communautés paroissiales et pour que les fidèles ne se sentent pas partagés entre leur appartenance paroissiale et leur engagement envers les frères de leur quartier, il est aussi souhaitable d’envisager, là où cela est possible, des associations interparoissiales. Elles favoriseraient le dialogue, la concertation, la collaboration, l’entraide matérielle, spirituelle et pastorale. Ainsi se développerait, entre les fidèles des différentes traditions un esprit de communion dont bénéficierait par mode de conséquence l’esprit communautaire, qui fait partie de l’âme libanaise.
68. Au sein d’une même éparchie, il est également important de promouvoir la collaboration entre les paroisses, en rendant les laïcs attentifs aux différents aspects de la vie ecclésiale diocésaine et universelle, par l’information et par l’invitation à un engagement chrétien concret. Cela se réalisera dans la mesure où les prêtres eux-mêmes se connaîtront et se rencontreront. Il est donc souhaité que les pasteurs vivent dans leurs paroisses en liaison étroite avec leurs confrères du même secteur et en bonne relation avec les diacres et les autres agents pastoraux (religieux, religieuses ou laïcs), tout en respectant leur fidélité à leurs appartenances ecclésiales respectives. Ces relations fraternelles pourront aussi s’étendre aux pasteurs des autres Églises et communautés ecclésiales, dans un esprit d’ouverture œcuménique. Ainsi, seront véritablement donnés des signes visibles d’unité entre les différentes communautés ecclésiales, unité à laquelle aspirent légitimement les jeunes chrétiens libanais (190).
Les éparchies
69. « L’éparchie est une portion du peuple de Dieu qui est confiée à un évêque pour qu’il la conduise avec la collaboration de son presbytérium, de telle sorte que, adhérant à son Pasteur et rassemblée par lui dans l’Esprit grâce à l’Évangile et à l’Eucharistie, elle constitue une Église particulière, dans laquelle réside et agit vraiment l’Église du Christ, une, sainte, catholique et apostolique » (191). Elle se compose d’un ensemble de paroisses et il est donc logique que les questions rencontrées au niveau des paroisses soient analogues à celles que l’on retrouve à ce niveau. Plusieurs évêques de différentes Églises sui juris ont juridiction sur un même territoire, ce qui nécessite aussi un esprit de concertation, de coordination et de coopération (192). Pour le bien pastoral du peuple de Dieu, il conviendrait d’envisager de réorganiser la répartition géographique des éparchies, en fonction des besoins et, autant que faire se peut, en harmonie avec les divisions administratives, par souci d’efficacité et d’une meilleure coordination du service pastoral.
Dans le domaine pratique, je fais mien le souhait des Pères synodaux que les curies des éparchies et des patriarcats soient correctement organisées et bien équipées. Ceux qui sont appelés à y travailler, prêtres, diacres ou laïcs, devront se rappeler que leur fonction est une mission d’Église et un service du peuple chrétien, et que, en bons serviteurs, ils devront être attentifs à ne pas dévier de la rectitude spirituelle et morale, et à ne pas utiliser leur fonction à des fins politiques ou de promotion personnelle ou familiale. Les curies trouveront aussi les moyens pour collaborer, afin de mieux servir l’Église au Liban (193). Dans cet esprit, il serait bon que les prêtres, et de manière spéciale les prêtres diocésains, soient étroitement associés à leur évêque, car ils sont « les coopérateurs prudents de l’ordre épiscopal » et leurs rapports sont « fondés sur les liens de la charité surnaturelle » (194). Cette charité fraternelle et cette collaboration seront particulièrement visibles et effectives au sein du conseil presbytéral que doit avoir toute éparchie (195).
Les patriarcats
70. Les Églises patriarcales représentent pour l’Église universelle et pour l’Église au Liban une richesse indéniable, en raison des très antiques traditions spécifiques — liturgiques, théologiques et spirituelles — déjà présentes dès les premiers Conciles œcuméniques et durant le premier millénaire du christianisme (196). Ces traditions sont en grande partie partagées par les Églises orthodoxes. L’Église voulue par le Christ est mystère d’unité dans la diversité, sacrement de la Communion (Koinônia) dont la Trinité sainte est la source, le modèle et la fin. Au niveau d’une Église patriarcale, cette communion se manifeste avant tout dans la collégialité épiscopale, impliquant la coresponsabilité effectivement réalisée dans le synode des évêques de l’Église patriarcale (197). Elle est visible aussi grâce à une franche collaboration entre tous les membres de l’Église patriarcale. Pour que cette coopération dans le service pastoral soit effective, je demande aux patriarches et au synode des évêques de chaque patriarcat d’étudier la possibilité de créer un conseil pastoral au niveau de la curie patriarcale et d’envisager la réorganisation des curies dans chaque patriarcat et dans chaque éparchie (198). La communion s’exprime aussi par les liens entre les Églises patriarcales et l’ensemble de l’Église, liens qui sont aujourd’hui réglés par le Code des Canons des Églises Orientales, car toutes « ont également été confiées au gouvernement pastoral du Souverain Pontife » (199).
Depuis 1990, a été promulgué le nouveau Code des Canons des Églises orientales, qui manifeste la sollicitude du Saint-Siège à l’égard des Églises patriarcales et son souci de mettre en valeur les traditions catholiques d’Orient, dans la tranquillitas ordinis, « assignant le primat à l’amour, à la grâce et au charisme » et rendant plus aisé « dans la vie le développement organique de la société ecclésiale et celui de toutes les personnes qui en font partie » (200). Il importe donc que ce Code soit appliqué avec sérénité, dans un esprit d’équité et de justice envers tous les fidèles placés sous les différentes juridictions patriarcales. Il appartient tout d’abord aux patriarches, à l’Assemblée des Patriarches et des Évêques catholiques au Liban, aux synodes des évêques des Églises patriarcales et à chaque évêque, de veiller à la bonne administration de la justice (201). Je demande aussi à tous ceux qui travaillent dans les tribunaux de s’attacher à exercer leur mission ecclésiale dans le respect des valeurs morales propres à leurs fonctions et avec une parfaite intégrité, en ayant soin de servir l’Église. Ce sera un témoignage de l’amour que l’Église porte à ses membres et un élément important de la crédibilité des Églises locales, car la justice et la charité vont de pair (202).
IV. Invitation au renouveau pastoral
La catéchèse
71. Reprenant les urgences pastorales soulignées par les Pères synodaux, j’encourage en premier lieu les pasteurs et les fidèles à donner tous leurs soins au développement de la catéchèse. « Le but spécifique de la catéchèse [est] de développer, avec le secours de Dieu, une foi initiale, de promouvoir en plénitude et de nourrir quotidiennement la vie chrétienne des fidèles de tous les âges » (203). Ainsi, il y a une catéchèse adaptée à chaque âge de la vie, à chaque catégorie sociale de fidèles, à ceux qui se sont éloignés de l’Église et de la foi et qui désirent y revenir, pour que chacun puisse entendre publier les merveilles de Dieu dans sa langue et en être le témoin dans sa culture (cf. Ac 2, 11). Tout en transmettant un savoir, la catéchèse a essentiellement pour but de « mettre quelqu’un non seulement en contact mais en communion, en intimité avec Jésus Christ : lui seul peut conduire à l’amour du Père dans l’Esprit et nous faire participer à la vie de la Trinité Sainte » (204).
Il s’agit ici d’une des premières responsabilités de l’Église, qui nécessite la mobilisation de l’ensemble des fidèles, chacun avec les dons qui lui sont propres. La responsabilité en incombe à chacune des Églises patriarcales et à leurs instances hiérarchiques, en coopération étroite les unes avec les autres. La coordination s’impose donc et l’Assemblée des Patriarches et Évêques catholiques au Liban (APECL), instance de collaboration, peut jouer un rôle de tout premier plan.
La catéchèse doit d’abord être concrètement assurée par les parents, au sein de la famille, car ils sont les premiers éducateurs de leurs enfants (205). L’école tient aussi une place importante, quoique limitée ; en effet, elle ne peut assurer l’intégration du jeune dans sa tradition liturgique propre, car les élèves qui fréquentent les écoles appartiennent le plus souvent à diverses Églises particulières. La paroisse aura donc la charge d’aider et de seconder les parents dans l’enseignement religieux, de favoriser l’intégration des jeunes dans l’Église locale et d’assurer aux adultes une catéchèse adaptée. J’invite donc les parents et les pasteurs à remplir cette mission d’enseignement de la foi avec un très grand soin, car ce qui est semé dans l’enfance porte du fruit tout au long de l’existence. C’est dans cet esprit que la hiérarchie catholique au Liban a souhaité que la communion solennelle, encore pratiquée dans plusieurs écoles catholiques, soit plutôt célébrée dans les paroisses. Des mouvements chrétiens de jeunes et d’adultes, et des centres de formation chrétienne peuvent aussi apporter un précieux concours à la démarche de la catéchèse.
72. En raison de leur vocation conjugale et familiale, les parents ont à exercer leur responsabilité d’éducateurs de la foi, de la prière et des vertus humaines, morales et sociales auprès de leurs enfants (206). Cette éducation commence dès le plus jeune âge des enfants ; elle s’accomplit déjà lorsque les membres d’une famille s’aident les uns les autres à croître dans la foi et dans le respect des valeurs humaines essentielles, grâce à leur témoignage humble, silencieux et persévérant de vie chrétienne, quotidiennement vécue selon l’Évangile. De plus, les parents auront à coeur de poursuivre dans le cadre familial, imprégné d’amour et de respect, la formation plus méthodique reçue ailleurs. Cela marquera les enfants de manière décisive. Les parents en retireront eux-mêmes des fruits évidents pour leur vie personnelle et pour l’approfondissement de leurs liens de confiance avec leurs enfants (207). Mais, afin qu’ils puissent répondre à leur vocation de parents, ils ont le droit d’être aidés par des institutions paroissiales ou éparchiales qui leur donnent la formation nécessaire dans un cadre approprié.
73. Dans les écoles catholiques, la catéchèse a besoin de programmes bien articulés, inspirés du Catéchisme de l’Église catholique, enracinés dans les traditions particulières des Églises orientales, ouverts à la dimension œcuménique et répondant aux besoins spécifiques des jeunes. Les personnes qui sont chargées d’assurer la catéchèse reçoivent une mission importante de la part de l’Église. Elles seront donc choisies avec soin et formées de manière appropriée, pour accompagner les jeunes dans leur croissance humaine et spirituelle, avec patience, pédagogie et souci de transmettre le message chrétien et de les aider à trouver des réponses à leurs interrogations fondamentales concernant le sens même de leur existence. Le catéchiste est plus qu’un enseignant : il est un témoin de la foi de l’Église et un exemple de vie morale. Il conduit chaque jeune à découvrir le Christ et l’oriente vers sa paroisse, afin qu’il s’enracine dans l’Église locale (208).
Durant les années de formation, l’école constitue aussi une communauté croyante, qui permet aux jeunes et aux éducateurs de faire une expérience de communion entre les différentes Églises patriarcales, leur donnant ainsi le désir de participer à une communauté chrétienne tout au long de leur vie. Les liens entre les paroisses et les écoles favoriseront l’intégration des jeunes dans la vie paroissiale, sans pour autant porter atteinte au dynamisme chrétien des établissements scolaires, car, il y a une évidente complémentarité entre les lieux ecclésiaux. Ceux qui ont la charge de la direction des écoles catholiques auront soin de développer dans la communauté éducative de leur établissement un climat de foi et un sens des valeurs humaines et morales, dans le respect de ceux qui ne partagent pas leurs convictions et leur culture chrétienne, mais sans que pour autant on taise les valeurs chrétiennes qui fondent le système éducatif. Ils veilleront donc à ce qu’un temps suffisant soit accordé pour la catéchèse aux élèves catholiques, que soient mis à disposition des moyens adaptés. De même, on fera en sorte que puisse être assurée la catéchèse dans les écoles publiques et dans les écoles non catholiques.
Les paroisses, quant à elles, s’attacheront à développer l’accueil des jeunes, leur donnant la possibilité de participer activement à la liturgie, aux sacrements et aux activités paroissiales, et leur assurant les moyens et les locaux nécessaires dans des centres paroissiaux. Car les jeunes ont besoin de se rencontrer et de nouer des liens entre eux, avec des prêtres et des adultes responsables (209). Les prêtres ont aussi une très grande responsabilité dans le domaine de la catéchèse des adultes, en premier lieu par l’intermédiaire de l’homélie dominicale.
74. Les mouvements chrétiens sont un bien précieux pour l’Église catholique au Liban. Leurs membres y font l’expérience d’une vie fraternelle et d’une vie chrétienne authentiques. En effet, tout en conservant le caractère propre et spécifique de leurs mouvements, les responsables vérifieront en permanence que les critères d’ecclésialité de leurs associations laïques sont respectés (210). Ils veilleront à ce que leurs membres reçoivent une formation humaine et religieuse approfondie et permanente afin qu’ils développent leur amour pour le Christ et pour l’Église (211), et qu’ils demeurent organiquement reliés à leurs paroisses respectives (212), donnant ainsi le témoignage d’une communion solide et forte dans leur conviction, ainsi que d’« une estime mutuelle de toutes les formes d’apostolat dans l’Église » (213). En esprit d’obéissance aux patriarches et aux évêques, les mouvements devront veiller à ce que leurs activités soient en harmonie avec le patrimoine spécifique des Églises au service desquelles ils œuvrent. La reconnaissance d’un mouvement par le Saint-Siège est une invitation à participer à la vie et à la mission de l’Église, en s’engageant dans la société humaine et dans la vie pastorale locale, mais dans le respect de l’autorité des pasteurs et en harmonie avec les Églises particulières et les traditions liturgiques spécifiques, dans une réelle communion missionnaire (214).
Instituts d’enseignement supérieur (215)
75. Les universités et les instituts catholiques doivent veiller à leur identité spécifique, qui est de garantir une présence chrétienne dans le monde universitaire (216), en promouvant, à la lumière de la foi catholique, une réflexion de haut niveau académique dans les différentes disciplines du savoir humain, et une forme d’enseignement qui repose sur la culture chrétienne et sur une vision intégrale de l’homme conforme au patrimoine anthropologique, moral et théologique de l’Église. Elles doivent sans cesse être attentives aux caractéristiques essentielles de leur catholicité : l’inspiration chrétienne de la communauté universitaire, une réflexion continuelle sur les trésors de la connaissance humaine à la lumière de la foi catholique, la fidélité au Magistère et l’engagement de l’institution dans le service du peuple de Dieu et de tous les hommes (217). Les Instituts religieux ont accompli et accomplissent un travail de qualité, pour que se développe une culture en harmonie avec la foi et que l’université catholique remplisse son rôle dans l’Église et à l’égard de la société, favorisant aussi le dialogue inter-culturel.
Différents instituts supérieurs en sciences religieuses et en philosophie proposent aux fidèles une formation exégétique, théologique, philosophique et spirituelle, selon l’enseignement du Magistère de l’Église. Ils mettent à la portée d’un grand nombre de chrétiens les disciplines qui leur permettront de faire grandir leur vie spirituelle, de donner un témoignage plus profond dans la vie quotidienne et de posséder un niveau d’études religieuses qui puisse être en harmonie avec leurs études profanes. Les chrétiens sont ainsi invités à une véritable intelligence de la foi, à une découverte sérieuse de la parole de Dieu, des vérités dogmatiques et des multiples traditions liturgiques et spirituelles, ainsi qu’à la reconnaissance des principes éthiques fondamentaux (218).
76. L’Église a toujours eu aussi le souci de participer à la formation humaine et professionnelle des jeunes, par un enseignement universitaire et technique de qualité, pour les préparer à exercer une profession, car le travail est une des dimensions fondamentales de l’existence humaine (219). Dans le même temps, l’enseignement contribue à édifier la personnalité des jeunes et à augmenter leur culture, à leur faire découvrir une manière chrétienne de vivre dans le monde, dans le travail, dans les loisirs et dans la vie quotidienne, c’est-à-dire développer en eux une véritable spiritualité du travail. Cela les préparera de manière bénéfique à être des témoins du Christ par l’exemple qu’ils donneront et par les valeurs qu’ils sauront transmettre à ceux qui les entourent.
À travers l’enseignement des disciplines scientifiques et techniques, il s’agit de cultiver et de promouvoir une formation scientifique approfondie et le goût de la recherche, qui fassent des jeunes des personnes compétentes dans leur domaine; une telle démarche permet aussi de proposer une culture et une véritable anthropologie chrétienne et un art de vivre en chrétien fondé sur les valeurs essentielles et sur les principes de la doctrine sociale de l’Église. La formation professionnelle et le travail humain ont une incidence sur les différents domaines de l’existence, dans la vie personnelle des travailleurs, dans la vie familiale et dans la vie sociale. « Le résultat de tout cela est que l’homme lie son identité humaine la plus profonde à l’appartenance à sa nation, et qu’il voit aussi dans son travail un moyen d’accroître le bien commun élaboré avec ses compatriotes, en se rendant compte ainsi que, par ce moyen, le travail sert à multiplier le patrimoine de toute la famille humaine, de tous les hommes vivant dans le monde » (220). Selon leur nature, leur statut et leurs objectifs particuliers, les institutions catholiques d’enseignement supérieur « apportent leur propre contribution à l’Église et à la société, soit par la recherche, soit par l’éducation ou la formation professionnelle » (221).
La Faculté ecclésiastique de théologie
77. Pour qu’elle grandisse et s’affermisse, l’Église doit aussi porter son attention sur le renouveau de l’enseignement de la théologie, de la philosophie et du droit canonique, préparant les formateurs et les enseignants — prêtres, diacres, religieux, religieuses, laïcs — qui devront faire face aux nécessités de la vie pastorale. Sans négliger le patrimoine de l’Église universelle, le trésor de la théologie et des traditions spirituelles d’Orient doit être sans cesse approfondi. Les recherches ne manqueront pas d’avoir une incidence sur le dialogue œcuménique, notamment avec l’ensemble des Églises de tradition antiochienne, et sur les relations avec les communautés islamiques, dont le patrimoine spirituel s’est aussi enrichi au cours de l’histoire. La faculté de théologie que possède le Liban a donc une place incomparable pour la formation de niveau universitaire dans les disciplines sacrées, aussi bien pour des membres du clergé, des personnes consacrées et des laïcs.
Pour répondre aux exigences du temps, les programmes d’études doivent être renouvelés de manière à donner une place privilégiée à l’étude de l’Écriture Sainte, du dogme et des traditions orientales, sans négliger cependant les autres traditions. En particulier, la Faculté de théologie s’efforcera d’élaborer une approche globale de la théologie et une méthode de travail qui tiennent compte du patrimoine propre aux Églises orientales, cherchant spécialement à mettre en valeur les échanges et les rapports étroits entre la doctrine, la liturgie et la spiritualité qui caractérisent le christianisme d’Orient (222). Ces programmes viseront avant tout à donner aux étudiants une connaissance vivante, dans la prière, de la manière d’exprimer la foi qui appartient à leur identité ecclésiale. Fermement fondés sur ce patrimoine, ils seront ensuite encore enrichis par la connaissance du patrimoine du christianisme d’Occident. Dans ce sens, je me réjouis que des prêtres libanais soient aussi formés dans des facultés ecclésiastiques hors du Liban, pour que s’entrecroisent les différentes traditions occidentales et orientales. C’est la confrontation entre ce qu’ils ont acquis ailleurs et leur patrimoine propre qui fera d’eux des pasteurs précieux pour les patriarcats auxquels ils appartiennent, aptes à fournir des études et des publications scientifiques sérieuses (223).
Dans un esprit de service et d’ouverture, en tenant compte des réalités complexes du Proche-Orient, la faculté de théologie a la mission de donner un enseignement dogmatique et exégétique de qualité, dans la fidélité aux différentes traditions et au Magistère de l’Église. De ce point de vue, une responsabilité particulière incombe « aux enseignants en tant qu’ils doivent s’acquitter d’un ministère spécifique de la parole de Dieu : ils seront donc pour les jeunes des maîtres de la foi, pour leurs étudiants et les autres fidèles des témoins de la vérité vivante de l’Évangile et des modèles de fidélité envers l’Église » (224). La fonction de théologien s’exerce en vue de l’édification de la communion ecclésiale et elle est un service éminent du peuple de Dieu. De plus, les enseignants ne doivent pas négliger de préparer des chercheurs qui continueront demain l’étude de la théologie, tout en demeurant fermement attachés au donné révélé et en exerçant leurs recherches à l’intérieur de la foi de l’Église ; sans rien altérer de la doctrine, ils auront à tenir compte de l’évolution des cultures et des mentalités pour enseigner la foi, transmettre les vérités évangéliques dans le langage actuel, et participer ainsi à l’édification sans cesse à poursuivre de l’Église. D’autre part, il ne faut jamais oublier que les facultés ecclésiastiques contribuent à établir des dialogues entre l’insondable richesse du message salvifique de l’Évangile et la pluralité des savoirs et des cultures (225), créant ainsi les conditions pour des échanges féconds (226). Cela aidera à l’ouverture missionnaire nécessaire et salutaire, car toute Église particulière qui se replie sur elle-même ne remplit plus sa mission.
La pastorale des vocations
78. Avec les Pères du Synode, j’aimerais ici souligner la nécessité d’une pastorale commune des vocations, pour mettre les moyens de chaque Église patriarcale au service de l’ensemble de l’Église catholique au Liban. Dans ce domaine, ce qui serait réalisé sous mode d’opposition ou de concurrence le serait au détriment du dynamisme du Corps ecclésial tout entier. Le travail de discernement suppose de la part des accompagnateurs et des formateurs une grande liberté intérieure permettant d’aider les jeunes à découvrir dans quelle direction l’Esprit les pousse. Tous les partenaires de la vie pastorale doivent unir leurs forces pour aider les jeunes à discerner librement l’appel qu’ils ressentent en vue de servir l’Église dans le sacerdoce ou la vie consacrée masculine et féminine. Ils devront avoir à coeur d’offrir aux jeunes des modèles de vie qui suscitent la joie et le désir de répondre à leur vocation dans le sacerdoce, dans la vie consacrée ou dans l’engagement apostolique laïque.
J’invite aussi tous les fidèles à faire monter vers le Seigneur des prières ferventes pour les vocations, notamment dans le cadre de la semaine mondiale de prière pour les vocations, afin que le Seigneur envoie des ouvriers à sa moisson (cf. Mt 9, 38) ; c’est aussi une excellente manière de sensibiliser les jeunes à la question des vocations, de leur faire entendre les appels de l’Église et de leur donner les informations nécessaires sur les différentes formes d’engagement, avec les conditions et les étapes de formation qui y sont liées (227).
CHAPITRE IV
La communion
L’Église, Corps du Christ
79. Au terme de quatre années de prière et de préparation, durant lesquelles l’Église catholique au Liban a courageusement réfléchi sur sa vocation et sur sa mission, l’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques lui a rappelé le chemin à suivre, invitant tous les catholiques à la conversion, pour « retrouver, traduites dans leur langage, les paroles mêmes par lesquelles notre Sauveur et Maître Jésus Christ a voulu inaugurer sa prédication: “Convertissez-vous et croyez à l’Évangile” (Mc 1, 15), c’est-à-dire accueillez la joyeuse nouvelle de l’amour, de votre adoption comme fils de Dieu, et donc de la fraternité » (228).
C’est dans le Christ, leur unique espérance, que les fidèles et le clergé forment ensemble l’Église, autour des évêques ; le premier devoir des pasteurs est de maintenir l’unité de l’Église (229). Chaque Église locale manifeste le mystère de cette unité selon sa tradition propre. C’est aussi du Christ crucifié et ressuscité qu’elle reçoit la communion de l’Esprit Saint (cf. 2 Co 13, 13) en qui elle doit sans cesse être renouvelée. « Chacun a sa fonction propre, mais tous vivent d’une même vie. Or, ce que l’âme est au corps de l’homme, l’Esprit Saint l’est au Corps du Christ qui est l’Église ; et l’Esprit Saint opère dans toute l’Église ce que l’âme opère dans tous les membres d’un seul corps » (230). Mais les fruits du renouveau ne concernent pas seulement les fidèles; ils doivent aussi apparaître dans chaque Église patriarcale comme institution et dans la communion entre les différentes Églises patriarcales.
Aussi, dans le troisième temps de ses travaux, l’Assemblée synodale a-t-elle réfléchi à cet aspect de son thème : « Solidaires, nous témoignons de son amour ». Tout au long des séances synodales, j’ai été le témoin de la solidarité entre les Pères synodaux, « selon la vérité et dans la charité » (Ep 4, 15) ; je demande au Seigneur que cette expérience de communion, fruit du Synode, s’étende à tout le peuple, afin que l’Église catholique au Liban témoigne de l’Amour qui unit tous ses membres comme des frères, amour auquel tous les hommes aspirent. Témoigner que Dieu est Amour, c’est le prouver d’abord « en acte et en vérité » (1 Jn 3, 18), car « par la foi en lui, le Christ a augmenté notre amour pour Dieu et pour le prochain » (231). Le témoignage de l’amour entre les catholiques est une des premières exigences qui découlent de l’amour de Dieu, manifesté en son Fils. Le témoignage — le martyre —, qui est la mission essentielle de l’Église, « fait éclater la puissance de l’Esprit » (232), car il est la manifestation de la puissance de Dieu dans le monde, malgré la faiblesse de l’homme. Dans la communion effective des différentes Églises particulières entre elles, il aura toute sa valeur et sa portée.
I. La communion au sein de l’Église catholique au Liban
Au Liban
80. Les Églises patriarcales catholiques au Liban appartiennent à l’Église catholique et, parce qu’elles sont en pleine communion avec le Successeur de Pierre, elles sont aussi en communion les unes avec les autres comme des « parties de l’unique Église du Christ » (233) et « comme des réalisations particulières de l’Église une et unique de Jésus Christ » (234) de laquelle elles tirent leur ecclésialité. Il convient maintenant de se demander en vérité si, en chaque lieu, elles vivent réellement cette pleine communion confiante avec le Siège apostolique et entre elles (235), en particulier dans les domaines où la collégialité épiscopale appelle localement à une coresponsabilité efficace. Les évêques, les membres du clergé, les religieux, les religieuses et les fidèles laïcs les plus engagés dans la mission ont conscience qu’il reste encore un long chemin à parcourir, comme l’exprimaient plusieurs interventions et rapports de carrefours avec lucidité et courage. Mais l’avenir et le renouveau voulus par l’Assemblée synodale dépendent en grande partie des efforts de tous les membres de l’Église catholique et de leurs gestes fraternels (236). Cependant, tous doivent sans cesse se rappeler que la plus belle offrande et « le plus grand sacrifice que l’on puisse offrir au Seigneur, c’est notre paix, notre concorde fraternelle, un peuple rassemblé dans l’unité du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (237).
À partir de l’Instrumentum laboris et dans leur dialogue avec les auditeurs laïcs et prêtres, les Pères synodaux ont pu cerner les principales causes du mal profond dont souffrent les fidèles au Liban : l’absence du sens de l’Église comme mystère de communion, qui exprime la nature sacramentelle de l’Église et l’unité des fidèles en un seul Corps (238). L’ensemble des institutions et la législation canonique expriment ce mystère et invitent tous les membres du peuple de Dieu à une réelle fraternité. Dans cet esprit, il importe que le sens de la foi et de l’Église prévale sans cesse sur la mentalité de repli sur sa propre communauté confessionnelle, qui se manifeste trop souvent. Cet état de fait demande une conversion évangélique [metanoia] constante, pour passer de « la mentalité confessionnelle à un sens d’Église authentique » (239). C’est donc un retournement radical de perspective qui est requis, comme le disait déjà saint Ignace d’Antioche : « Les divisions, fuyez-les comme le principe de tous les maux » (240). Avec l’aide de l’Esprit Saint, pasteurs et fidèles auront l’audace spirituelle de dépasser les limites socio- culturelles de leur communauté confessionnelle, afin de se placer au niveau de l’Église dans son ensemble et d’agir en fonction de toute la communion ecclésiale (241). Les structures existent déjà, prévues par les saints canons, mais leur dynamisme est freiné par diverses formes d’égoïsme personnel ou communautaire, par des difficultés de communication et de collaboration, par le désir tout humain d’avoir une place prépondérante ; ce sont des attitudes contraires à la charité (cf. 1 Co 13, 4-10). Des orientations ont déjà été tracées en ce qui concerne les paroisses, les éparchies, et les synodes des évêques des Églises patriarcales (242). Mais il est important d’envisager aussi des transformations au niveau national, en vue de la coresponsabilité effective des évêques et d’une plus grande communion entre les différentes Églises locales.
81. En 1967, au lendemain du deuxième Concile œcuménique du Vatican, a été créée l’Assemblée des Patriarches et Évêques catholiques au Liban (APECL). Cette structure collégiale ne se substitue pas aux synodes des évêques des différentes Églises patriarcales; chaque patriarcat conserve son autorité propre en ce qui concerne sa vie et son organisation interne. Cependant, l’APECL est une manifestation évidente et une expression singulière de l’esprit collégial des évêques, désireux de rester fidèles à leur vocation de pasteurs, dans une pleine et généreuse collaboration entre eux et avec le Successeur de Pierre (243). Selon ses nouveaux statuts, cette assemblée a pour fonction de favoriser et d’intensifier la concertation et la coopération dans tous les domaines où cela est possible. Pour cela, elle est appelée à vérifier sans cesse l’efficacité de son mode de fonctionnement. Dans cette perspective, les membres de l’Assemblée synodale ayant fait de nombreuses suggestions que je fais miennes, j’invite l’Église catholique au Liban à prendre en compte les orientations générales suivantes (244).
Tout d’abord, il revient naturellement à chaque patriarcat et à l’APECL de soutenir l’élan et le dynamisme nés de l’Assemblée synodale. Ils diffuseront la présente Exhortation post-synodale auprès de tous les fidèles, afin d’en faire l’objet d’études spécifiques et de la mettre en oeuvre dans chaque Église patriarcale et dans toutes les structures communes.
Comme l’ont souhaité les Pères synodaux, il est urgent que l’APECL élabore une pastorale d’ensemble (245) dans les domaines où les différentes Églises patriarcales catholiques peuvent exercer conjointement leurs responsabilités et leur action pastorale. Une telle concertation, dûment réfléchie et soigneusement préparée, amènera à prendre des décisions d’intérêt commun, qui conduiront les membres de l’APECL à s’engager ensemble dans l’action pastorale (246), pourvu que ces décisions ne s’opposent pas à la tradition essentielle de telle ou telle Église patriarcale. Dans l’esprit des renouveaux proposés plus haut (247), il sera très profitable que collaborent aux activités de l’APECL des prêtres, des diacres, des religieux, des religieuses et des laïcs engagés; en particulier, il conviendrait d’étudier la possibilité de mettre en place un conseil pastoral au niveau de l’APECL, afin d’associer tous les membres du peuple de Dieu à la mission de l’Église. Il revient en effet aux pasteurs « de reconnaître et de promouvoir la dignité et la responsabilité des laïcs dans l’Église », qui « ont la faculté, voire même parfois le devoir de donner leur avis en ce qui concerne le bien de l’Église » (248).
Du point de vue fonctionnel, il importe que les Commissions soient réorganisées pour devenir plus opérationnelles et pour être véritablement au service de la mission de l’Église. L’APECL est appelée à s’organiser toujours mieux, afin de travailler pour le bien commun des membres des différentes Églises particulières.
Avec l’ensemble de l’Église catholique au Moyen-Orient
82. Au cours de l’Assemblée synodale, plusieurs interventions ont attiré l’attention sur la vocation et la mission de l’Église catholique au Liban, et sur la nécessité d’établir et de renforcer des liens fraternels avec les chrétiens au Proche et au Moyen-Orient, et spécialement avec ceux qui restent parfois ignorés en Iran, au Soudan et en Afrique du Nord. Cet élargissement de perspective et ce souci de solidarité m’ont beaucoup réjoui; je vois un signe prometteur de renouveau dans un échange de dons entre des Églises particulières. L’Église catholique au Liban, si privilégiée malgré ses souffrances, est invitée à s’ouvrir à ses frères et à répondre joyeusement à la vocation propre à toute Église particulière de créer des liens fraternels, selon l’exemple de la première communauté chrétienne de Jérusalem (cf. Ac 2, 42-46) (249). Plusieurs Pères synodaux, des prêtres, des religieux, des religieuses et des fidèles laïcs aussi ont proclamé que l’une des voies du renouveau de l’Église au Liban sera son ouverture à la mission ad gentes pour coopérer avec d’autres Églises particulières à travers le monde. L’élan missionnaire vers l’extérieur ne pourra que renouveler la jeunesse et la vigueur de l’Église à l’intérieur.
Dans cet esprit, le Conseil des Patriarches catholiques d’Orient (CPCO) (250), appelé à renforcer ses structures, manifestera de manière effective la catholicité de l’Église dans la région et sa mission de salut pour tous ses habitants. Le CPCO a un rôle de coordination régionale, donnant à sa manière un témoignage de l’esprit collégial de l’épiscopat, en vue de réalisations communes dans les domaines apostoliques et caritatifs (251). Avec les communautés catholiques de la diaspora
83. Un appel urgent a été lancé par plusieurs intervenants pour maintenir et intensifier les relations entre les communautés catholiques de la diaspora et les différents patriarcats au Liban. En effet, une communauté locale ne peut pas vivre coupée de son centre d’unité sans courir le risque de s’ériger dans une totale indépendance. Ce renouveau des relations comporte des devoirs de part et d’autre. Ainsi, chaque patriarcat prendra soin de fournir à ses fidèles répandus à travers le monde l’assistance spirituelle et morale dont ils ont besoin, en envoyant des prêtres, des diacres, des religieux et des religieuses, qui auront soin de travailler en liaison avec les autres Églises locales, en particulier avec celle de rite latin ; dans le même temps, les évêques seront attentifs à ce que les futurs prêtres, formés dans la diaspora, puissent découvrir concrètement le patrimoine et la culture de leur Église patriarcale d’origine. Ces relations se concrétiseront aussi par un partage matériel et spirituel permanent, afin de soutenir le Corps ecclésial tout entier (252).
Avec l’ensemble de l’Église catholique
84. L’Assemblée synodale a permis une nouvelle Pentecôte, dont nous devons rendre grâce au Seigneur. Les Églises orientales catholiques en pleine communion avec l’Église de Rome sont une manifestation tangible de la maturité de la conscience ecclésiale. En effet, l’unité est une caractéristique primordiale de l’Église et elle est requise par sa nature profonde (253). Ce souci de l’unité ne doit pas pour autant affaiblir le patrimoine spécifique des Églises orientales catholiques, auxquels les fidèles sont invités à accorder « estime et louange », car il est « patrimoine de toute l’Église du Christ » (254). Les traditions particulières sont aussi une occasion privilégiée de raviver le dynamisme et l’élan missionnaire, auxquels chaque fidèle doit participer. Les pasteurs prendront soin de donner à tous les catholiques la formation nécessaire, pour qu’ils acquièrent le sens missionnaire et qu’ils viennent en aide à leurs frères chrétiens et aux hommes dans le besoin (255).
II. Le dialogue avec les Églises orthodoxes
85. L’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques a été aussi un temps de grâce, un kairos, en raison de la participation active des délégués fraternels des Églises orthodoxes au Liban, venant des Patriarcats grec-orthodoxe et syriaque-orthodoxe d’Antioche, du Catholicossat arménien de Cilicie et de l’Église assyrienne de l’Orient. Leurs interventions en séance plénière et dans les carrefours, ainsi que lors de rencontres amicales, ont contribué à développer un climat fraternel entre les différentes Églises. Je les remercie pour leur participation fraternelle et pour leur contribution au dialogue. En effet, il est désormais clair que des études attentives ont permis de dissiper de nombreux malentendus sur la plupart des différends christologiques traditionnels surgis au Ve siècle. L’Église catholique et les Églises orthodoxes au Liban sont donc appelées, de manière toute spéciale, à « conserver dans une communion de foi et de charité les relations fraternelles qui doivent être en honneur entre les Églises locales, comme entre des sœurs » (256).
Beaucoup de progrès ont été accomplis depuis le Concile œcuménique Vatican II. Avec l’ensemble de l’Église catholique, je me réjouis de l’engagement œcuménique de chacune des Églises, des dialogues fructueux entre elles et des différents accords théologiques qui ont pu être signés (257). Cela a sans aucun doute permis que soient évoqués, avec sérénité et confiance, les problèmes qui font encore obstacle à la pleine communion dans la charité entre l’Église catholique et les Églises orthodoxes et d’envisager des éléments de solution, dans le souci de la vérité.
86. La première orientation proposée consiste à redécouvrir et à approfondir la tradition antiochienne qui est commune à un certain nombre d’Églises patriarcales catholiques et d’Églises orthodoxes au Moyen-Orient. Ce retour aux sources demande un renouveau dans la formation et dans la réflexion théologiques, dans la vie spirituelle et dans l’action pastorale, tenant compte de la Tradition de l’Église, en particulier des Pères d’Orient et d’Occident qui ont exprimé le message évangélique dans leurs diverses cultures. J’invite tous les fidèles du Christ à une prière fervente pour que nous puissions faire la volonté du Seigneur, à une vie de foi et de charité toujours plus intense, à un véritable partage de dons et à la découverte sérieuse des vues spirituelles de leurs frères (258). C’est assurément dans cette ligne-là que les organismes de formation théologique et pastorale peuvent apporter une contribution importante au dialogue œcuménique.
Au cours des discussions, l’Assemblée synodale a évoqué de manière approfondie trois problèmes pastoraux, sources de difficultés dans les relations entre les Églises patriarcales catholiques et les Églises orthodoxes (259), qui doivent encore faire l’objet d’études sérieuses en accord avec le Saint-Siège (260). Je me réjouis des efforts concrets entrepris et des collaborations réalisées dans différents domaines, qui devront être poursuivis et approfondis, dans le souci de faire triompher la vérité et le dialogue de la charité. Des possibilités pastorales sont offertes aux pasteurs de l’Église catholique, dans le respect des traditions et des sensibilités, en veillant à maintenir une juste exposition de la doctrine catholique (261). Elles doivent être utilisées en prenant soin d’avancer en relation et en harmonie avec les conversations que le Saint-Siège poursuit avec les différentes Églises et de donner aux fidèles la formation nécessaire (262).
III. Les liens avec les Communautés ecclésiales issues de la Réforme
87. La participation du délégué fraternel des communautés évangéliques au Liban a été accueillie dans la joie et a été l’occasion de dissiper certains malentendus sur les communautés protestantes (263). Le lien primordial entre l’Église catholique et les communautés réformées repose sur le baptême, qui nous rend fils de Dieu, ainsi que sur l’écoute de la Parole de Dieu. En même temps, nous avons conscience de ce qui nous sépare, en particulier en ce qui concerne les ministères et la sacramentalité de l’Église. Par le dialogue fraternel et la prière, nous pouvons passer peu à peu de la méfiance à des engagements sur la voie de la réconciliation et de la pleine unité, traduits notamment par des actions sociales communes qui mettent en valeur le visage du Christ serviteur de tous les hommes.
IV. Le Conseil des Églises au Moyen-Orient
88. Au Liban, le Conseil des Églises au Moyen-Orient (CEMO) est devenu l’un des cadres habituels du dialogue œcuménique. C’est dans ce contexte que pourrait être engagée une réflexion commune sur des problèmes tels que la date de la célébration de la Pâque du Seigneur et l’étude d’un texte arabe commun du Notre Père et du Credo, qu’il sera nécessaire cependant de soumettre ensuite aux autorités compétentes. Dans le domaine humanitaire, un témoignage commun peut être rendu, pour manifester à nos contemporains la tendresse et la sollicitude du Seigneur. Le service de l’unité chrétienne exige une compétence et une formation spécialisée, et ne peut être réalisé sans la participation au plus haut niveau des Chefs des Églises concernées. En effet, les démarches œcuméniques engagent non seulement l’Église locale, mais aussi toute l’Église et toutes les Églises. J’exhorte donc les pasteurs et les fidèles à garder vivant le désir de l’unité, et, sans se lasser, par un dialogue œcuménique de proximité, à contribuer à faire évoluer les mentalités, en priant ensemble et en agissant ensemble chaque fois que cela est possible (264).
Dans un esprit de concorde et de fraternité, il convient de mentionner aussi les relations que le CEMO s’attache à développer et à affermir avec les différentes communautés musulmanes, afin d’envisager les collaborations possibles pour servir ensemble la société libanaise.
CHAPITRE V
L’Église catholique au Liban engagée dans le dialogue interreligieux
Un vrai dialogue
89. Un vrai dialogue entre les croyants des grandes religions monothéistes repose sur l’estime mutuelle, afin de protéger et de promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté (265). Cette tâche commune est particulièrement urgente pour les Libanais, appelés avec courage à se pardonner les uns les autres, à faire taire leurs dissensions et leurs inimitiés, et à changer leurs mentalités, afin de développer la fraternité et la solidarité pour la reconstruction d’une société toujours plus conviviale (266).
Participer à la transformation du monde requiert avant tout la conversion des cœurs et la lutte pour la justice, dans la charité et la fraternité. C’est aussi pour les chrétiens une dimension constitutive de la prédication évangélique, car ils seront reconnus aux bonnes œuvres qu’ils accompliront. L’Église doit sans cesse contribuer à la défense de la dignité de l’homme, « situé au centre de la société », et sa doctrine « révèle l’homme à lui-même » (267). Particulièrement dans les moments critiques de leur histoire, les peuples se tournent avec confiance vers elle pour obtenir conseils, soutien et secours.
« Que ceux qui ont placé leur foi en Dieu aient à cœur d’exceller dans la pratique du bien » (Tt 3, 8). Les communautés spirituelles et les familles de pensée vivant aux Liban, qui se réfèrent à Dieu que tous adorent et s’efforcent de servir (268), doivent désormais s’engager sur la voie d’une solidarité plus profonde; cela se traduira effectivement dans des gestes d’amitié et de compréhension mutuelle, dans le respect inaliénable de la dignité des personnes, de la liberté de conscience et de la liberté religieuse, éléments constitutifs du bien commun.
I. Le dialogue islamo-chrétien
90. Ayant vécu côte à côte pendant de longs siècles tantôt dans la paix et la collaboration, tantôt dans l’affrontement et les conflits, les chrétiens et les musulmans au Liban doivent trouver dans le dialogue respectueux des sensibilités des personnes et des différentes communautés la voie indispensable à la convivialité et à l’édification de la société (269).
Les Libanais ne doivent pas oublier cette longue expérience de relations, qu’ils sont appelés à reprendre inlassablement pour le bien des personnes et de la Nation tout entière. Pour des hommes de bonne volonté, il est impensable que des membres d’une même communauté humaine, vivant sur la même terre, en viennent à se méfier les uns des autres, à s’opposer et à s’exclure au nom de leurs religions respectives. Je remercie les délégués fraternels musulmans et druze de leur présence à l’assemblée synodale et de leur participation active au dialogue.
91. Ce dialogue doit se poursuivre à plusieurs niveaux. Tout d’abord, dans la vie quotidienne, dans le travail et dans la vie de la cité, les personnes et les familles apprennent à s’apprécier. Les expériences concrètes de solidarité sont une richesse pour tout le peuple et une avancée importante dans la voie de la réconciliation des esprits et des cœurs, sans laquelle aucune œuvre commune n’est possible à long terme. La sagesse naturelle conduit donc les partenaires à une riche communication humaine et à une entraide par laquelle s’affermit le tissu social.
Le dialogue religieux ne peut être négligé. Il doit aider chacun à regarder avec estime, à discerner et à reconnaître la grandeur des recherches spirituelles de ses frères, recherches qui conduisent à marcher sur la voie de la volonté divine et qui permettent de faire progresser chez les individus comme dans la vie collective les valeurs spirituelles, morales et socioculturelles.
II. La convivialité
92. Il est particulièrement nécessaire d’intensifier la collaboration entre les chrétiens et les musulmans, dans les domaines où cela est possible, avec un esprit désintéressé, c’est-à-dire pour le bien commun et non pour le bien des personnes privées ou d’une communauté particulière, ou encore dans l’espoir d’obtenir davantage de crédit ou de pouvoir dans la société. Leur considération commune à l’égard de la vie morale et leur aspiration en vue d’un avenir meilleur les rendront tous ensemble responsables de l’édification de la société présente et du monde de demain, en protégeant et en promouvant les valeurs morales, la justice sociale, la paix et la liberté, la défense de la vie et de la famille (270). Cette oeuvre commune ne manquera pas de redonner à tous les Libanais confiance en leurs frères et en l’avenir, en les ouvrant sur le meilleur de la modernité.
Le dialogue islamo-chrétien n’est pas seulement un dialogue d’intellectuels. Il vise, en premier lieu, à promouvoir le vivre-ensemble entre chrétiens et musulmans, dans un esprit d’ouverture et de collaboration, indispensable pour que chacun puisse s’épanouir en se déterminant librement sur les choix dictés par sa conscience droite. En apprenant à mieux se connaître et à consentir pleinement au pluralisme, les Libanais se doteront des conditions indispensables au véritable dialogue et au respect des personnes, des familles et des communautés spirituelles. Les écoles et les différents instituts de formation ont un rôle essentiel en ce domaine, car, dès le plus jeune âge, l’apprentissage de la vie commune rend les enfants attentifs les uns aux autres et les invite à gérer pacifiquement les conflits qui peuvent se présenter.
III. Solidarité avec le monde arabe
93. Ouverte au dialogue et à la collaboration avec les musulmans du Liban, l’Église catholique veut aussi être ouverte au dialogue et à la collaboration avec les musulmans des autres pays arabes, dont le Liban est partie intégrante. C’est, en effet, un même destin qui lie les chrétiens et les musulmans au Liban et dans les autres pays de la région ; chaque culture particulière est encore marquée par les apports religieux et profanes des différentes civilisations qui se sont succédé sur leur sol (271). Les chrétiens du Liban et de l’ensemble du monde arabe, fiers de leur héritage, contribuent activement au perfectionnement de la culture.
Dans tous les pays et dans toutes les cultures où ils sont répandus, « les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par la langue, ni par les coutumes. [...] Ils se conforment aux usages locaux pour les vêtements, la nourriture et le reste de l’existence, tout en manifestant les lois extraordinaires et vraiment paradoxales de leur manière de vivre » (272). Je voudrais insister sur la nécessité pour les chrétiens du Liban de maintenir et de resserrer leurs liens de solidarité avec le monde arabe. Je les invite à considérer leur insertion dans la culture arabe, à laquelle ils ont tant contribué, comme un lieu privilégié pour mener, de concert avec les autres chrétiens des pays arabes, un dialogue authentique et profond avec les croyants de l’Islam. Vivant dans une même région, ayant connu dans leur histoire des heures de gloire et des heures de détresse, chrétiens et musulmans du Moyen-Orient sont appelés à construire ensemble un avenir de convivialité et de collaboration, en vue du développement humain et moral de leurs peuples. De plus, le dialogue et la collaboration entre chrétiens et musulmans au Liban peut aider à ce que, dans d’autres pays, se réalise la même démarche.
IV. L’édification de la société
94. Je voudrais à nouveau soutenir et encourager le peuple libanais dans sa vie sociale. Des divergences subsistent entre les habitants du pays. Mais elles ne doivent pas être un obstacle à une vie commune et à une paix véritable, c’est-à-dire à une paix qui soit plus qu’une absence de conflit.
Comme tous les peuples, parce qu’ils aiment tout particulièrement leur terre, les Libanais sont appelés à prendre soin de leur pays, à maintenir inlassablement la fraternité et à édifier un système politique et social juste, équitable et respectueux des personnes et de toutes les tendances qui le composent, afin de construire ensemble leur maison commune. Personne ne peut se soustraire à l’engagement moral et civique qu’il doit légitimement remplir au sein de son peuple. En outre, toute personnalité publique, politique ou religieuse, et « tout groupe [doivent] tenir compte des besoins et des légitimes aspirations des autres groupes, et plus encore du bien commun de l’ensemble de la famille humaine » (273). En effet, l’action dans la vie publique est d’abord un service responsable de ses frères — de tous ses frères —, afin de faire en sorte par tous les moyens que tous travaillent en harmonie; ceux qui acceptent de s’engager dans le service public, dans la vie politique, économique et sociale, ont le devoir impérieux de respecter certaines obligations morales et de subordonner leurs intérêts particuliers ou de groupe au bien de leur nation. En vivant ainsi, ils seront des exemples pour leurs compatriotes et ils s’attacheront à tout mettre en œuvre pour faire concourir leurs actions au bien commun. Cela suppose de dépasser en permanence des attitudes égoïstes (274), afin de vivre dans un désintéressement qui peut aller jusqu’à l’abnégation, afin de guider le peuple tout entier vers le bonheur, par la juste conduite de la res publica.
95. Dans la vie sociale, « on ne peut mépriser impunément les droits, les devoirs » (275) des personnes, des communautés culturelles ou spirituelles et des peuples. En ce domaine, le progrès humain, personnel et collectif, suppose le sens du partage, de la responsabilité et du sacrifice. L’ignorer ne peut que conduire à un profond ébranlement de l’ordre dans les relations publiques en livrant chacun aux arbitraires de toutes sortes et, de la part de tout le peuple, à une perte inévitable de confiance dans les institutions nationales. Comme je l’ai déjà dit en plusieurs circonstances, « le droit des gens et les institutions qui le garantissent constituent des références irremplaçables et défendent l’égale dignité des peuples et des personnes » (276). Nous avons là une des expressions authentiques de ce qu’est le bien commun, fondement de la légitimité politique et morale de l’autorité et des lois auxquelles les personnes doivent se soumettre.
J’invite donc tous les Libanais à entretenir et à faire grandir en eux-mêmes, et particulièrement dans les jeunes générations, « la détermination ferme et persévérante de travailler pour le bien commun : c’est-à-dire pour le bien de tous et de chacun parce que tous nous sommes vraiment responsables de tous » (277). Dans le même temps, il est souhaitable que se développe un partage équitable des responsabilités au sein de la nation, pour que tous puissent mettre leurs talents et leurs capacités au service de leurs frères et sentir qu’ils ont une contribution spécifique à apporter à leur pays, selon le principe de subsidiarité (278), par leur créativité personnelle et par l’exercice de leur esprit d’initiative qui constituent un droit (279).
La vie fraternelle et solidaire au sein de la communauté nationale suppose de ne pas envisager sa place particulière comme la recherche de privilèges pour soi-même et pour sa propre communauté, en écartant éventuellement d’autres personnes. Elle est fondée sur l’assurance que chacun a, de droit, son rôle dans la vie sociale, politique, économique, culturelle et associative, dans la fidélité à ses traditions spirituelles et culturelles, dans la mesure où cela ne s’oppose pas au bien commun et ne met pas en danger la vie nationale.
96. J’invite tous les Libanais à porter une attention spéciale aux jeunes, qui sont la plus grande richesse de leur pays et qui, pour cela, doivent recevoir une formation professionnelle et une éducation humaine, morale et spirituelle de qualité. Il importe aussi qu’ils aient leur part dans les décisions qui engagent la nation, qu’ils se sentent accueillis et soutenus dans leur insertion professionnelle et sociale et qu’ils puissent bénéficier de formations leur permettant d’envisager sereinement leur avenir personnel et la construction d’une famille. Mais les changements de structures sont liés à un changement des cœurs, pour que tous aient le souci de participer à la vie commune, dans le respect de la justice sociale (280). Dans cet esprit, tous auront soin de promouvoir la valeur de justice entre les personnes et entre les générations, car les iniquités engendrent la violence, la méfiance et l’égoïsme. En même temps, il importe d’offrir du travail à un maximum de personnes, pour éviter que certains Libanais demeurent pour toujours en marge de la société, voient leur niveau de vie baisser dangereusement ou connaissent des situations d’extrême pauvreté, et que d’autres se désintéressent de la vie de leur pays et soient poussés à « une sorte d’émigration “psychologique” » (281), parce qu’ils ont le sentiment qu’ils ne peuvent pas participer à la vie de la collectivité et parce qu’ils n’entrevoient aucun avenir sur leur terre d’origine.
V. La paix et la réconciliation
97. Dans les années passées, le Liban a été marqué par l’épreuve de la guerre. Aujourd’hui, ces souffrances demandent une réelle purification des mémoires et des consciences. Il convient de développer « une paix patiemment édifiée et durable » (282), car elle seule peut être la source véritable du développement et de la justice.
« Je vous laisse la paix; c’est ma paix que je vous donne; je ne vous la donne pas comme le monde la donne » (Jn 14, 27). Parce qu’ils ont reçu du Christ, Prince de la Paix, ce don qui les transforme intérieurement, les chrétiens ont le devoir d’en être les premiers témoins et les artisans (283) ; l’Évangile de la paix est une invitation permanente au pardon et à la réconciliation. La paix passe par la pratique assidue de la fraternité humaine, exigence fondamentale qui vient de notre commune ressemblance divine et découle donc d’une exigence liée à la Création et à la Rédemption. Là où la fraternité entre les hommes est fondamentalement méconnue, c’est la paix qui est ruinée à sa base même (284). Construire la paix devient un service de la charité, signe prophétique du Royaume des Cieux.
Le message de paix, que Jésus a profondément exprimé dans les Béatitudes qu’ont pu entendre « des gens de toute la Judée et de Jérusalem et du littoral de Tyr et de Sidon » (Lc 6, 17), doit être transmis par les disciples du Seigneur à tous leurs frères. Aussi les fidèles du Christ doivent-ils se laisser conduire par l’Esprit, qui met en lumière le péché, péché personnel et péché du monde, pour se convertir et pour recevoir la grâce qui les dispose à préparer les chemins du Seigneur. « Puisque le chemin de la paix passe en définitive par l’amour et tend à créer la civilisation de l’amour, l’Église tient son regard fixé vers Celui qui est l’amour du Père et du Fils et, malgré les menaces croissantes, elle ne cesse d’avoir confiance, elle ne cesse d’implorer et de servir la paix de l’homme sur la terre. Sa confiance se fonde sur celui qui, étant l’Esprit d’amour, est aussi l’Esprit de la paix et qui ne cesse d’être présent dans notre monde humain, à l’horizon des consciences et des cœurs, pour remplir l’univers d’amour et de paix » (285).
98. Aujourd’hui, j’exhorte donc tous les catholiques, et j’invite en même temps les autres chrétiens et les hommes de bonne volonté à poser des gestes prophétiques et à prendre les armes de la paix et de la justice. Il est urgent de développer et de promouvoir entre toutes les composantes de la nation libanaise une véritable éducation des consciences à la paix, à la réconciliation et à la concorde. Dans les relations œcuméniques et interreligieuses, le sens de la paix est aussi un élément fondamental du dialogue fraternel. Il ne faut jamais oublier qu’un geste de paix peut désarmer l’adversaire et invite souvent ce dernier à répondre positivement à la main tendue, car la paix, qui est un bien par excellence, tend à se communiquer. L’histoire religieuse nous présente de nombreux saints qui ont été source de réconciliation par leur attitude pacifique fondée sur la prière et l’imitation de Jésus Christ
Ainsi, au seuil du troisième millénaire du christianisme, s’ouvrira une ère nouvelle pour le pays et pour la région, grâce à des démarches de pardon et à une coopération toujours plus profonde entre toutes les composantes de la société nationale. Ce sont les conditions primordiales pour que se construise et survive « un Liban démocratique, ouvert aux autres, en dialogue avec les cultures et les religions » (286), capable d’assurer à tous ses membres une existence digne et libre. Un État de droit ne peut se fonder sur la force pour se faire respecter. Il est reconnu dans la mesure où les dirigeants et le peuple tout entier sont soucieux des droits de l’homme et aptes à créer entre eux des relations humaines et des échanges dans la confiance et la liberté (287).
La paix suppose de la part de tous la ferme volonté de respecter ses frères, de faire des pas vers eux, et elle s’obtient donc essentiellement en sauvegardant le bien des personnes et des communautés humaines constituant une même patrie, dans ce qu’on peut appeler une économie de la paix (288). Dans cette démarche, la famille et l’école ont un rôle primordial à jouer (289). Ce sont des lieux où les personnes sont appelées à faire une expérience privilégiée d’un « vivre ensemble » sur la même terre. « Ceux qui travaillent à éduquer les nouvelles générations dans la conviction que tout homme est notre frère construisent, à partir des fondations mêmes, l’édifice de la paix » (290).
L’engagement en faveur de la paix de tous les hommes de bonne volonté conduira à une réconciliation définitive entre tous les Libanais et entre les différents groupes humains du pays. La réconciliation est le point de départ de l’espérance d’un avenir nouveau pour le Liban. La guerre est finie et la réconciliation doit être considérée comme la voie de la paix profonde qui doit s’instaurer entre tous les Libanais. Que la fin de la guerre armée soit aussi la fin de la guerre entre les différents particularismes, la fin des conflits d’intérêts personnels, qui parfois sont plus terribles parce qu’ils peuvent devenir des luttes de tous contre tous. Que chacun se rappelle qu’avec la guerre on ne peut rien obtenir. Tout le monde ressort blessé, car la blessure d’un frère est toujours aussi celle de tous ses compatriotes. Seules la paix et la réconciliation sont le cadre propice à une place réelle et reconnue de chaque Libanais dans son pays, et à la résolution des problèmes des personnes et des groupes au sein de la nation.
99. La paix dans le pays pourrait porter des fruits dans toute la région et permettre aussi à tous ceux qui ont été déplacés de retourner dans leur lieu d’origine dans des conditions convenables, grâce à l’aide de leurs compatriotes et de la communauté internationale. En effet, au cours des dernières décennies, à cause de la guerre, des familles libanaises ont fui la terre qui assurait leur subsistance, et, en raison des divers foyers de conflits dans la région, d’autres personnes ont aussi été déplacées. En attendant que puisse se réaliser leur retour sur leur terre, elles ne doivent pas être laissées sans assistance et vivre dans l’indifférence de la population auprès de laquelle elles vivent souvent dans des situations de précarité et de pauvreté, ni éventuellement dans l’indifférence des organisations d’aide humanitaire ou des autorités internationales. Les personnes déplacées demeurent en toute circonstance des êtres humains, avec leur dignité et leurs droits inaliénables (291).
CHAPITRE VI
L’Église au service de la société
Portée sociale de la mission de l’Église
100. Partout dans le monde, l’Église a la mission de faire connaître le Christ, Fils de Dieu, et d’annoncer le salut offert à tous les hommes. En contemplant son Seigneur, homme parfait, elle a aussi toujours eu conscience qu’elle avait une place spécifique dans la société, en faveur de la libération des personnes de tout ce qui entrave leur croissance humaine et spirituelle, car « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant » (292).
I. Le service social
101. Dans son action au sein de la société, le chrétien doit s’inspirer de la parole de Dieu qui l’invite tout d’abord à faire sienne la préoccupation du Seigneur pour les orphelins et les pauvres, qui « ont revêtu le visage du Christ » et qui sont les « bien-aimés de Dieu » (293). Depuis les origines, le peuple de l’Alliance et la communauté chrétienne ont toujours eu conscience du droit primordial du pauvre, du faible et de l’émigré (cf. Dt 24, 17-18). En venant en aide à ses frères dans le besoin, le chrétien participe au rétablissement de la fraternité perdue à cause du péché et il demande au Christ de réaliser la pleine fraternité dont l’Église constitue les prémices. « Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure avec eux ; ils seront son peuple et lui, Dieu-avec-eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n’y en aura plus ; de pleurs, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé » (cf. Ap 21, 3-4). Je fais donc appel à la conscience des fidèles, leur rappelant que nous serons jugés sur la qualité de notre accueil du pauvre, de l’étranger et de celui qui est dans l’épreuve. Si nous les avons accueillis et aidés, au soir de notre vie, nous entendrons le Seigneur nous dire : « Venez les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume. [...] Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, [...] j’étais étranger et vous m’avez accueilli » (Mt 25, 34-35).
Pour que cette forme de témoignage de l’amour de Dieu puisse être comprise comme un témoignage d’Église, il est indispensable que tous les catholiques travaillent en communion avec l’Église tout entière et pas seulement en leur nom propre. « L’esprit de pauvreté et de charité est, en effet, la gloire et le témoignage de l’Église du Christ » (294).
102. Les séquelles de la guerre pèsent lourdement sur la société libanaise et engendrent une crise socio- économique qui touche les individus et les familles; elles se font sentir dans les questions du logement, de la santé, de l’éducation et du travail. Je voudrais ici saluer l’engagement inlassable de nombreux laïcs et d’Instituts religieux dans les services éducatifs, dans les services médicaux et sociaux et dans l’aide aux plus pauvres. Ils manifestent ainsi la sollicitude de Dieu et l’amour du Christ à l’égard de tous les petits qui sont ses frères. En me réjouissant de ce qui existe déjà dans le pays, j’appelle tous les Libanais à poursuivre et à développer des gestes concrets de solidarité et de partage, dans tous les domaines de la vie sociale, confirmant ainsi l’interdépendance indispensable entre citoyens d’un même pays, le principe de la destination universelle des biens de la terre et l’option préférentielle pour ceux qui sont démunis.
Personne ne doit être exclu des réseaux de relations économiques et sociales. Les pauvres, les personnes marginalisées, les handicapés physiques et mentaux, doivent pouvoir bénéficier d’une attention fraternelle et d’une solidarité accrue. En ce qui les concerne, les Églises patriarcales ont le devoir de s’organiser pour proposer des aides effectives, matérielles, spirituelles et morales, à tous ceux qui en ont besoin, en prenant soin de gérer correctement leur patrimoine.
La solidarité nationale doit aussi se développer dans le domaine de la santé. Toute personne doit pouvoir bénéficier des soins et de l’assistance médicale nécessaires, indépendamment de ses ressources. J’invite l’Église à réfléchir à ce qui peut se réaliser en ce domaine, comme dans celui de la pastorale des malades qui ont besoin d’être accompagnés durant leur maladie. Je propose à la hiérarchie catholique de réaliser une étude sérieuse et profonde de l’organisation des services de la santé dans ses institutions, avec le souci d’en faire des lieux de témoignage toujours plus grand de l’amour envers les hommes. En particulier, on sera attentif à rendre les institutions de soins accessibles aux plus défavorisés.
103. L’aide que l’Église peut apporter à la vie sociale est bien plus large que les points qui viennent d’être soulignés. Les problèmes, souvent complexes, doivent être étudiés avec soin et faire l’objet d’actions concertées entre les patriarcats. Durant le Synode, on a souvent évoqué la responsabilité des laïcs, des religieux et des religieuses au sein des instances ecclésiales chargées d’envisager et de mettre en oeuvre les actions en matière sociale. Dans ce domaine comme dans les autres évoqués au cours des chapitres précédents, je demande aux responsables de l’Église catholique au Liban de les associer plus étroitement à la mission de l’Église universelle au bénéfice de tous. Les Églises patriarcales trouveront aussi les modalités de collaboration confiante avec les autres organismes de la société travaillant dans les mêmes secteurs d’activité, dans le respect des responsabilités propres et des spécificités. En particulier, les catholiques s’attacheront à faire régner dans leurs institutions un esprit vraiment chrétien et développeront une pastorale adaptée aux besoins des personnes qui ont recours à leurs services (295).
II. La gestion des biens de l’Église
104. Les biens d’Église sont des moyens pour l’apostolat, pour l’action sociale et pour les services que les chrétiens ont à accomplir, dans une perspective de développement et de justice. En effet, « l’essentiel, c’est la foi et la charité auxquelles rien n’est préférable » (296). Dans le même sens, écoutons l’exhortation de saint Grégoire de Nysse : « Partagez avec les pauvres qui sont les préférés de Dieu. Tout appartient à Dieu, notre commun Père. Et nous sommes tous les frères d’une famille unique » (297). Dans le domaine de leur gestion, en vertu de ma mission de « suprême administrateur de tous les biens temporels de l’Église » (298), je demande un engagement radical de toutes les communautés catholiques orientales, pour qu’elles aient constamment le souci de réaliser une administration rationnelle, transparente et orientée clairement vers les buts pour lesquels les biens ont été acquis. Selon le Code des Canons des Églises orientales, il appartient aux évêques de veiller à ce qu’une gestion saine et moderne des biens soit assurée dans un esprit de désintéressement total par des personnes compétentes, intègres et particulièrement habilitées pour un service ecclésial et social; elles ont à rendre compte de leur gérance et de leurs décisions (299). Il demeure évident que l’administration du patrimoine de l’Église est un service apostolique qui ne peut pas avoir comme fin un enrichissement personnel, familial ou de groupe.
105. Le principe des waqfs, de leur régime juridique et de leur mode de gestion et d’exploitation doit être réexaminé et réévalué. Pour rendre possible leur administration, il faut d’abord dresser un inventaire de l’état actuel et des finalités réelles de chacune des formes de waqfs, leurs différentes sortes de biens temporels (300), et en vérifier la rentabilité et l’exploitation. Il est également nécessaire d’établir une planification d’ensemble des besoins et un usage correct des waqfs, correspondant aux quatre finalités des biens d’Église : le culte, les œuvres d’apostolat, les œuvres de charité et le juste soutien des pasteurs (301).
Dans la ligne fixée par mes prédécesseurs, en particulier par le Pape Paul VI, j’ai confirmé de manière explicite qu’aucun bien d’Église (302) au Moyen-Orient ne puisse être acquis ou aliéné, sinon selon les normes juridiques du droit commun (303), et celles émanées tout spécialement par le Saint-Siège pour le Moyen-Orient (304). Dans ce domaine, les évêques exerceront leur vigilance et prendront soin de donner à tous les membres du peuple de Dieu, spécialement aux séminaristes, aux prêtres et aux membres des Instituts religieux, la formation nécessaire (305).
Je sais que, grâce aux waqfs, de nombreuses réalisations ont déjà été faites et je m’en réjouis. Je salue en particulier les initiatives prises par des patriarcats, des éparchies et des instituts religieux, spécialement la construction d’appartements pour des jeunes couples et pour des personnes défavorisées. De même, j’encourage les initiatives désintéressées prises en ce domaine par des laïcs. Il importe que les différents projets en faveur des familles qui ont le moins de moyens financiers pour vivre soient poursuivis et intensifiés.
III. Le service éducatif
Les écoles et les centres académiques catholiques au Liban (306)
106. Dans le domaine éducatif, l’Église a une tradition qu’il convient de sauvegarder. Elle est appelée à être éducatrice des personnes et des peuples. Les écoles catholiques ont le souci de participer efficacement à la mission de l’Église et de fournir un enseignement de qualité. Pour cela, tous les acteurs doivent y être étroitement associés: enseignants, élèves, parents, personnels techniques et administratifs, prêtres, religieux et religieuses concernés, associations spécifiques de parents d’élèves, d’enseignants et d’anciens élèves qui apportent leur soutien aux institutions scolaires, sous la responsabilité des évêques. J’encourage les communautés éducatives à poursuivre leurs actions au service des jeunes, qui ont besoin de recevoir les bases culturelles, spirituelles et morales qui feront d’eux des chrétiens actifs, des témoins de l’Évangile et des citoyens responsables dans leur pays ; cela suppose que s’intensifient les collaborations et que se développe la coordination entre les services compétents des différents patriarcats catholiques. Les diverses institutions doivent être fidèles à leur mission d’établissements catholiques, en se mettant avant tout à la disposition de la communauté chrétienne, mais aussi plus largement de l’ensemble du pays, dans un esprit de dialogue avec toutes les composantes de la société, sans toutefois perdre de vue leur spécificité d’enseignement catholique. Il convient que la dimension religieuse de l’enseignement catholique soit toujours plus évidente; la façon d’aborder les matières profanes, la proposition d’une vision de l’homme et de l’histoire illuminée par la foi, le lien avec l’Église et le style de vie d’enseignants qui soient des exemples par leurs comportements, l’invitation à une vie morale droite, la proposition d’une vie spirituelle profonde, les connaissances inculquées aux jeunes : ce sont là autant de points d’attention pour une éducation intégrale de la jeunesse. Que tous se rappellent que « l’école catholique [...] a l’ambition de proposer simultanément l’acquisition d’un savoir aussi large et profond que possible, l’éducation exigeante et persévérante de la véritable liberté humaine et l’entraînement des enfants et des adolescents qui lui sont confiés vers l’idéal concret le plus élevé qui soit: Jésus Christ et son message évangélique » (307).
107. Comme toutes les structures scolaires, les établissements catholiques ont conscience de participer à la construction de la société, par l’éducation qui est l’art de former les personnes et de leur proposer les valeurs qui méritent d’être défendues et qui doivent être transmises. La communauté éducative participe à l’approfondissement de la culture libanaise, au développement des relations entre les générations et des rapports des jeunes avec leurs parents. Il ne faut pas oublier non plus qu’elle permet aux jeunes d’envisager sereinement leur avenir et de trouver des raisons de vivre et d’espérer.
Dans la mesure où les circonstances concrètes le lui permettent, l’Église au Liban s’efforce d’être toujours présente à cette activité humaine de première importance; elle sait l’estime que lui portent la grande majorité des Libanais et elle est fière de pouvoir scolariser de très nombreux enfants dans l’ensemble du pays, sans aucune distinction ou discrimination (308). Forte de la confiance qui lui est accordée, elle doit poursuivre ses tâches, en prenant des mesures pour rendre ses établissements d’enseignement accessibles à tous ceux qui peuvent être formés, en particulier aux plus pauvres économiquement, afin de leur permettre d’accéder à la formation de base nécessaire à la vie en société et à la culture. Dans cet esprit, avec les Pères du Synode, je demande aussi aux institutions catholiques d’enseignement de reconsidérer, autant que faire se peut, la question des frais de scolarité dans leurs établissements, pour ne pas pénaliser les familles les plus démunies. Nombre d’entre elles y veillent déjà. En effet, accueillir des jeunes pauvres dans ses écoles constitue une longue tradition de l’Église catholique. J’encourage les communautés catholiques à développer une réelle solidarité entre elles et avec les jeunes dont elles ont la charge, afin qu’aucun jeune n’interrompe sa formation pour des raisons uniquement matérielles ou financières. Dans ce domaine, on apprécie la générosité des institutions éducatives et des fidèles et on souhaite qu’ils poursuivent le partage, dans le cadre de la formation aussi bien scolaire qu’universitaire, en faveur des élèves et des étudiants nécessiteux, de ceux qui viennent des régions rurales et qui ont souvent des difficultés à se loger et à subvenir à leurs besoins primordiaux (309). En réalisant cela, les écoles catholiques contribueront à l’intégration des jeunes dans une société culturellement riche et les aideront à envisager un avenir meilleur.
Les universités et les instituts catholiques
108. Il y a au Liban différents centres académiques, dont certains assurent aussi un enseignement en sciences religieuses. Ces institutions ont leur histoire et leurs traditions propres. Cependant, cette multiplicité peut être source de difficultés dans certaines circonstances, si ne se développe pas un esprit de concertation et de collaboration. On gagnerait à ne plus chercher à créer de nouveaux centres par Église patriarcale, mais parfois à regrouper et à unifier ces institutions, afin d’associer les forces vives et de permettre à certains centres de se spécialiser davantage, pour le bien des fidèles (310). J’encourage les pasteurs à promouvoir une formation de qualité pour tous les fidèles. Elle aura une incidence certaine dans la vie des personnes, dans la vie liturgique, pastorale et missionnaire des Églises particulières et dans les relations avec les autres Églises et avec l’ensemble du peuple libanais.
Comme les Pères du Synode l’ont aussi constaté, les institutions d’enseignement supérieur rassemblent un nombre limité d’étudiants si on le compare à celui des universités de l’État. Pour faire face aux grands défis culturels, pour un meilleur enseignement et pour une plus grande efficacité dans la recherche et dans la formation des futurs professeurs, il est important que les différents instituts universitaires se concertent, afin de faire des propositions communes et, éventuellement, de se regrouper et de confier à certaines institutions une spécificité universitaire particulière. J’invite les évêques à concentrer leurs efforts sur les instituts déjà existants et j’encourage la commission de l’APECL chargée des questions scolaires et universitaires à favoriser les collaborations entre les différents établissements d’enseignement, afin d’éviter les pertes en personnel, en énergies et en moyens matériels.
109. La liberté de l’éducation et de l’enseignement est une des composantes de la vie d’un pays qui est très attentif aux réalités culturelles et qui garantit la liberté de croyance inhérente à la dignité humaine, parfaitement compatible avec les principes généraux d’enseignement (311). Il est important que les parents puissent choisir la forme d’éducation qu’ils préfèrent pour leurs enfants, en fonction de leurs convictions religieuses et de leurs préférences pédagogiques. Les autorités publiques ont le devoir de rendre cette liberté de choix effective et de veiller à ce qu’elle ne soit pas une occasion de discrimination entre les enfants et les familles et que ne pèsent pas injustement sur les parents des charges trop lourdes (312).
110. Dans la vie scolaire et universitaire, il convient aussi d’être attentif à la présence et à la qualité de l’animation spirituelle par des aumôneries bien organisées, pour que les jeunes trouvent des instances de réflexion et de prière qui les aident à unifier leur vie d’hommes ou de femmes chrétiens, en prenant en compte les connaissances acquises dans leur cursus éducatif. Les aumôniers de jeunes, les religieux, les religieuses et les laïcs qui en acceptent la charge, recevront une formation approfondie et seront attentifs aux développements culturels de leur temps. La pastorale universitaire concerne aussi bien les étudiants que les professeurs. J’invite donc tous les patriarcats et les Instituts religieux à fournir, dans la mesure de leurs possibilités, des prêtres, des diacres, des consacrés et des laïcs pour cette pastorale, en détachant les personnes les plus idoines en raison de leur culture, de leurs capacités intellectuelles et de leurs qualités humaines et spirituelles (313).
IV. Service de l’information
111. Les moyens de communication sociale sont devenus désormais des éléments importants de l’éducation et de l’univers quotidien de nos contemporains, ainsi que de l’évangélisation dans les diverses langues et cultures (314). L’Église y a sa place, pour promouvoir la vérité, condition de toute dignité humaine, et les valeurs spirituelles et morales qui permettent à toute personne de se conduire chaque jour avec rectitude et de développer les différents aspects de sa personnalité. J’encourage les initiatives prises dans l’Église afin de favoriser des émissions religieuses, des programmes d’information et d’éducation, et d’aider à former le sens critique des adultes et des jeunes face à la multitude des messages médiatiques, qui donnent parfois l’impression que tous les comportements peuvent être considérés de manière équivalente. De même, l’Église veillera à former des personnes compétentes pour percevoir les enjeux des moyens de communication.
V. Engagement politique
112. « L’Église qui, en raison de sa charge et de sa compétence, ne se confond d’aucune manière avec la communauté politique et n’est liée à aucun système politique, est à la fois signe et sauvegarde de la transcendance de la personne humaine » (315). Sa mission première est de conduire les hommes au Christ, Rédempteur et Sauveur. Il ne lui revient donc pas de s’engager directement dans la vie politique ; en effet, « elle n’a pas de solutions techniques, [...] elle ne propose pas des systèmes ou des programmes économiques et politiques, elle ne manifeste pas de préférence pour les uns ou les autres, pourvu que la dignité de l’homme soit dûment respectée et promue et qu’elle-même se voie laisser l’espace nécessaire pour accomplir son ministère dans le monde » (316). Cependant, le devoir incombe à l’Église de rappeler inlassablement les principes qui seuls peuvent assurer une vie sociale harmonieuse, sous le regard de Dieu. Parce que l’Église vit dans le monde, « tous [ses] membres [...] participent à sa dimension séculière ; mais cela de façon diverse. En particulier la participation des fidèles laïcs a une modalité de réalisation et de fonction, qui, selon le Concile, leur est “propre et particulière” : c’est cette modalité que l’on désigne du nom de “caractère séculier” » (317).
Avec sa sagesse et son souci de servir l’homme et l’humanité, l’Église souhaite donc aider ceux à qui il appartient d’exercer une activité publique à la remplir pleinement, pour le service de leurs frères. Comme elle l’a maintes fois souligné, elle reconnaît qu’il y a une juste autonomie des réalités humaines, dans lesquelles l’homme est appelé à faire un bon usage de sa raison droite (cf. Si 15, 14), en harmonie avec la vie surnaturelle, supérieure à celle de ce monde (318). A toute conscience s’imposent les principes d’humanité, intimant à chacun ce qu’il doit faire ou ne pas faire (319).
Il importe aussi de rappeler qu’il y a une pratique chrétienne de la gestion des affaires temporelles, car le message évangélique éclaire toutes les réalités humaines qui sont des moyens destinés à la fois à édifier la famille humaine et à conduire au bonheur éternel. Les chrétiens ne peuvent donc pas «avoir deux vies parallèles: d’un côté la vie qu’on nomme spirituelle avec ses valeurs et ses exigences; et de l’autre, la vie dite séculière» (320), qui aurait des valeurs différentes ou opposées aux premières. De ce fait, «pour une animation chrétienne de l’ordre temporel, dans le sens [...] qui est celui de servir la personne et la société, les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à la “politique”, à savoir à l’action multiforme, économique, sociale, législative, administrative, culturelle, qui a pour but de promouvoir, organiquement et par les institutions, le bien commun» (321).
113. Les fidèles laïcs accomplissent ainsi un véritable service de l’homme et de la communauté nationale, et cela en vertu de leur baptême, par lequel ils participent à la triple fonction du Christ: sacerdotale, prophétique et royale. Tout spécialement, par la participation à l’office sacerdotal, ils font de leur action une louange au Créateur en perfectionnant la création; par leur participation à l’office prophétique, ils sont «appelés à faire briller la nouveauté et la force de l’Évangile dans leur vie quotidienne, familiale et sociale, comme aussi à exprimer, avec patience et courage, dans les difficultés de l’époque présente, leur espérance de la gloire, même à travers les structures de la vie du siècle » (322). De ce fait, il feront renaître chez leurs compatriotes, en particulier chez les jeunes, l’espérance qu’un avenir est possible et le désir de contribuer activement aux changements qui s’imposent pour parvenir à une vie commune meilleure. La gestion des affaires publiques est un chemin d’espérance, car elle est tournée vers un monde à construire et elle laisse entrevoir que des transformations sont possibles pour améliorer la condition des hommes.
Les fidèles participent aussi à l’office royal du Seigneur en s’engageant dans la voie de l’ascèse spirituelle, pour vaincre le péché et en faisant don d’eux-mêmes pour servir le Christ, dans la charité et dans la justice. Dans cette perspective, il est important que l’ensemble du peuple de Dieu connaisse la doctrine sociale de l’Église, qui donne des éléments de réflexion, des points de repère et des critères de jugement et de décision dans l’action, pour se diriger avec rectitude et intégrité dans les différents domaines de la vie personnelle et sociale.
Dès le plus jeune âge, il convient de fournir à tous les jeunes, dans les différentes institutions éducatives, une éducation civique appropriée, pour les rendre conscients de leurs responsabilités de citoyens et pour promouvoir la vérité et la liberté, la justice et la charité, fondements de la paix et de la fraternité sociales (323).
Je me réjouis que beaucoup de chrétiens travaillent, avec leurs frères des autres confessions religieuses et avec tous les hommes de bonne volonté, dans des services de l’Etat, pour participer à la construction d’une société de justice et de paix, avec désintéressement et dévouement.
VI. Droits de l’homme
114. Parmi les éléments primordiaux d’un Etat de droit, figure la protection des droits de l’homme, c’est-à-dire le respect de toute personne et de tout groupe, car l’homme, qui vit à la fois dans la sphère des valeurs matérielles et des valeurs spirituelles, dépasse tout système social et est la valeur fondamentale. Comme j’ai eu l’occasion de le dire à la tribune de l’UNESCO, «toute menace contre les droits de l’homme, que ce soit dans le cadre de ses biens spirituels ou dans celui de ses biens matériels, fait violence à cette dimension fondamentale» (324). En raison de ses prérogatives et de ses fonctions, l’Etat est le premier garant des libertés et des droits de la personne humaine.
Après les années de souffrances et la longue période de guerre qu’a connues le Liban, son peuple et les autorités qui le gouvernent sont appelés à des gestes courageux et prophétiques de pardon et de purification de la mémoire (325). Certes, il faut maintenir vivant le souvenir de ce qui s’est passé, pour que jamais plus cela ne se reproduise et que jamais plus «la haine et l’injustice ne s’emparent de nations tout entières et ne les poussent à [des actions qui] sont légitimées et organisées par des idéologies qui se fondent plus sur elles-mêmes que sur la vérité de l’homme» (326). Une société ne peut pas se reconstruire si chacun de ses membres, si ses familles ou les différents groupes qui la composent, ne cherchent pas à sortir des rapports conflictuels qui ont marqué les temps de violence et à apaiser tout désir de vengeance. C’est au prix d’efforts, de gestes tangibles de dépassement de soi et de réconciliation, qui sont les signes de la grandeur d’âme des personnes et des peuples, qu’un avenir commun est possible au sein d’une société trop longtemps déchirée par des conflits et des comportements d’hostilité et d’intolérance. Pour ouvrir un avenir nouveau, l’Église n’oublie jamais que le Seigneur l’a chargée d’un ministère de grâce et de pardon, afin de réconcilier les hommes avec Dieu et entre eux, car l’amour est plus fort que la haine et que l’esprit de revanche. Elle s’efforce de se faire l’interprète de la soif de dignité et de justice de ses contemporains, et de conduire les hommes sur le chemin de la paix; elle reconnaît et salue l’attention de la communauté internationale et les nombreuses actions entreprises dans ce domaine au cours des années écoulées.
115. Au sein d’une nation, les autorités légitimes ont le devoir de veiller à ce que toutes les communautés et tous les individus jouissent des mêmes droits et se soumettent aux mêmes devoirs, selon les principes de l’équité, de l’égalité et de la justice. Comme citoyens ayant une charge publique, les dirigeants doivent s’efforcer de mener une vie droite, avec l’humilité requise pour le service des frères, afin de donner l’exemple de la probité et de l’honnêteté. En effet, la rectitude morale est un des facteurs essentiels de la vie en société (327). Dans les domaines politique, économique et social, les responsables de la vie publique sont appelés à être particulièrement attentifs aux personnes qui risquent toujours d’êtres mises en marge de la société, pour faire progresser leurs conditions de vie et de travail. Pour cela, dans une société où les réalités sont de plus en plus complexes, en particulier au Liban et dans l’ensemble du Moyen-Orient, il convient de former des personnes de haut niveau de qualification qui seront aptes à faire entrer leur pays dans tous les réseaux de la vie internationale, car nous constatons actuellement une mondialisation de plus en plus grande de tous les phénomènes sociaux.
Pour sauvegarder l’homme en qui elle reconnaît l’image de Dieu, l’Église «reprend toujours le cri évangélique de la défense des pauvres du monde, de ceux qui sont menacés, méprisés et à qui l’on dénie les droits humains» (328); car le Christ est venu annoncer la libération de tous les hommes (cf. Lc 4, 16-19; Dt 15, 15; Is 61, 1-2) et rendre évidente la vérité sur l’homme. Par le mystère de l’Incarnation, Dieu s’est fait homme. Cela veut dire qu’en Jésus Christ s’éclaire le mystère de l’homme (329) et que les droits de Dieu et les droits de l’homme sont liés, et que violer les droits de l’homme, c’est violer les droits de Dieu; à l’inverse, servir l’homme c’est aussi, d’une certaine manière, servir Dieu, car il n’y a point de charité qui ne s’accompagne en même temps de justice. «C’est aller à Dieu que servir les pauvres; vous devez regarder Dieu en leurs personnes» (330).
116. Afin que la paix règne au Liban et dans la région, et que le progrès puisse bénéficier à tous, j’exhorte les Autorités et l’ensemble des citoyens libanais à mettre tout en oeuvre pour que les droits de l’homme, éléments fondamentaux du droit positif antérieurs à toute constitution et à toute législation d’un Etat, soient pleinement respectés, spécialement dans l’administration de la justice et dans les garanties auxquelles ceux qui sont accusés et en détention ont légitimement droit.
Parmi les droits fondamentaux, il y a aussi celui de la liberté religieuse. Personne ne doit être soumis à des contraintes de la part soit d’individus, soit de groupes ou de pouvoirs sociaux, ni être poursuivi ou mis à l’écart de la vie sociale pour ses opinions, ni empêché de mener sa vie spirituelle et cultuelle, «de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou en association avec d’autres» (331). La sauvegarde des droits de l’homme est urgente; c’est l’avenir d’une nation qui est en jeu, ainsi que celui de l’humanité entière, car tant qu’un être humain est bafoué dans ses droits les plus fondamentaux, c’est toute la communauté des hommes qui est blessée.
CONCLUSION
117. «Le Christ est notre espérance ». Comme le soulignaient déjà les documents préparatoires de l’Assemblée synodale, «il n’y aurait pas eu d’appel à un Synode, s’il n’y avait pas eu des raisons d’espérer» (332). Parmi celles-là, il faut souligner l’amour que tous les Libanais portent à leur patrie et leur dynamisme pour faire vivre ce pays. Comme la rencontre sur la route d’Emmaüs fut pour les deux disciples un chemin avec Jésus (cf. Lc 24, 13-35), le temps de préparation et l’Assemblée synodale ont été une marche avec le Christ; en relisant le passé, avec ses périodes de souffrances, ses difficultés, ses incompréhensions, ses joies, ses espoirs et ses expériences de solidarité fraternelle, les pasteurs et les fidèles ont pu reconnaître que le Seigneur est présent au milieu d’eux et les accompagne, et ils peuvent repartir affermis et transformés, pour être des ferments de vie nouvelle au coeur du monde.
Au cours de l’Assemblée elle-même, les Pères du Synode ont témoigné de leur union profonde dans le Christ. Par l’Esprit Saint, ils ont donné l’image de l’unité de l’Église aux multiples visages, à l’imitation de la première communauté de Jérusalem: «La multitude des croyants n’avait qu’un coeur et qu’une âme» (Ac 4, 32). Dans sa mission, l’Église est conformée au Christ, qui «n’est pas venu pour être servi mais pour servir» (Mc 10, 45), en exerçant comme Lui le ministère du service. L’Assemblée synodale, qui a exprimé les espérances des fidèles, n’est donc pas le terme de la démarche que j’ai voulue pour le Liban, mais une étape. Il convient désormais que les Églises patriarcales catholiques au Liban poursuivent inlassablement leur marche synodale dans la communion, pour que les espoirs deviennent réalité et que l’espérance apportée par le Christ éclaire la route quotidienne de chaque fidèle et l’aide dans sa participation à la vie ecclésiale et sociale. Dans cet esprit, je renouvelle mon appel à la conversion, à la réconciliation, à une plus grande unité et à la coresponsabilité au sein des communautés catholiques. Ce sera pour tous les hommes un témoignage éloquent.
118. Fils et filles de l’Église catholique au Liban, pasteurs et laïcs, entendez l’appel du Seigneur et n’ayez pas peur d’y répondre par un ferme engagement, pour le bien de tous. Dans cette nouvelle étape de votre marche synodale, l’Église catholique dans sa totalité vous soutient par sa prière et par ses aides multiples.
Fils et Filles de l’Église, Dieu accompagne vos efforts. Que la présence active de l’Esprit Saint se manifeste par un accord constant entre vous et avec vos pasteurs! Que l’amour du Christ vous presse de réaliser un seul Corps, de vivre fidèles à l’Évangile et au Magistère, et d’exercer votre mission dans votre terre! La présente Exhortation veut vous aider à marcher ensemble sur la route. Ayez à coeur de raviver en vous le sens de l’Église, Corps du Christ et mystère de communion. La mission ecclésiale au Liban suppose l’engagement de tous et la ferme volonté de mettre en valeur les charismes de chaque personne et les richesses spirituelles de chaque communauté ecclésiale pour un meilleur service de notre Maître et Seigneur, Jésus Christ, et de son Église. Prenez conscience de votre mission commune: annoncer le Christ, Prince de la Paix dont l’étoile s’est levée dans votre région, être des ferments d’unité et de fraternité! Cela se réalisera aussi par un échange permanent de dons entre tous, en ayant une attention particulière aux plus pauvres, ce qui est un service constitutif de l’Église catholique à l’égard de tous.
119. Parce qu’il est composé de plusieurs communautés humaines, le Liban est regardé par nos contemporains comme une terre exemplaire (333). En effet, aujourd’hui comme hier, sont appelés à vivre ensemble, sur le même sol, des hommes différents sur le plan culturel et religieux, pour édifier une nation de dialogue et de convivialité (334) et pour concourir au bien commun. Des communautés, chrétiennes et musulmanes, s’attachent aujourd’hui à rendre plus vivantes leurs traditions. Ce mouvement est positif et peut faire redécouvrir des richesses culturelles communes et complémentaires, qui affermiront la convivialité nationale.
L’expérience synodale doit être un renouveau pour l’Église catholique au Liban, ainsi qu’une participation effective au renouveau du pays tout entier, afin de lui faire retrouver les valeurs morales et spirituelles qui le caractérisent et qui assurent sa cohésion. La présence des délégués fraternels des autres Églises et Communautés chrétiennes, ainsi que celle des représentants des communautés musulmanes et druze, a permis de souligner le prix que tous accordent à une fraternité et à un dialogue toujours plus vrais et plus intenses. Ces gestes constituent une nouvelle étape pour approfondir dans le pays la concertation et le dialogue fraternel.
120. A la suite des Pères du Synode, je vous exhorte, vous tous Libanais de toutes confessions, à réussir ce défi de la réconciliation et de la fraternité, de la liberté et de la solidarité, qui est la condition essentielle de l’existence du Liban et le ciment de votre unité sur cette terre que vous aimez. Les différences et les particularismes au sein de la société, ainsi que les tentations de s’en tenir à des intérêts personnels ou communautaires, doivent passer au second plan. L’unité est une responsabilité que portent chacun de vous et chaque communauté culturelle et religieuse. Elle doit inspirer les démarches de tous dans la vie sociale. Ainsi personne n’aura peur de l’autre; au contraire, tout sera fait pour que les diverses composantes soient respectées et participent pleinement à la vie locale et nationale. Cela requiert des efforts patients et persévérants et le souci d’un dialogue confiant et permanent.
121. Au cours du Synode, j’ai entendu les délégués musulmans affirmer que le Liban sans les chrétiens ne serait plus le Liban. Pour être vraiment lui-même, le Liban a besoin de tous ses fils et filles, et de toutes les composantes de sa population. Chacun a sa place dans le pays et doit retrouver le goût d’y vivre et de relever les défis pour son avenir. Nulle communauté spirituelle ne peut vivre si elle n’est pas reconnue, si elle se trouve dans des conditions précaires et si elle n’a pas la possibilité de participer pleinement à la vie de la nation. Ses membres sont alors tentés d’aller chercher dans d’autres pays un climat plus fraternel et de quoi assurer leur subsistance et celle de leur famille. Dans cet esprit, j’invite donc tous les fidèles de l’Église catholique à demeurer attachés à leur terre, avec le souci d’être partie intégrante de la communauté nationale, de participer à la reconstruction de ce qui est nécessaire aux familles et à la collectivité, et de maintenir leur spécificité chrétienne et leur sens missionnaire, à l’exemple de leurs devanciers. De même, les membres des autres composantes de la nation doivent s’efforcer de demeurer sur la terre de leurs ancêtres. Evidemment, tout cela suppose aussi que le pays recouvre sa totale indépendance, une souveraineté complète et une liberté sans ambiguïté (335).
122. Avec les Pères du Synode, nous confions ce grand projet à l’intercession de Notre-Dame du Liban, la Toute-Sainte, que les chrétiens libanais vénèrent sincèrement. En plusieurs circonstances, elle a obtenu de son Fils ce que discrètement elle lui demandait. Si, dans sa délicatesse, elle est intervenue, elle interviendra aussi pour que l’Église au Liban sache témoigner de l’amour du Christ. A la Pentecôte aussi, elle était là, priant avec les Apôtres et louant Dieu. Durant tout le Synode, elle a accompagné les prières et le travail des Pères et de tous les fidèles.
Chers fils qui êtes au Liban, «vos ancêtres [...] se trouvèrent parmi les foules qui entouraient Jésus pour écouter son enseignement. [...] Les pieds du Rédempteur du monde ont foulé votre terre, [...] ses yeux en ont admiré la beauté. [...] Je voudrais que [son] regard plein d’amour, vous accompagne tous» (336), sur cette terre qui par le passage du Sauveur est devenue une terre sainte. Soyez forts dans le Christ, votre espérance. Laissez-vous conduire par l’Esprit, pour faire en tout temps la volonté de Dieu, qui poursuivra en vous ce qu’il a déjà commencé. Les catholiques libanais sont donc appelés, dans le Christ mort et ressuscité, à mourir au «vieil homme» (Col 3, 9), c’est-à-dire au péché, à l’égoïsme et à l’individualisme. Ils sont appelés aussi à pardonner et à se faire pardonner, devenant source de paix, tant pour l’unité du corps ecclésial que pour celle de la société libanaise. Ils témoigneront ainsi de la vérité de la Résurrection en aidant les communautés à renaître à l’espérance (337).
123. Le Synode lui-même a été un moment providentiel qui permettra à l’Église catholique au Liban de conforter et d’affermir sa mission et de se faire une idée plus claire de sa vocation dans l’Église universelle et dans le monde. Aujourd’hui commence la dernière étape de l’Assemblée synodale, qui requiert l’engagement de tous les catholiques libanais pour sa mise en oeuvre effective. La présente Exhortation post-synodale doit vous guider dans votre vie personnelle, dans votre mission de témoins du Christ ressuscité et dans votre service de l’Église et de la société. Je demande aux patriarches et aux synodes des évêques des Églises patriarcales de veiller à ce que toutes les catégories de fidèles puissent réellement participer à l’activité de l’Église, en prenant leur part de responsabilité, en fonction de leur état de vie et de leurs aptitudes; en particulier, il importe que les laïcs soient étroitement associés à la vie de l’Église à tous les échelons.
Dans les éparchies et le vicariat latin, l’évêque, qui a la charge de l’unité entre toutes les composantes de la communauté ecclésiale, s’attachera à promouvoir l’action des fidèles et la collaboration confiante de tous les membres du peuple de Dieu. De même, dans les paroisses, les prêtres favoriseront la participation de tous les fidèles, enfants, jeunes et adultes, à la vie quotidienne de leur communauté. J’exhorte les membres des Ordres religieux et toutes les personnes consacrées à renouveler les engagements de leur profession, à mener «une vie d’amour oblatif» (338), à manifester chaque jour une fidélité toujours plus grande aux conseils évangéliques et à l’enseignement du Magistère, un désintéressement accru dans l’usage des biens des Instituts, qui doivent être avant tout au service du peuple. Ce sera, pour tous leurs frères libanais, un appel à pratiquer à leur tour le partage et la solidarité. Les personnes consacrées sont aussi invitées à approfondir leurs relations filiales avec les évêques, en vue d’une plus grande unité pastorale. Votre pays a une longue tradition d’organisations laïques qui apportent leur contribution à la vie ecclésiale. Il appartient aux différents organismes d’être attentifs aux besoins de leurs frères et de consacrer toutes leurs forces à les servir avec humilité.
124. Je suis favorable à ce que, comme pasteurs de l’Église au Liban, l’Association des Patriarches et Évêques catholiques au Liban et l’ensemble des évêques, en ce qui les concerne, constituent une commission spéciale comprenant des évêques, des prêtres, des diacres, des religieux, des religieuses et des laïcs, avec des programmes d’action courageux, pour la réception et l’application de la présente Exhortation post-synodale. De même, il conviendra que chaque éparchie et chaque Institut religieux, personnellement et collectivement, établissent une commission similaire. De même, il conviendra que les différentes institutions de l’Église catholique au Liban, l’APECL et les Synodes des évêques des Églises patriarcales, les éparchies, les membres du clergé, les Instituts de vie consacrée et les fidèles s’attachent à étudier le présent document. Pour ma part, je vous assure de la pleine disponibilité du Saint-Siège pour aider et servir ces commissions et l’Église au Liban, dans le travail pastoral. Concrètement, je donne une charge spéciale à la Congrégation pour les Églises orientales, afin qu’elle se mette au service de l’Église au Liban et qu’elle offre toute l’aide nécessaire à votre action ecclésiale. La Secrétairerie d’Etat et les différents dicastères de la Curie romaine, en particulier la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, la Congrégation pour l’Education catholique, le Conseil pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens et le Conseil pontifical pour le Dialogue inter-religieux sont aussi pour vous des interlocuteurs qui souhaitent faciliter votre mission et contribuer à l’élan nouveau de vos communautés chrétiennes.
125. En vous remettant la présente Exhortation, chers fils et filles du Liban, je vous renouvelle ma confiance et, comme le Christ, je vous envoie dans le monde, pour être des témoins de la foi, de l’espérance et du salut. Que la grâce du Christ vous remplisse de charité! Les efforts de chacun par amour pour le Seigneur et pour son Église porteront de nombreux fruits pour la vie ecclésiale et pour la société libanaise tout entière. Alors, le Liban, l’heureuse montagne, qui a vu se lever la Lumière des Nations, le Prince de la Paix, pourra pleinement refleurir; il répondra à sa vocation d’être lumière pour les peuples de la région et signe de la paix qui vient de Dieu. Ainsi l’Église en ce pays fera la joie de son Dieu (cf. Ct 4, 8).
Au seuil du troisième millénaire, j’appelle instamment les fidèles de l’Église catholique et des autres Églises et Communautés chrétiennes à se préparer au Grand Jubilé de l’An 2000, pour être renouvelés par le Christ et pour renouveler la face de la terre, afin « que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tm 2, 4). Ainsi, la Bonne Nouvelle du Salut sera pour tous les hommes source de force, de joie et d’espérance ; alors le peuple « poussera comme un palmier, il grandira comme un cèdre du Liban » (Ps 92 [91], 13). Donné à Beyrouth, le 10 mai 1997, à l’occasion de ma visite pastorale au Liban, en la dix-neuvième année de mon pontificat.
Donné à Beyrouth, le 10 mai 1997, à l'occasion de ma visite pastorale au Liban, en la dix-neuvième année de mon pontificat.
IOANNES PAULUS PP. II
NOTES
(1) Jean-Paul II, Homélie de la messe de clôture de l’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques (14 décembre 1995), n. 1 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 34.
(2) Cf. Proposition 1.
(3) Cf. Jean-Paul II, Premier message (17 octobre 1978) : AAS 70 (1978), p. 925 ; Allocution au Corps diplomatique (12 janvier 1979), n. 6 : AAS 71 (1979), pp. 355-357 ; Discours à la XXXIVe Assemblée générale de l’Organisation des Nations-Unies (2 octobre 1979), n. 10 : AAS 71 (1979), pp. 1150-1151 ; Allocution au Sacré-Collège (22 décembre 1981), n. 11 : AAS 74 (1982), pp. 304-305.
(4) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 28.
(5) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 37.
(6) Idem, Message, titre du chapitre I.
(7) Ibid., n. 15 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 37.
(8) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 4.
(9) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 102-113.
(10) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 37.
(11) Cf. Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, IVe Lettre pastorale Mystère de l’Église (Noël 1996), nn. 17- 22.
(12) Exhort. apost. post-synodale Vita consecrata, n. 54 : AAS 88 (1996), pp. 426-427.
(13) Conc. œcum. Vat. II, Décret sur la charge pastorale des Évêques dans l’Église Christus Dominus, nn. 36-38 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 322.
(14) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Message, n. 18 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 37.
(15) Jean-Paul II, Encycl. Ut unum sint, n. 60 : AAS 87 (1995), pp. 957-958.
(16) Cf. Ibid., n. 80 : loc. cit., p. 969.
(17) Cf. Jean-Paul II, Annonce de la convocation de l’Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques (Audience générale du 12 juin 1991) : La Documentation catholique 88 (1991), p. 714.
(18) Conc. œcum. Vat. II, Déclaration sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes Nostra ætate, n. 5.
(19) Catéchisme de l’Église catholique, n. 1706.
(20) Conc. œcum. Vat. II, Déclaration Nostra ætate, n. 3.
(21) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport avant la discussion, n. 9 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 28 ; Instrumentum laboris, n. 22.
(22) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 33; cf. Jean-Paul II, Message télévisé aux Libanais (11 juillet 1991) : La Documentation catholique 88 (1991), p. 772 ; Lettre aux patriarches, archevêques et évêques catholiques au Liban (8 juillet 1991) : La Documentation catholique 88 (1991), pp. 770-771.
(23) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 4, et surtout Instrumentum laboris, nn. 19-20.
(24) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. sur l’Église Lumen gentium, n. 8.
(25) Ibid., n. 9.
(26) Ibid., n. 1.
(27) Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Lettre aux évêques de l’Église catholique sur certains aspects de l’Église comprise comme communion - Communionis notio (28 mai 1992), n. 3 : AAS 85 (1993), p. 839.
(28) Cf. Ibid., nn. 3-4 : loc. cit., pp. 839-840.
(29) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 16.
(30) Catéchisme de l’Église catholique, n. 789.
(31) Ibid., n. 791 citant Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. sur l’Église Lumen gentium, n. 7.
(32) Ibid., n. 814.
(33) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 13.
(34) Conc. œcum. Vat. II, Décret Christus Dominus, n. 11 ; cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 177, § 1.
(35) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 23.
(36) Cf. ibid., nn. 25-27.
(37) Conc. œcum. Vat. II, Décret sur les Églises orientales catholiques Orientalium Ecclesiarum, n. 7 ; cf. Const. dogm. Lumen gentium, n. 23.
(38) Ibid., n. 9.
(39) Ibid., n. 7.
(40) Ibid., n. 9.
(41) Jean-Paul II, Allocution pour la présentation aux Pères du Synode du nouveau Code des Canons des Églises orientales (25 octobre 1990), n. 4 : La Documentation catholique 87 (1990), p. 1085.
(42) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 23.
(43) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport avant la discussion, n. 22 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 31.
(44) Proposition 22.
(45) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 7.
(46) Catéchisme de l’Église catholique, n. 2782, qui cite S. Cyrille de Jérusalem, Catéchèse mystagogique 3, 1 : « Dieu, en effet, qui nous a prédestinés à l’adoption de fils, nous a rendus conformes au Corps glorieux du Christ. Désormais donc, participants du Christ, vous êtes à juste titre appelés “christs” ». Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Message, n. 7 : « Cette résurrection est le fondement de notre foi et de notre espérance, qui nous pousse constamment au renouveau, thème principal de notre Synode, afin de nous configurer au Christ » : La Documentation catholique 93 (1996), p. 36.
(47) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 5.
(48) Ibid., n. 4 citant S. Cyprien, De oratione dominica, 29 : PL 4, 553.
(49) Cf. S. Jean Chrysostome, De sacerdotio, 3, 5: PG 48, 643 ; Catéchisme de l’Église catholique, nn. 976-987.
(50) S. Basile de Césarée, Liber de Spiritu Sancto, 15, 36 : PG, 32, 132.
(51) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, nn. 32-34.
(52) Proposition 2 ; cf. Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 6 : AAS 87 (1995), p. 750.
(53) Cf. Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 6 : AAS 87 (1995), pp. 749-751.
(54) Catéchisme de l’Église catholique, n. 1818.
(55) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Message, n. 7 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 36.
(56) Cf. idem, Instrumentum laboris, nn. 19-21.
(57) Idem, Message, n. 63 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 43.
(58) Ibid., n. 3 : loc. cit., p. 36.
(59) Conc. œcum. de Chalcédoine : DS 301. Cf. ibid., n. 302 : « Un seul et même Christ, Seigneur, Fils Unique, que nous devons reconnaître en deux natures (divine et humaine), sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation. La différence des natures n’est nullement supprimée par leur union, mais plutôt les propriétés de chacune sont sauvegardées et réunies en une seule personne et une seule hypostase ».
(60) Conc. œcum. Vat. II, Const. past. sur l’Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, n. 21.
(61) Ibid., n. 38.
(62) Ibid., n. 39.
(63) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Message, n. 2 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 36.
(64) V, 8-9 : SC 33bis, Paris (1951), pp. 63-65.
(65) Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, Message : Un temps décisif pour les Églises du Moyen-Orient (24 août 1991) : La Documentation catholique 88 (1991), p. 938.
(66) Idem, Lettre pastorale La présence chrétienne en Orient. Témoignage et mission (Pâques 1992), n. 18 : La Documentation catholique 89 (1992), p. 599.
(67) Cf., par ex., Conc. œcum. Vat. II, Décret sur l’apostolat des laïcs Apostolicam actuositatem, n. 8.
(68) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Veritatis splendor, nn. 90-93 : AAS 85 (1993), pp. 1205-1207.
(69) Const. past. Gaudium et spes, n. 22.
(70) Ibid.
(71) La Documentation catholique 88 (1991), p. 770.
(72) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 29.
(73) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 25.
(74) Cf. Idem, Lineamenta, n. 32.
(75) Cf. Idem, Rapport après la discussion, I.
(76) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 5.
(77) S. Athanase d’Alexandrie, De l’Incarnation et contre les Ariens, 8 : PG 26, 995-996.
(78) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. sur la Révélation divine Dei Verbum, n. 21.
(79) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 22.
(80) S. Jérôme, Commentaire sur le livre d’Isaïe, Prol. : PL 24, 17 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Dei Verbum, n. 25.
(81) S. Basile de Césarée, Règles brèves, 95 : PG 31, 1059.
(82) Origène, Homélies sur Josué, 20, 2 : SC 71, Paris (1960), p. 417.
(83) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, nn. 24-26.
(84) S. Ambroise de Milan, Commentaire sur le Ps. 108, 15, n. 28 : PL 15, 1420.
(85) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, I, 1.
(86) Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 8 : AAS 87 (1995), p. 752 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Dei Verbum, n. 8.
(87) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 28 ; Instrumentum laboris, n. 27.
(88) Jean-Paul II, Lettre apost. pour le douzième centenaire du deuxième Concile de Nicée Duodecimum sæculum (4 décembre 1987), n. 5 : AAS 80 (1988), p. 245.
(89) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, I.
(90) Cf. Proposition 4.
(91) Cf. Proposition 4. C’est aussi le propos de la Lettre apostolique Orientale lumen : AAS 87 (1995), pp. 745-774.
(92) Cf. S. Ignace d’Antioche, Lettre aux Ephésiens, 13, 1 : SC 10, Paris (1969), p. 69 ; Didachè, 9, 4 : SC 248, Paris (1978), p. 177 ; S. Justin, Apologies 65, 6 : PG 6, 427.
(93) S. Cyrille de Jérusalem, Catéchèses mystagogiques, 4, 9 : SC 126bis, Paris (1988), p. 145.
(94) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 26.
(95) Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 10 : AAS 87 (1995), pp. 755-756.
(96) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, I; Proposition 5.
(97) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 40, § 1 ; 667-669.
(98) Cf. en particulier les numéros 13 à 21, qui rappellent la richesse du patrimoine liturgique des Églises orientales, l’importance de la tradition en ce domaine, l’esprit dans lequel doivent s’effectuer les réformes et la valeur œcuménique du patrimoine liturgique.
(99) Cf. Proposition 5.
(100) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, Introduction.
(101) Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 6 : AAS 87 (1995), p. 750.
(102) Gérassime, Traité sur la Trinité : Paris (1996), p. 229.
(103) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 408.
(104) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 31 ; cf. S. Ignace d’Antioche, Lettre aux Tralliens, 8, 1 : SC 10, Paris (1969), p. 102.
(105) Cf. S. Thomas d’Aquin, Somme théologique, I-II, q. 92, a. 2.
(106) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Centesimus Annus, n. 50 : AAS 83 (1991), p. 856 ; Exhort. apost. post-synodale Christifideles laici, n. 42: AAS 81 (1989), pp. 472-476 ; Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 75.
(107) Ibid., n. 33.
(108) Cf. Proposition 8.
(109) Cf. Proposition 24.
(110) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Message, n. 27 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 39.
(111) Jean-Paul II, Exhort. apost. Familiaris consortio, n. 59 : AAS 74 (1982), p. 151.
(112) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 53.
(113) Cf. Proposition 7.
(114) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, II, 7.
(115) Cf. Proposition 7.
(116) Code des Canons des Églises orientales, can. 1362 ; 1381.
(117) Ibid., can. 1062.
(118) Cf. Proposition 21.
(119) Conc. œcum. Vat. II, Message aux femmes (8 décembre 1965) ; cf. Const. past. Gaudium et spes, n. 29 ; Jean-Paul II, Lettre aux femmes, n. 3 : La Documentation catholique 92 (1995), p. 718 ; S. Basile le Grand, Homélie sur le Psaume 1, 3 : PG 29, 214- 218.
(120) Catholicos Isaac III, Laudes et hymni ad SS. Mariae Virginis honorem ex Armenorum breviario excerpta, Venise (1877), p. 89.
(121) Cf. S. Jean Damascène, De fide orthodoxa, III, 2 : PG 94, 983-988 ; S. Grégoire de Narek, 80e prière : SC 78, Paris (1961), pp. 428-431 ; Agatangelo, Prière du martyr Grégoire l’Illuminateur : Testi mariani del primo millennio, Rome (1991), p. 552 ; Hymne liturgique pour le mois de kðnak dans la liturgie copte : I Copti, Libreria Editrice Vaticana (1994), pp. 165-166.
(122) Jean-Paul II, Lettre apost. Mulieris dignitatem, n. 30 : AAS 80 (1988), p. 1725.
(123) Cf. Jean-Paul II, Lettre aux Prêtres à l’occasion du Jeudi Saint 1995, n. 6 : AAS 87 (1995), pp. 801-802.
(124) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. Familiaris consortio, n. 37 : AAS 74 (1982), pp. 127-129.
(125) S. Jean Chrysostome, Sur l’éducation des enfants, n. 25 : SC 188, Paris (1972), p. 113.
(126) Message pour la Journée mondiale de la Paix 1995, n. 2 : AAS 87 (1995), p. 360.
(127) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, n. 8.
(128) Cf. Proposition 10.
(129) Cf. Ibid.
(130) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 410 ; Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 39.
(131) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Vita consecrata, n. 73 : AAS 88 (1996), pp. 448-449.
(132) Ibid., n. 1 : l.c., p. 377.
(133) Cf. S. Nil l’Ascète, Discours ascétique : PG 79, 719-747 ; S. Basile le Grand, Regulæ fusius tractatæ, q. 7 : PG 31, 927-934; q. 41: PG 31, 1021-1024.
(134) S. Antoine le Grand, Exhortations, n. 150 : La philocalie I, Paris (1995), p. 62 ; cf. Lettre, n. 4 : PG 40, 1008 ; S. Nil l’Ascète, Sur le Cantique des Cantiques, 1, 8, 2 : SC 403, Paris (1994), pp. 179-181 ; S. Athanase d’Alexandrie, Vie d’Antoine, 20, 4 : SC 400, Paris (1994), p. 189.
(135) Cf. S. Jean Chrysostome, Homélie sur 1 Tm, 8, 8 : PG 52, 539-540.
(136) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Veritatis splendor, nn. 90-94 : AAS 85 (1993), pp. 1205-1208.
(137) Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi, n. 41 : AAS 68 (1976), p. 31 ; cf. Exhort. Apost. Evangelica testificatio, nn. 30-31. 52-53 : AAS 63 (1971), pp. 514. 523-524 ; Allocution au Conseil pour les Laïcs (2 octobre 1974) : AAS 66 (1974), p. 568 ; S. Cyrille d’Alexandrie, IV festales, n. 2 : SC 372, Paris (1991), pp. 245-253 ; S. Grégoire de Nysse, Homélies sur l’Ecclésiaste, IV, 5 : SC 416, Paris (1996), pp. 251-259 ; S. Nil l’Ascète, Discours ascétique, n. 25 : PG 79, 719- 810 ; Théolepte de Philadelphie, Sur la profession monastique : La philocalie II, Paris (1995), p. 349.
(138) Cf. S. Athanase d’Alexandrie, Vie d’Antoine, 55, 1-13 : SC 400, Paris (1994), pp. 281-287.
(139) Cf. IXe Assemblée générale ordinaire du Synode des Évêques, « La vie consacrée et sa mission dans l’Église et dans le monde », Instrumentum laboris, n. 14.
(140) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 195 ; 329.
(141) Cf. S. Éphrem le Syrien, Hymne n. 6 : PO 30, 142-143.
(142) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 416.
(143) Ibid., can. 412, § 1.
(144) Cf. Ibid., can. 414-417.
(145) Cf. Ibid., can. 413-415.
(146) Cf. Ibid., can. 457, § 1 ; 524, § 1.
(147) Cf. Lettre, n. 22 : PG 32, 287- 294.
(148) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, II, 4.
(149) Cf. Proposition 11.
(150) Jean-Paul II, Message pour la Journée de la Vie consacrée 1997, n. 6 : L’Osservatore Romano (19 janvier 1997), p. 5 ; cf. Proposition 11, 9.
(151) Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 9 : AAS 87 (1995), p. 754.
(152) Cf. Ibid.
(153) Jean-Paul II, Exhort. apost. postsynodale Vita consecrata, n. 6 : AAS 88 (1996), p. 381 ; cf. S. Basile le Grand, Regulæ fusius tractatæ, 8-9 : PG 31, 934- 945.
(154) Cf. Proposition 12, 1.
(155) Cf. S. Athanase d’Alexandrie, Vie d’Antoine, 30, 1 : SC 400, Paris (1994), p. 219 ; Théodore d’Édesse, Cent chapitres, n. 1 : La Philocalie I, Paris (1995), p. 342 ; Gérassime, Dialogues œcuméniques de guérison, V : Paris (1996), p. 207.
(156) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, V.
(157) Cf. Théodore d’Edesse, Discours sur la contemplation : La Philocalie I, Paris (1995), pp. 361-368.
(158) Hésichius de Batos, Sur la sobriété et la vigilance, n. 34 : La Philocalie I, Paris (1995), p. 198.
(159) Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 9 : AAS 87 (1995), p. 754 ; cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 471, § 1.
(160) S. Macaire l’Égyptien, De la perfection en esprit, n. 8 : PG 34, 847 ; cf. Théodore le Studite, Sur S. Arsène l’anachorète, n. 2 : PG 99, 862-867.
(161) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 570.
(162) Cf. Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, nn. 23-25 : AAS 87 (1995), pp. 770-772 ; Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, V.
(163) Jean-Paul II, Exhort. apost. postsynodale Pastores dabo vobis, n. 14 : AAS 84 (1992), p. 678.
(164) Ibid., n. 15 : loc. cit., pp. 679- 680.
(165) Ibid., n. 16 : loc. cit., p. 681.
(166) Cf. S. Jean Chrysostome, Homélies sur la première Lettre aux Corinthiens, 18, 3 : PG 61, 526.
(167) Conc. œcum. Vat. II, Décret sur la charge des Évêques Christus Dominus, n. 11.
(168) Cf. Proposition 13.
(169) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Décret Christus Dominus, n. 28 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 192, §§ 4-5 ; 278, § 2.
(170) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 192, § 5 ; 278, § 3 ; 390.
(171) Le ministère des prêtres mariés s’exerce dans les territoires historiques de leur rite, selon la discipline en vigueur rappelée en plusieurs circonstances : cf. S. Congr. pour les Églises orientales, Décret Qua sollerti (23 décembre 1929) : AAS 22 (1930), pp. 99-105 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 78, § 2 ; 146, § 2 ; 150, § 3 ; 758, § 3 concernant les dispositions spéciales du Siège apostolique.
(172) Cf. Proposition 15.
(173) Cf. Proposition 14.
(174) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 30.
(175) Cf. Proposition 14.
(176) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 51.
(177) Cf. Proposition 16.
(178) Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, IVe Lettre pastorale Mystère de l’Église (Noël 1996), nn. 51-53.
(179) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, nn. 3, 11, 17, 26.
(180) Conc. œcum. Vat. II, Const. sur la sainte Liturgie Sacrosanctum Concilium, n. 42.
(181) Cf. Proposition 17.
(182) Cf. Lettre apost. Tertio millennio adveniente, n. 42 : AAS 87 (1995), p. 32
(183) Jean-Paul II, Const. apost. Fidei depositum (11 octobre 1992) : AAS 86 (1994), p. 116.
(184) Jean-Paul II, Allocution à Saint- Paul-hors-les-Murs (25 janvier 1985) : La Documentation catholique 82 (1985), p. 283.
(185) Cf. Jean-Paul II, Const. apost. Fidei depositum (11 octobre 1992) : AAS 86 (1994), p. 116.
(186) Cf. Proposition 3.
(187) Cf. Ibid.
(188) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 272-275 ; Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, IVe Lettre pastorale Mystère de l’Église (Noël 1996), n. 59.
(189) Cf. Proposition 18 ; Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, IVe lettre pastorale Mystère de l’Église (Noël 1996), n. 47.
(190) Cf. ibid.
(191) Code des Canons des Églises orientales, can. 177, § 1 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Décret sur la charge pastorale des évêques dans l’Église Christus Dominus, n. 11.
(192) Cf. ibid., can. 202.
(193) Cf. Proposition 19.
(194) Conc. œcum. Vat. II, Décret Christus Dominus, n. 28.
(195) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 264-270.
(196) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 23 ; Décret Orientalium Ecclesiarum, n. 7.
(197) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 102-113.
(198) Cf. Proposition 19.
(199) Jean-Paul II, Allocution pour la présentation aux Pères du Synode du nouveau Code des Canons des Églises orientales (25 octobre 1990), n. 2 : La Documentation catholique 87 (1990), p. 1084 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Décret Orientalium Ecclesiarum, n. 3.
(200) Jean-Paul II, Const. apost. Sacræ disciplinæ leges : AAS 75 (1983), p. XI, texte repris par la Constitution apostolique Sacri canones : AAS 82 (1990), pp.1042-1043.
(201) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 1062.
(202) Cf. S. Éphrem le Syrien, Hymne 26 : PO 30, pp. 142-143.
(203) Jean-Paul II, Exhort. apost. Catechesi tradendæ, n. 20 : AAS 71 (1979), p. 1293.
(204) Ibid., n. 5 : AAS 71 (1979), p. 1281.
(205) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 627.
(206) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. Familiaris consortio, nn. 36-37 ; 60 : AAS 74 (1982), pp. 126-129 ; 152-153.
(207) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. Catechesi tradendæ, n. 68 : AAS 71 (1979), pp. 1333-1334.
(208) Cf. Proposition 23.
(209) Cf. Proposition 17.
(210) Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Christifideles laici, n. 30 : AAS 81 (1989), pp. 446-448.
(211) Cf. Proposition 24.
(212) Cf. Propositions 14 ; 17 ; 18 ; 23.
(213) Conc. œcum. Vat. II, Décret sur l’apostolat des laïcs, Apostolicam actuositatem, n. 23.
(214) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Décret Apostolicam actuositatem, n. 23 ; Exhort. apost. post-synodale Christifideles laici, nn. 25 ; 30-32 : AAS 81 (1989), pp. 436-437 ; 446-452.
(215) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 640 ; 646-647.
(216) Cf. Jean-Paul II, Const. apost. sur les Universités catholiques Ex corde Ecclesiæ, nn. 12-37 : AAS 82 (1990), pp. 1482-1496.
(217) Cf. Jean-Paul II, Const. apost. Ex corde Ecclesiæ, n. 12 : loc. cit., p. 1482 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 641.
(218) Cf. Ibid., n. 15: loc. cit., p. 1484.
(219) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Laborem exercens, n. 4 : AAS 73 (1981), pp. 584-586.
(220) Ibid., n. 10 : loc. cit., pp. 601- 602.
(221) Jean-Paul II, Const. apost. Ex corde Ecclesiæ, n. 10 : AAS 82 (1990), p. 1481.
(222) Cf. Jean-Paul II, Const. apost. Sapientia christiana, préambule III-V ; art. 38-45, 65-83 : AAS 71 (1979), pp. 472- 476, 485-487, 491-496 ; Discours à l’Institut pontifical oriental, 12 décembre 1993 : L’Osservatore Romano en langue française, 51 (1993), pp. 3 ; 6.
(223) Cf. Ibid.
(224) Ibid., préambule IV : AAS 71 (1979), pp. 474-475.
(225) Congr. pour l’Éducation catholique, Conseil pont. pour les Laïcs, Conseil pont. pour la Culture, La présence de l’Église dans l’Université et dans la Culture universitaire, II, 2 : La Documentation catholique 91 (1994), pp. 607-608.
(226) Cf. Jean-Paul II, Const. apost. Ex corde Ecclesiæ, n. 6 : AAS 82 (1990), p. 1479.
(227) Cf. Proposition 25.
(228) Jean-Paul II, Exhort. apost. Reconciliatio et pænitentia, n. 1 : AAS 77 (1985), p. 185.
(229) Cf. Nersès IV norhali, Inni sacri I, Venise (1973), pp. 95-99.
(230) S. Augustin, Sermon pour la Pentecôte, 267, 4 : PL 38, 1231.
(231) S. Irénée de Lyon, Démonstration de la prédication apostolique, n. 87 : SC 62, Paris (1971), p. 203.
(232) Idem, Adversus Hæreses V, 9, 2 : SC 153, Paris (1969), p. 113.
(233) Conc. œcum. Vat. II, Décret Christus Dominus, n. 6.
(234) Congr. pour la Doctrine de la Foi, Lettre aux Évêques de l’Église catholique sur certains aspects de l’Église comprise comme communion Communionis notio (28 mai 1992), n. 9: AAS 85 (1993), p. 843.
(235) Jean-Paul II, Discours à la Curie romaine (20 décembre 1990), n. 9 : AAS 83 (1991), p. 745.
(236) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, III.
(237) S. Cyprien de Carthage, De oratione dominica, n. 23 : PL 4, 536.
(238) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, nn. 1.7 ; Pie XII, Encycl. Mystici Corporis (29 juin 1943) : AAS 35 (1943), pp. 200-202.
(239) Conseil des Patriarches catholiques d’Orient, IVe Lettre pastorale Mystère de l’Église (Noël 1996), n. 50.
(240) Lettre aux Smyrniotes, VII, 2 : SC 10, Paris (1969), p. 139.
(241) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 69 ; Rapport avant la discussion, n. 22.
(242) Cf. supra, chapitre III.
(243) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, nn. 22-23 ; Décret Christus Dominus, n. 38 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 322.
(244) Cf. Proposition 22.
(245) Cf. Proposition 22, 3.
(246) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 322, § 2.
(247) Cf. supra, chapitre III.
(248) Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 37.
(249) Code des Canons des Églises orientales, can. 148.
(250) Hormis les quatre Patriarches membres de l’APECL, le CPCO comprend le Patriarche chaldéen, le Patriarche copte catholique et le Patriarche latin de Jérusalem.
(251) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, V.
(252) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 315.
(253) Jean-Paul II, Lettre apost. Orientale lumen, n. 19 : AAS 87 (1995), pp. 765-767.
(254) Conc. œcum. Vat. II, Décret Orientalium Ecclesiarum, n. 5.
(255) Cf. Proposition 29.
(256) Conc. œcum. Vat. II, Décret Unitatis redintegratio, n. 14 ; cf. Encycl. Ut unum sint, n. 55 : AAS 87 (1995), p. 954.
(257) Cf. Déclaration commune du Pape Paul VI et du Patriarche de Constantinople Athénagoras Ier (7 décembre 1965) : AAS 58 (1966), pp. 20-21 ; Déclaration commune de Sa Sainteté le Pape Paul VI et de Sa Sainteté Shenouda III, Pape d’Alexandrie et Patriarche du Siège de saint Marc (10 mai 1973) : AAS 65 (1973), pp. 299-301 ; Déclaration commune de Sa Sainteté Jean-Paul II et de Sa Sainteté Moran Mar Ignatius Zakka Ier Iwas, Patriarche syrien d’Antioche et de tout l’Orient, Chef suprême de l’Église universelle syrienne orthodoxe (23 juin 1984) : La Documentation catholique 81 (1984), pp. 824-826 ; Déclaration christologique commune entre l’Église catholique et l’Église assyrienne d’Orient (11 novembre 1994) : AAS 87 (1995), pp. 685-687 ; Déclaration commune du Pape Jean-Paul II et du Catholicos Karekin Ier, Patriarche suprême et Catholicos de tous les Arméniens (13 décembre 1996) : La Documentation catholique 94 (1997), pp. 116-117. Déclaration commune du Pape Jean-Paul II et du Catholicos Aram Ier (25 janvier 1997) : La Documentation catholique 94 (1997), pp. 226-227 ; Jean-Paul II, Encycl. Ut unum sint, nn. 50-52 : AAS 87 (1995), pp. 950- 952 qui mentionne les différentes étapes du dialogue œcuménique avec les Églises de l’Orient, depuis la reprise des contacts en 1965.
(258) Nersès IV norhali, Inni sacri I, Venise (1973), qui rappelle les principes de l’unité de l’Église.
(259) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, VI.
(260) C’est au Saint-Siège qu’il revient de signer des accords avec les Églises non catholiques : cf. Code des canons des Églises orientales, can. 904, §§ 1-2.
(261) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 625; 907.
(262) Cf. Ibid., can. 813-816.
(263) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport après la discussion, VI.
(264) Cf. Proposition 33.
(265) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Déclaration Nostra ætate, n. 3.
(266) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 3.
(267) Jean-Paul II, Encycl. Centesimus annus, n. 54 : AAS 83 (1991), p. 860.
(268) Cf. Jean-Paul II, Appel à tous les Musulmans en faveur du Liban (7 septembre 1989) : La Documentation catholique 86 (1989), p. 869.
(269) Cf. Proposition 39.
(270) Cf. ibid.
(271) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 99.
(272) Lettre à Diognète, 8, 5: SC 33, Paris (1965), p. 70.
(273) Conc. œcum. Vat II, Const. past. Gaudium et spes, n. 26 ; cf. Jean XXIII, Encycl. Mater et magistra, II : AAS 53 (1961), p. 418.
(274) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 30.
(275) Jean-Paul II, Lettre apost. sur la situation au Liban (7 septembre 1989), n. 4 : AAS 82 (1990), p. 61.
(276) Ibid.
(277) Jean-Paul II, Encycl. Sollicitudo rei socialis, n. 38 : AAS 80 (1988), pp. 565-566.
(278) Cf. Pie XI, Encycl. Quadragesimo anno, I : AAS 23 (1931), pp. 181-190 ; Jean-Paul II, Encycl. Centesimus annus, n. 48 : AAS 83 (1991), pp. 852-854.
(279) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Sollicitudo rei socialis, n. 15 : AAS 80 (1988), pp. 528-530.
(280) Cf. Ibid., n. 44 : loc. cit., pp. 575- 577.
(281) Ibid., n. 15 : loc. cit., p. 529.
(282) Jean-Paul II, Lettre apost. sur la situation au Liban (7 septembre 1989), n. 2 : AAS 82 (1990), p. 60.
(283) Cf. Jean-Paul II, Lettre apost. sur la situation au Liban. Message à tous les Libanais (1er mai 1984) : AAS 76 (1984), pp. 704-707.
(284) Cf. Paul VI, Message pour la Journée mondiale de la Paix 1971 : AAS 63 (1971), pp. 5-9.
(285) Jean-Paul II, Encycl. Dominum et vivificantem, n. 67: AAS 78 (1986), p. 900.
(286) Jean-Paul II, Lettre apost. sur la situation au Liban (7 septembre 1989) : AAS 76 (1984), p. 705.
(287) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 78.
(288) Cf. Paul VI, Message au Secrétaire général des Nations Unies (26 mai 1966) : « Le développement est le nouveau nom de la paix » : AAS 58 (1966), pp. 479-480.
(289) Cf. Proposition 40, 1.
(290) Paul VI, Message pour la Journée mondiale de la Paix 1970 : AAS 63 (1971), p. 8.
(291) Cf. Jean XXIII, Encycl. Pacem in terris, n. 105 : AAS 55 (1963), p. 286.
(292) S. Irénée, Adversus hæreses, 4, 20, 7 : SC 100, 2, Paris (1965), p. 649.
(293) S. Grégoire de Nysse, De l’amour des pauvres : PG 46, 460 B-465 B.
(294) Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 88.
(295) Cf. Proposition 35, 4.
(296) S. Ignace d’Antioche, Lettre aux Smyrniotes, VI, 1 : SC 10, Paris (1969), p. 137.
(297) De l’amour des pauvres : PG 46, 466.
(298) Code des Canons des Églises orientales, can. 1008.
(299) Cf. Ibid., can. 1022 ; 1031.
(300) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Instrumentum laboris, n. 81.
(301) Cf. Proposition 36 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 1007.
(302) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 1009, § 2 ; Code de Droit canonique, can. 1257, § 1.
(303) Cf. Code des Canons des Églises orientales, can. 1035, § 1 ; 1036, 1042 ; Code de Droit canonique, can. 1290- 1298.
(304) On entend par là l’aliénation, la location, la vente ou la spoliation d’un bien quelconque sans l’autorisation du Siège apostolique. Le non respect de ces normes entraîne de facto la nullité des actes.
(305) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Décret sur le ministère et la vie des prêtres Presbyterorum ordinis, n. 17 ; Décret sur la rénovation et l’adaptation de la vie religieuse Perfectæ caritatis, n. 13 ; Décret Apostolicam actuositatem, n. 10 ; Décret sur l’activité missionnaire de l’Église Ad gentes, n. 16.
(306) Cf. Propositions 26; 28.
(307) Jean-Paul II, Discours au Conseil de l’Union mondiale des Enseignants catholiques (18 avril 1983) : La Documentation catholique 80 (1983), p. 561.
(308) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Message, n. 33 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 39.
(309) Cf. Proposition 28.
(310) Cf. Proposition 27 ; Code des Canons des Églises orientales, can. 646-648.
(311) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Déclaration Dignitatis humanæ, nn. 6-7 ; Déclaration sur l’éducation chrétienne Gravissimum educationis, nn. 3 ; 5.
(312) Cf. Ibid., n. 5 ; Déclaration Gravissimum educationis, n. 6.
(313) Cf. Jean-Paul II, Const. apost. Ex corde Ecclesiæ, art. 6 : AAS 82 (1990), p. 1507.
(314) Cf. Proposition 46.
(315) Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 76.
(316) Jean-Paul II, Encycl. Sollicitudo rei socialis, n. 41 : AAS 80 (1988), p. 570.
(317) Jean-Paul II, Exhort. apost. postsynodale Christifideles laici, n. 15 : AAS 81 (1989), p. 414 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 31.
(318) Cf. Pie XI, Encycl. Mit brennender Sorge, AAS 29 (1937), pp. 152-155 ; Conc. œcum. Vat II, Const. past. Gaudium et spes, n. 40 ; Jean-Paul II, Encycl. Redemptor hominis, n. 14 : AAS 71 (1979), pp. 284-285.
(319) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Veritatis splendor, n. 59 : AAS 85 (1993), pp.1180-1181.
(320) Jean-Paul II, Exhort. apost. postsynodale Christifideles laici, n. 59 : AAS 81 (1989), p. 509.
(321) Ibid., n. 42 : loc. cit., p. 472 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 31 ; Proposition 45, A. 1.
(322) Ibid., n. 14 : loc. cit., pp. 411- 412 ; cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 35.
(323) Cf. Proposition 45.
(324) Discours à l’UNESCO (2 juin 1980) : AAS 72 (1980), p. 737.
(325) Cf. Jean-Paul II, Message à l’occasion du cinquantième anniversaire de la fin de la deuxième guerre mondiale en Europe (8 mai 1995), n. 2 : La Documentation catholique 92 (1995), p. 532.
(326) Jean-Paul II, Encycl. Centesimus annus, n. 17 : AAS 83 (1991), p. 815 ; cf. Message pour la Journée mondiale de la Paix 1980 : AAS 71 (1979), pp. 1572- 1580.
(327) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Veritatis splendor, nn. 99-101 : AAS 85 (1993), pp. 1210-1213.
(328) Jean-Paul II, Lettre à tous mes frères dans l’épiscopat sur l’« Évangile de la vie » (19 mai 1991) : Insegnamenti XIV, 1 (1991), p. 1294 ; cf. Encycl. Centesimus annus, n. 54 : AAS 83 (1991), pp. 859-860.
(329) Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 22.
(330) S. Vincent de Paul, Correspondance, entretiens, documents, IX (1920- 1925), p. 5 ; cf. S. Éphrem le Syrien, Hymne 26 : PO 30, 142-143.
(331) Conc. œcum. Vat. II, Déclaration Dignitatis humanæ, n. 2.
(332) Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Lineamenta, n. 5.
(333) Cf. Jean-Paul II, Message à tous les Évêques de l’Église catholique sur la situation du Liban (7 septembre 1989), n. 6: AAS 82 (1990), p. 63.
(334) Cf. Jean-Paul II, Message télévisé aux Patriarches et Évêques réunis à Bkerké (25 mai 1990), n. 4 : AAS 83 (1991), p. 96.
(335) Discours au Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège (12 janvier 1991), n. 7 : La Documentation catholique 88 (1991), pp. 196-197.
(336) Jean-Paul II, Homélie de la messe de clôture de l’Assemblée spéciale pour le Liban (14 décembre 1995), n. 2 : La Documentation catholique 93 (1996), pp. 34-35. 337) Cf. Assemblée spéciale pour le Liban du Synode des Évêques, Rapport avant la discussion, n. 14 : La Documentation catholique 93 (1996), p. 28. 338) Jean-Paul II, Exhort. apost. postsynodale Vita consecrata, n. 75 : AAS 88 (1996), p. 451.
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