DISCOURS DU PAPE PIE XII
À UN GROUPE DE FONCTIONNAIRES DES ÉTATS-UNIS PARTICIPANT À UNE CONFÉRENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL*
Mercredi 16 juillet 1947
Vous venez, Messieurs, d’assister à une réunion importante de l’organisation internationale qui est chargée d’améliorer les conditions de vie des travailleurs. Sans aucun doute vous découvrez que c’est là une tâche très vaste et apparemment sans fin, mais en même temps c’est une tache qui attire ce qu’il y a de plus noble dans le cœur humain. Nous ne pouvons assez louer vos intentions.
L’histoire prouve combien l’Église a toujours attaché une extrême importance à cette question. Non pas que l’Église ait reçu un mandat direct pour s’occuper de la vie économique. Mais l’ordre social et économique ne peut être séparé de l’ordre moral et c’est son privilège et son devoir d’affirmer et de proclamer les principes invariables de la moralité. Ceux-ci se dressent au-dessus de la mer mouvementée des controverses sociales comme des phares dont la lumière perçante devrait guider tout essai tenté pour apporter un remède aux détresses sociales.
L’ouvrier honnête ne désire pas améliorer sa condition en piétinant les libertés des autres qui doivent lui être aussi sacrées que la sienne propre. Mais, il nourrit, ancré profondément dans son cœur, le légitime désir de posséder, d’une manière indépendante et assurée ce qui est nécessaire à sa subsistance et à celle de sa famille et ce qui lui permettra de vivre selon sa dignité et sa conscience. C’est pourquoi l’Église prendra toujours sa défense contre tout système qui lui refuserait ces droits inaliénables qui ne dérivent pas de l’autorité civile mais de sa propre personnalité humaine, ou qui voudrait le réduire à un état de totale soumission à une bureaucratie détentrice du pouvoir politique. Nous sommes certain que vous, Messieurs, êtes d’accord pour dire que toute organisation tendant à améliorer les conditions de vie des travailleurs serait un mécanisme sans âme et par là sans vie et sans fécondité, si sa charte ne proclame et ne prescrit efficacement en tout premier lieu, le respect de toute personne humaine, quelle que soit sa condition sociale ; deuxièmement la reconnaissance de la solidarité de tous pour former la vaste famille humaine, créée par la Toute-Puissance aimante de Dieu; troisièmement l’exigence impérieuse qui impose à la société de placer le bien commun au-dessus de tout intérêt privé, le service de tous au profit de tous. Quand l’esprit humain sera réformé et stabilisé selon ces vérités, les conditions de vie des travailleurs seront améliorées. Aucune puissance de l’État ne pourra réformer l’esprit humain. C’est là la mission sacrée de la religion. Et l’État dont les assises sont fondées sur la moralité et la religion sera le protecteur et le défenseur le plus efficace de travailleurs.
Nous demandons à Dieu ses bénédictions sur vos efforts persévérants dans ce domaine ; puissent ses grâces de choix descendre sur vous et sur ceux qui vous sont chers.
* La Documentation catholique n.1006 col.1611-1612.
Documents Pontificaux 1947, p.213-214.
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